Au lendemain du scrutin législatif gabonais, qui a vu le Parti démocratique gabonais (PDG au pouvoir) s’assurer la majorité absolue, les Gabonais attendaient dimanche la publication officielle des chiffres, et notamment les taux d’abstention.
De source du PDG proche du ministère de l’intérieur, le parti du président Ali Bongo a remporté sans surprise au moins 73 des 120 sièges aux législatives de samedi, et de façon écrasante dans certaines régions telles que la Ngounié (sud-est) avec 14 des 17 sièges,
Y compris dans des régions non acquises au pouvoir, le PDG obtient des scores important, avec au moins 10 sur 17 députés dans le Woleu-Ntem, la partie nord du pays d’éthnie fang qui avait majoritairement voté pour l’opposant André Mba Obame à la présidentielle 2009 et au moins 7 sur 13 dans l’Ogooué-Maritime de la capitale pétrolière Port-Gentil où des troubles post-électoraux en 2009 avaient fait au moins 3 morts.
Les résultats officiels complets devraient être publiés « probablement jeudi », selon une source proche de la commission électorale nationale autonome et permanente (Cénap).
Avant cette victoire du PDG, l’opposition, dont une partie avait appelé au boycott, avait critiqué le scrutin prédisant une faible participation.
Dans un communiqué, la plate-forme de la société civile +Ca suffit comme ça+, qui avait appelé en novembre avec 13 partis d’opposition au boycott et à l’entravement du scrutin, a annonçé samedi soir que cet appel avait été « massivement suivi » qualifiant l’abstention constatée de « cuisante défaite pour le pouvoir »
Ainsi, aux bureaux de vote n°1 et 2 de Libreville, seuls 61 votants ont exprimé leur suffrage sur 704 inscrits, selon Germaine Mianga, contrôleuse de la commission électorale nationale autonome et permanente (Cénap).
« Au bureau Sable, dans le deuxième arrondissement de Franceville (sud ouest), sur 500 inscrits, seuls 115 votants. Nous demandons que ces élections soient annulées. Parce que le taux d’abstention est très faible », a déclaré dimanche Simba Joseph, candidat malheureux de l’ANG (Alliance pour le nouveau Gabon, opposition), accusant le PDG d’avoir « procédé au bourrage des urnes (…) pour augmenter ce chiffre ».
Dans la préfecture de Médouneu (nord) le taux de participation varie entre 10 et 40% selon les bureaux de cette circonscription, de source proche de la Cénap. Même constat à Port-Gentil (ouest) la capitale économique où le centre de vote de l’école Ngadi n’a vu passer que 78 votants pour 498 inscrits.
« On ne cautionne pas la mascarade électorale. Les gens du PDG vont bourrer les urnes. La participation sera très faible. Ils vont gagner mais quel intérêt? Quelle honte! », a déclaré vendredi André Mba Obame, appelant les électeurs à « rester à la maison » le jour du vote.
Selon Guy-Bertrand Mapangou, directeur de cabinet du président du PDG joint dimanche par téléphone, l’opposition fait de l’abstention une récupération « de bonne guerre ».
« L’opposition pense que quand il y a abstention, c’est parce qu’ils ont appelé à ne pas voter, mais l’abstention est une chose habituelle dans toutes élections ! » a-t-il ajouté, précisant que le PDG avait même « fait tomber des bastions de l’opposition. Ndendé (ville de l’opposant historique Pierre Mamboundou décédé en octobre) a été enlevée! ».
Selon M. Mapangou, « le taux d’abstention n’est pas seulement du fait de gens qui ont boycotté, c’est aussi du fait de problèmes sur les listes. On a eu des cas de gens inscrits mais dont les noms n’étaient pas sur les listes, des gens qui n’ont pas trouvé leurs noms ou pas trouvé leurs cartes ».
Au delà du boycott ou des aléas organisationnels, l’abstention est aussi le fait d’un désintérêt des populations pour le scrutin dans ce pays producteur de pétrole mais dont une grande partie vit dans la pauvreté.