L’opposant historique gabonais, Pierre Mamboundou, candidats trois fois malheureux à la présidentielle, a été un exemple de patriote, mieux un nationaliste avéré jusqu’au bout de son dernier souffle, où il a tiré sa révérence à l’âge de 65ans, c’est un model pour la jeune génération d’hommes politiques.
Né d’un père commerçant, le 6 novembre1946 à Mouila à dans le sud du Gabon, Pierre Mamboundou, est l’ainé d’une fratrie de sept enfants.
L’opposant historique, leader de l’Union du peuple gabonais (UPG, opposition), qu’il a créé le 14 juillet 1989 à Paris est décédé le 15 octobre 2011 à 23h des suites d’une crise cardiaque. Il était le Marié et père de cinq enfants.
Parcours académique
Après de brillantes études primaire et secondaires à l’école communale A de Mouila, au Collège catholique Val Marie de sa ville natale, Pierre Mamboundou, a également fréquenté au Collège Bessieux et au Lycée National Léon Mba de Libreville où il obtient son baccalauréat scientifique avant d’intégrer l’Université de Perpignan en France où il obtient son diplôme d’ingénieur des travaux en télécommunication.
Pierre Mamboundou a débuté sa vie active au Centre Régional d’Études Universitaires de la Formation Permanente à Perpignan – CREUFOP en tant qu’enseignant de physique. En 1988, il est admis à la Société Française de Pysique (SFP), une association qui réunit d’éminents hommes de sciences de France depuis 1873.
Carrière professionnelle
Pierre Mamboundou quitte l’hexagone pour Libreville où il dirige brièvement l’Agence Commerciale de Télécommunications et travaille à la mise en place du Centre national de télécommunication (CENACOM).
En 1979, il retourne en France en tant que Chef des projets à la Direction scientifique et technique de l’Agence de coopération culturelle et technique (ACCT), annonciateur de l’Organisation internationale de la francophonie (OIF).
Quelques années plus tard, il gravit les échelons et mène plusieurs missions auprès de différents chefs d’États et de gouvernements pour le compte de l’organisation en tant que chargé de mission auprès du secrétaire général de l’organisation en vue de valoriser la langue française mais aussi les langues africaines.
Il travaillera à l’ACCT jusqu’en 1989 avant d’être expulsé de France sur demande du gouvernement gabonais à la suite de la création d’un parti politique au temps du parti unique, en violation de la Loi fondamentale en vigueur en ce moment là.
Parcours politique
Expulsé de France en février 1990, Pierre Mamboundou atterrit à Dakar au Sénégal où il sera exilé pendant près de 4ans, loin de sa famille restée en France.
C’est à partir du Sénégal qu’il construit sa véritable carrière politique avec à ses côtés certains étudiants gabonais comme, Richard Moulomba qui deviendra par la suite son secrétaire général avant leur divorce prononcé en 2011.
Etant au Sénégal, un procès tenu à Libreville en 1990, le condamne à 10 ans de prison par contumace.
Le 1er novembre 1993, malgré la peine qui pèse sur lui, il décide de défier la loi en rentrant au pays pour la confronter en justice. Sur place au pays, il fait opposition à sa condamnation par contumace.
Le ministère public ne réagissant pas dans les 8 jours ayant suivi sa démarche conformément au code de procédure pénale, sa condamnation est réputée n’avoir jamais existé.
Passé ce cap, il pose ensuite sa candidature à la première élection présidentielle de l’ère démocratique devant se dérouler le 5 décembre 1993. Son dossier de candidature est rejeté mais l’homme ne baisse pas les bras.
Bien intégré dans la sphère politique, il organise son premier meeting populaire le 17 novembre 1993, à Kinguélé un bidonville du 3ème arrondissement de la commune de Libreville, réputé rebelle où il se fera rapidement porté dans les cœurs des habitants de ce quartier.
Entre temps, Omar Bongo remporte le scrutin de 1993 sans Pierre Mamboundou.
Après l’élection de violentes manifestations s’ensuivent et embrase le pays en 1994 pour contester la victoire du parti au pouvoir.
Dans la période d’accalmie qui suit, les dirigeants au pouvoir et toute la classe politique (majorité-opposition), décident d’aller laver le linge sale à Paris lors des « accords de Paris ».
Pierre Mamboundou qui avait décliné l’invite décide alors de se faire représenter par son secrétaire exécutif, Sébastien Mamboundou Mouyama.
Jugeant que l’opposition n’a pas eu suffisamment de garanties sur l’organisation d’élections libres crédibles et transparentes, Pierre Mamboundou refuse de signer ces accords.
Puis, arrive les élections législatives de 1996, une chance qui s’offre pour devenir député à l’assemblée Nationale en vue de mieux se faire entendre.
Candidat à Ndendé ville dont il est originaire, il se présente devant six autres candidats et remporte le scrutin au second tour. En 1997, il est également élu premier Maire de la commune de Ndendé qui deviendra par la suite son bastion politique
Son mandat à la tête de la mairie sera marqué de bons résultats puisqu’il réussira même à renflouer les caisses de la mairie grâce à son ingéniosité. C’est avec lui que le commune de Ndendé connaitra véritablement son essor.
Il sera réélu le 29 décembre à la tête de la commune de Ndendé et y restera jusqu’en 2007, où il cède son fauteuil à Fidèle Mouloungui le 11 avril 2007 en vue de se plier à la loi sur le non cumul de mandats électifs et se consacrer aux activités de l’Assemblée Nationale.
