Directeur général du Fonds gabonais d’investissements stratégiques, Serge Mickoto pilote la diversification de l’économie nationale. Le FGIS doit rapporter plus de 500 milliards de F CFA à l’État d’ici à cinq ans.
L’homme est didactique et aime la précision. Il tient d’emblée à clarifier la distinction entre le Fonds gabonais d’investissements stratégiques (FGIS), qu’il dirige, et le Fonds souverain de la République gabonaise (FSRG), autrefois dénommé Fonds souverain pour les générations futures. « Le premier, établissement public à caractère industriel et commercial, a la double charge de gérer les participations de l’État et d’être le gestionnaire exclusif des ressources du second », explique-t-il.
Autrement dit, la mission de Serge Mickoto à la tête du FGIS est de rentabiliser via des placements stratégiques les ressources que l’État gabonais verse annuellement au FSRG et qui proviennent notamment des recettes pétrolières (environ 10 %). Autant dire que cet ancien directeur financier de BGFI Bank, premier groupe bancaire d’Afrique centrale, est l’une des personnes clés de la stratégie de diversification de l’économie gabonaise initiée par le président Ali Bongo Ondimba (ABO).
L’expérience équato-guinéenne
Présenté par certains de ses anciens collaborateurs comme un habile négociateur et un bon gestionnaire, Serge Mickoto, 47 ans, s’est illustré au sein de BGFI Bank comme le redresseur de la filiale équato-guinéenne du groupe. En 2006, soit quatre ans après son ouverture, BGFI Guinée équatoriale peine à décoller. Mickoto y est alors affecté. Il y ouvre de nouvelles agences, y déploie la monétique – une première dans le pays – et, surtout, parvient à arracher à la concurrence quelques gros clients comme Bouygues Construction.
En 2010, lorsque cet expert-comptable de formation est rappelé au Gabon, la filiale équato-guinéenne est devenue l’une des plus rentables du groupe bancaire dirigé par Henri-Claude Oyima. À peine Serge Mickoto a-t-il rejoint le siège du groupe, à Libreville, qu’ABO lui confie la direction du FGIS, dont la création est annoncée en 2011.
Il s’agit pour le Gabon de développer de nouvelles filières capables de générer suffisamment de revenus pour se substituer à ceux tirés du pétrole. La production de brut du pays est en effet en baisse depuis quelques années, passant de 370 000 barils par jour au milieu des années 1990 à environ 250 000 actuellement. De plus, l’exploration en mer profonde n’a pour l’heure donné aucun résultat concret.
Un défi pour le Gabon
Sur le papier, le projet du FGIS est bien ficelé. Mais l’idée n’est pas nouvelle. Le Fonds souverain pour les générations futures, qui existait déjà, n’a jamais été vraiment opérationnel… Le Gabon fera-t-il mieux cette fois-ci ? Serge Mickoto se veut rassurant. Il estime même qu’au terme des cinq prochaines années le FGIS devrait générer, à travers ses différents placements, environ 500 milliards de F CFA (762 millions d’euros). Le seuil à partir duquel, selon les règles établies, il pourra reverser 75 % de ces revenus au budget de l’État.
Pour atteindre cet objectif, le FGIS multiplie, souvent discrètement, les investissements. « Nous investissons aussi bien au Gabon qu’à l’étranger, dans des entreprises naissantes ou établies, dans les infrastructures, les mines, la gestion portuaire… Bref, dans les secteurs clés identifiés par la politique d’émergence du président. L’objectif est de diversifier le portefeuille et de lisser l’épargne intergénérationnelle », indique Serge Mickoto. Au total, le FGIS détient des participations dans une cinquantaine d’entreprises. Il est ainsi le principal actionnaire du projet d’hôtellerie de luxe que développe l’État avec le singapourien Aman Resorts, pour un investissement d’au moins 70 millions de dollars (52,5 millions d’euros) sur cinq ans. À travers cette démarche, le Gabon entend se positionner sur le créneau de l’écotourisme et attirer quelque 100 000 visiteurs par an à l’horizon 2020.