La croisade anti-corruption devrait, dans les tous prochains jours, négocier un nouveau virage avec des perquisitions dans les administrations et domiciles des dépositaires de l’autorité de l’Etat ainsi que de tout agent public à l’initiative de la Commission Nationale de Lutte Contre l’Enrichissement Illicite (CNLCEI), conformément aux dispositions légales et réglementaires en matière de déclaration de biens et la nécessité de s’y conformer.
« Je l’ai dit et je le confirme, nous ne savons pas encore quand ça va se faire, mais nous allons le faire en 2012 (…) Ce n’est pas moi qui décide, c’est la plénière qui élabore un calendrier et définit les entités par lesquelles ou les personnes par lesquelles on voudrait bien commencer », a soutenu le président de la CNLCEI, Vincent Lebondo Le-Mali, Magistrat, samedi dernier, à la faveur d’un entretien accordé à GABONEWS.
La descente sur le terrain annoncée découle d’un constat amer : peu ou presque pas d’administration (centrale , décentralisée, extérieure) ne montre à ce jour patte blanche dans la gouvernance des deniers publics et l’achat effréné des coffres forts – qui ont quasiment disparu des commerces- au profit de la thésaurisation sans omettre la disparition du patrimoine roulant de l’Etat.
Des comportements déviants qui impactent sur le développement. Plus de 250 milliards de francs se volatilisent chaque année au titre des détournements, dessous de table, flux illicites des capitaux…
ASSAINISSEMENT
« Nous ne sommes pas à la Commission Nationale de Lutte Contre l’Enrichissement Illicite pour tendre les guets -apens et autres ; nous y sommes pour assainir le pays et c’est pourquoi ceux de nos compatriotes qui peuvent entendre ce message, qu’ils le prennent au sérieux ! Si les deniers qu’ils ont à la maison sont légitimement perçus, qu’ils les déposent dans les banques au lieu de les thésaurisés. Par contre, la loi est toujours faite pour ceux qui sont résistants (…) Souvent, ils trouvent plusieurs moyens pour contourner la loi. Et même en ce moment ils sont en train de réfléchir pour essayer de la contourner encore », s’est prononcé, M. Lebondo.
Déjà, dans un communiqué daté du 1er mars 2012, le premier responsable de la CNLCEI soulignait : « à l’issue de la proclamation des élections législatives du 17 décembre 2011 par la Cour Constitutionnelle, notre pays vient de se doter d’une nouvelle Assemblée Nationale et d’un nouveau Gouvernement confortant ainsi son ancrage dans la démocratie et la Bonne Gouvernance » et qu’ « à égard, la Commission Nationale de Lutte Contre l’Enrichissement Illicite tient à rappeler aux Membres du Gouvernement (entrants et sortants) ainsi qu’aux Députés (entrants et sortants) » que conformément à « la loi n°002/2003 du 07 mai 2003 instituant un régime de prévention et de répression de l’enrichissement illicite en République Gabonaise, modifiée (…) , dispose : « Tout dépositaire de l’autorité de l’Etat est astreint à l’obligation d’établir une déclaration de ses biens avant son entrée en fonction, tous les trois ans pendant la durée de celle-ci et au moment de la cessation de la dite fonction ».
Selon les dispositions en vigueur, a-t-il explicité, « la déclaration de biens comporte distinctement le détail des biens meubles et immeubles du dépositaire de l’autorité de l’Etat, de son conjoint et de ses descendants mineurs (…) » et « une énumération du ou des salaires annuels, des loyers, des pensions, des immeubles bâtis ou non bâtis, des véhicules terrestres à moteur et autres véhicules ».
MODUS OPERANDI
Concrètement, l’autorité politique, l’autorité administrative et l’ agent public ainsi que tout préposé statutaire ou occasionnel de l’Etat, des collectivités locales, des établissements publics ou parapublics sont assujettis à la déclaration de biens – qui est faite sur un imprimé – dans les trois (3) mois à compter de la nomination ou de l’élection à un mandat, tous les trois (3) ans pendant la durée des fonctions et à la cessation de fonctions.
Les conséquences de la non-déclaration des biens sont lourdes et concernent notamment : la démission d’office d’emploi ou de charge, la condamnation à l’amende d’un montant allant de 50.000 à 100.000 F CFA par mois de retard prononcé par la Commission après mise en demeure du contrevenant, l’emprisonnement de un (1) à cinq (5) ans, la confiscation de biens.
Consciente que la répression est l’échec de la prévention, la Commission, déclarait son président, a examiné depuis sa création en 2003 plus de 80 dossiers dont une douzaine bouclée (dans l’attente de la Cour Criminelle Spéciale) et opéré la saisie de plusieurs véhicules avec le concours des Forces de Police Nationale au terme d’une Convention a été signée en décembre 2011.
Toutefois, de hautes personnalités des gouvernements précédents se sont finalement résolues, ces derniers, à déposer… payer des amendes tant l’étau se resserrait.
M. Vincent Lebondo Le-Mali, qui, au passage, indiquait que « l’ignorance de la loi n’est pas une excuse » a conclu : « la déclaration de biens doit, plus que jamais, s’imposer comme un outil incontournable pour la Bonne Gouvernance » afin d’ « accroitre la transparence et de prévenir l’enrichissement illicite par le suivi de l’évolution des biens de tout dépositaire de l’autorité de l’Etat. Le Gabon Emergent que le Président de la République, Chef de l’Etat, S.E. Ali BONGO ONDIMBA appelle de tous ses vœux est également à ce prix ».
A la tête de l’organe de dix membres (10) en charge de la lutte contre l’enrichissement illicite qui bénéficie d’une autonomie administrative et financière, M. Lebondo a, du reste, quitté Libreville le week-end écoulé pour Bruxelles (Belgique) où il prendra part cette semaine à une réunion des agences anti-corruption venues des quatre coins de la planète marquée par son intervention sur le travail abattu par la CNLCEI , l’ouverture faite aux médias, à la société civile et aux partenaires internationaux pour bouter la corruption hors des frontières nationales.