Porté par une coalition des partis politiques de l’opposition, en 1998, Pierre Mamboundou est le candidat du Haut Conseil de la Résistance (HCR), de l’élection du 6 décembre de la même année. Il sera surtout le porte-étendard de l’opposition, amenée par des poids lourds comme de Pierre Louis Agondjo Okawé du Parti gabonais du progrès (PGP), Jules Aristide Bourdes Ogouliguendé du Congrès pour la démocratie et la justice (CDJ), de Léon Mbou Yembit du Forum africain pour la reconstruction (FAR) de Jean Pierre Lemboumba Lepandou du Parti gabonais du centre indépendant (PGCI), y compris même l’ancien Premier-Ministre d’Omar Bongo à savoir Léon Mébiame.
Fort de ce soutien, il perd malgré tout l’élection présidentielle devant Omar Bongo qui l’emporte avec 66 % des suffrages exprimés contre seulement 16,5 % pour Pierre Mamboundou. Malgré sa protestation, les résultats seront confirmés par la Cour Constitutionnelle.
Au sortir de cette élection, lors de la trêve sociale de trois ans demandée par le président Omar Bongo aux partenaires sociaux qui précédait la modification de la Constitution en vue de l’élection présidentielle à un seul tour. Pierre Mamboundou rejettera à plusieurs reprises les invites du Chef de l’Etat, Omar Bongo et se signalera par son intelligence tirée de sa carrière internationale à l’Assemblée Nationale.
En 2001, il décide de boycotter les élections législatives avec ses compères des partis membres du Haut Conseil de la Résistance (HCR), arguant que les conditions nécessaires à la transparence du scrutin n’étaient pas réunies.
En 2005, arrive l’élection présidentielle et Pierre Mamboundou est candidat, au scrutin à un seul tour que rafle le Président Omar Bongo, alors au pouvoir depuis 38ans. Mamboundou se contera encore de la seconde place avec 13,57%.
Ensuite s’enchaine des contestations des résultats de l’élection présidentielle du 27 novembre 2005. Le siège de l’UPG est mis à sac le 21 mars 2006. Pierre Mamboundou dont la vie est menacée est exfiltré par ses militants et s’exile à l’ambassade de l’Afrique du Sud au Gabon avant d’en sortir un mois après pour y rencontrer son adversaire de toujours Omar Bongo Ondimba afin de fumer le calumet de la paix : c’était le 19 avril 2006, en présence de diplomates. Une rencontre largement médiatisée et qualifiée d’historique par la presse du fait que cela intervenait 17ans après.
En décembre 2006, il réintègre l’Assemblée Nationale à l’issu des élections législatives. Son parti l’Union du Peuple Gabonais (UPG), formera son groupe dont il était le président jusque dans la nuit du 15 au 15 octobre dernier.
Pierre Mamboundou, fut inéluctablement l’initiateur de la biométrie qui sera appliquée dès 2013, aux prochaines élections locales. Il a été de tous les combats pour faire accepter la biométrie en vue de garantir davantage les élections en République Gabonaise. La biométrie a été adoptée par l’Assemblée nationale et le Sénat.
Il est aussi l’auteur de la loi organique portant organisation de la Haute Cour de Justice en République gabonaise adoptée par l’Assemblée nationale gabonaise en 2009.
C’est aussi en 2009 que Pierre Mamboundou échoue pour la troisième fois à l’élection présidentielle. Il en sortira encore second derrière l’actuel Chef de l’Etat, Ali Bongo Ondimba, successeur de feu, Omar Bongo Ondimba, décédé le 8 juin 2009 à Barcelone (Espagne).
La transition se déroule relativement dans le calme et après moult contestations, il accepte sa défaite et s’éclipse un moment pour Paris pour des problèmes de santé.
Six mois après une rencontre avec le Président de la République qu’il considérait à juste titre comme son fils, aussi, il regagne le pays pour poursuivre le combat disait-t-il à la maison et non de l’extérieur.
Pierre Mamboundou, a mené une politique responsable auprès de l’actuel Chef d’Etat qui ne manquait pas de le consulter dans des questions d’intérêts communs. Nationaliste jusqu’au bout, il a accepté volontiers d’aller défendre au côté du Chef de l’Etat, le projet de l’île Mbanié au siège de l’Organisation des Nations-Unies dans la délégation présidentielle.
Ce dernier en bon démocrate avait prit l’habitude d’aller consulter le Chef de l’Etat sur un certain nombre des questions et des préoccupations visant la bonne marche du processus démocratique et du mieux être des gabonais.
D’ailleurs le pouvoir en place, l’avait pressentit au poste de Vice-président de la République. Les deux parties n’avaient pas encore bouclé les négociations car, se voulant légaliste, il avait conditionné son accord à plusieurs conditions notamment la révision de la Constitution et le partage des portes-feuilles au sein du gouvernement.
Tout comme son « ami, grand-frère, père et oncle », feu, Omar Bongo Ondimba, Pierre Mamboundou, a mené un combat responsable et a participé à l’édification d’un Gabon nouveau, en marche vers l’émergence prôné par, le Président de la République, Ali Bongo Ondimba.
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Ecrit le 16 octobre
Publié le 17 octobre