Si l’on convient que 100 jours c’est un peu juste pour tirer un bilan, le nouveau président du Conseil national de la communication (CNC), Jean Ovono Essono, en a décidé autrement en tirant, le 24 juin dernier à la faveur d’une conférence de presse, un inventaire dit d’étape de son action à la tête de l’organe de régulation des médias. Si la communication à ce sujet fait état des constats et des bonnes intentions, elle occulte un petit passif pourtant fort annonciateur.
A la faveur d’une conférence de presse donnée le 24 juin dernier, Jean Ovono Essono, président du Conseil national de la communication (CNC), a dressé le bilan de ses 100 premiers jours à la tête de l’organe de régulation des médias au Gabon.
Après Pierre Marie Ndongo qui a dirigé l’institution du 30 mai 1996 au 20 janvier 2006, Jean Ovono Essono est le deuxième président du CNC issu du secteur de la communication. Âgé de 67 ans depuis le 17 mai 2011, l’homme est en effet connu pour avoir été chroniqueur sportif, ancien porte-parole de la présidence de la République et Haut représentant personnel du chef de l’Etat, sous l’ère d’Omar Bongo. Il a été nommé à la présidence du CNC le 3 mars dernier.
L’auto-bilan qu’il dresse de ses trois mois au CNC fait état des entretiens divers qu’il a eu avec les diplomates en poste au Gabon et avec les partenaires au développement, «en vue de trouver les voies et moyens pour le renforcement des capacités.» Il a également été question de la série de visites, entamée depuis le 30 mai dernier, qui l’a amené à visiter les sièges sociaux de bon nombre de médias gabonais, conformément à l’article 2 de la loi organique du CNC qui stipule que l’institution veille «aux conditions d’installation de toutes entreprises publiques et privées de communication.»
Ces visites permettent à Jean Ovono de constater que plusieurs maux minent le secteur de la communication : «pêle-mêle, l’insuffisance de fonds propres, l’absence de plan de financement, les coûts élevés d’impression et de distribution des journaux, l’accès difficile des médias privés au marché publicitaire, y compris des annonces institutionnelles, ainsi que la non accréditation aux manifestations officielles.»
«A ce tableau s’ajoutent les pesanteurs administratives dans l’acquisition des autorisations d’émettre, l’insuffisance de formation, la non mise en place jusqu’à ce jour du Fonds national d’aide à la presse écrite et audiovisuelle, en abrégé Fonapresse, etc.», énumère Jean Ovono Essono qui promet de transmettre les doléances recueillies «aux autorités compétentes pour leur prise en compte effective.
Celui qui avait promis de ne pas être le père fouettard des médias, n’a pas manqué de s’attarder sur la liberté de la presse, le respect des règles d’éthique et de déontologie et la responsabilité du journaliste. Le président du CNC a rappelé à cet effet «qu’aucune liberté ne peut s’exercer en dehors des lois et règlements en vigueur en République gabonaise.»
Abordant les perspectives, Jean Ovono dont l’institution «attend avec impatience les textes d’application du Code de la communication» devant être adapté aux réalités actuelles, entend soumettre au gouvernement des propositions législatives et réglementaires visant une meilleure expression de la démocratie gabonaise, notamment dans les médias audiovisuels publics dont les programmes politiques sont trustés par le parti politique au pouvoir. Il s’est félicité de la mise en place, par les professionnels de la communication, de l’Observatoire gabonais des médias (OGAM) et s’est réjoui de la promesse faite par le président de la République en faveur de l’édification d’une maison de la presse.
Jean Ovono Essono n’a fait état que de l’actif dans le bilan de ses 100 premiers jours. Il n’y a cependant pas de bilan de sans passif. On devrait pourtant inscrire dans cette rubrique, le traitement timide du dossier, certes trouvé en cours d’exécution, portant suspension de TV+ qui avait diffusé en différé la cérémonie d’auto investiture d’André Mba Obame en qualité de président de la République. Le nouveau président du CNC aurait gagné à débuter son mandat par une levée de cette mesure inique du fait que d’autres médias avaient fait de même sans être inquiétés. On mentionnera également, la suspension absurde de l’hebdomadaire « Echos du Nord » pour un article dont la nocivité ne saurait en toute objectivité être établie, et la suspension abusive du journal « La Nation » pour une titraille argotique et somme toute banale. De même, on n’a pas vu le CNC de Jean Ovono Essono monter au créneau lorsque des titres proches du pouvoir affabulent, diffament et injurient des personnalités gabonaises membres de l’opposition.
Cent jours, ce n’est pas suffisant pour tirer une bonne comptabilité. Mais, Jean Ovono Essono peut-il vraiment amener la presse gabonaise à l’ «émergence» démocratique ? On conviendra avec la sentence rasta que le temps tranchera (Time will tell).