La seconde phase de l’opération ‘’Libérer les trottoirs’’ (interdiction de toutes activités commerciales au bord de la chaussée) a effectivement démarre dans la nuit de lundi à mardi à travers plusieurs sites de la capitale gabonaise, à l’initiative de la mairie de Libreville, sur fond de doutes quant à la capacité réelle de la municipalité à « venir à bout d’un tel fléau », alors que pointe la Coupe d’Afrique des Nations (CAN) de football 2012.
Mardi, 1 heure 32, des tables et tabourets des commerçants brûlent dans plusieurs points stratégiques de la ville où des vendeurs avaient pris leurs quartiers depuis des lustres en dépit de l’oukase de l’autorité municipale qui a constamment demandé de ne pas confondre trottoir et marché.
OPERATION SANS EXCLUSIVE
Ainsi, l’opération ‘’Libérer les trottoirs’’, deuxième édition après celle de 2009 commence, sans exclusive.
Des équipes municipales, très mobiles, passent au crible les coins et recoins anarchiquement occupés et où, pêle-mêle, les ménagères pouvaient se ravitailler en bannes, manioc, prune, tomates, poissons, légumes, viande, volaille et même gibiers, posés à même le sol, dans des conditions hygiéniques déplorables.
Certains s’étaient littéralement rapprocher des chantiers (échangeurs) sans redouter les risques d’accident ou les conséquences d’une exposition prolongée des marchandises à la poussière du ciment ou de latérite,
La nuit avance. Des feux tricolores de Nzeng Ayong ( 6ème arrondissement) à ceux des Charbonnages, du carrefour IAI, en passant par l’ex-gare routière et le rond-point d’Awendje, le personnel municipal, mobilisé et soutenu par des sapeurs-pompiers, s’active, sans dérapages, selon les consignes.
STRESS DES CITADINS
Aux aurores, la circulation devient fluide là où naguère, les embouteillages avaient stressé des citadins.
Dans la ligne de mire de l’Hôtel de ville figure également les épaves de véhicules dont une bonne partie, encombrait non seulement la chaussée, mais l’avait aussi transformé en fourrière.
« Il était temps. Cette nouvelle opération‘’ Libérer les trottoirs’’ est salutaire. Les chefs de famille redoutaient la rentrée scolaire prochaine avec les sempiternels embouteillages en partie causés par les trottoirs pris d’assaut par des commerçants, sans foi ni loi, dans la quasi-totalité des quartiers de Libreville », soupir Jean-Léon, employé de banque.
MEMES CAUSES, MEMES EFFETS
Philippe, automobiliste, lui aussi, stigmatise le comportement des commerçants qui obstruaient la chaussée audacieusement, devant la force publique et s’inquiète que les « mêmes causes ne produisent les mêmes effets ».
A la veille de la descente sur le terrain de 400 employés municipaux avec comme ordre de mission d’éviter l’ « occupation anarchique du domaine public », le Maire de Libreville, Jean-François Ntoutoume Emane s’est employé à rappeler que l’opération ‘’Libérer les trottoirs’’ visait à « donner à notre capitale un visage plus avenant pendant la Coupe d’Afrique des Nations », conjointement organisée par le Gabon et la Guinée-Equatoriale, en janvier-février prochains.
Message relayé avec force et détails par le quatrième maire adjoint, Léandre Nzué, à travers les points de ventes illégaux.
Mieux. Pendant sa tournée, il a incité les vendeurs encore réfractaires à saisir les opportunités offertes par la Mairie.
« Nous avons construit des marchés à Ambowé et à Louis (1er Arrondissement), à Nzeng-Ayong (6éme Arr.) et invité les commerçants à occuper les places gratuitement avec en prime une chambre froide, sans frais ».
Une adresse en fait renouvelée en direction des commerçantes qui, très souvent, rétorquaient que lesdits marchés étaient géographiquement mal placés, voire excentrés.
Un discours battus en brèche par quelques femmes ayant finalement accepté de se déplacer, de libérer les trottoirs.
« C’est dommage que l’on puisse penser que ce marché soit excentré. De tout temps, c’est la clientèle qui va au marché et non le marché qui vient à lui », réagit Martine, vendeuse de légumes en présentant sa marchandise presqu’asséchée, faute de clients.
RISQUE D’ACCIDENT
Sa voisine, Hortense, préfère « sauver » sa peau car, dit-elle, « je ne veux pas m’exposer dans la rue pour cause d’accident. Libreville est en chantier. Comment comprendre que des commerçants puissent vendre à proximité d’un échangeur en construction où les ouvriers sont protégés par des casques alors que des femmes prennent, chaque jour, le risque de se retrouver devant ce chantier, sans tenir compte de leur propre sécurité ».
Impératif de sécurité, besoin de propriété de la ville et souci de rentabilité se bousculent dans l’argumentaire des uns et des autres au point que la presse s’interroge sur les suites de cette opération de « lutte contre l’insalubrité et l’occupation du domaine public ».
ETERNEL RECOMMENCEMENT
S’agit-il de « l’Arlésienne de l’hôtel de ville ? », écrit, mardi, le quotidien l’Union et qui ajoute que c’est « l’éternel recommencement ».
Et, l’Union de se poser une série de questions: « Les agents municipaux chargés de l’opération ‘’Libérer les trottoirs’’ seront-ils, cette fois -ci, moins sensibles aux signaux de la corruption ? Les propriétaires de garages se soumettront- ils aux directives de l’Hôtel de ville ? Rien n’est moins sur ».
En écho, les autorités municipales sont effectivement passées de la parole aux actes.
Ce mercredi, des agents municipaux reconnaissables à leurs chasubles vert-fluo sillonnent, à bord de 4X4, différents quartiers, traquent hommes et femmes qui persistent dans l’incivisme en exposant toujours leurs produits en dehors des places autorisées.
Une course-poursuite s’engage. Elle finit par la saisie d’un peu de tout (aliments, brouette, vêtements, chaussures…).
Selon un agent de police affecté à l’Hôtel de ville, cette saisine prendra, sous forme de don, la direction des bonnes œuvres.
« Avis donc à tout ceux qui bravent la loi, lance-t-il.
PLUS RIEN NE SERA COMME AVANT
De son côté, Léandre Nzué, Maire-adjoint, prolonge. Plus rien ne sera comme avant à Libreville où se concentre plus de la moitié de la population ( 1 million 200 cents mille habitants).
Le weekend écoulé, sur la première chaine de la télévision gabonaise (RTG1), il déclinait déjà les mesures prises par le Conseil municipal pour redonner du lustre à la capitale, dont la libération des trottoirs.
Dans la foulée, il conduisait les reporters de la RTG1 sur des projets en cours de réalisation: le marché de l’ex-gare routière et le futur marché de la Peyrie qui sera l’un des « plus grands d’Afrique centrale au terme de sa construction confiée a un consortium suisse ».