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France: Le gouvernement travaille au récépissé pour contrôle d’identité

Contrôle d'identité à Rillieux, en banlieue lyonnaise, le 5 octobre 2011. (Photo Robert Pratta. Reuters)
Le gouvernement prépare un texte qui obligera les forces de l’ordre à délivrer un récépissé à chaque personne dont l’identité est contrôlée, afin d’éviter notamment la multiplication des contrôles au faciès, a confirmé vendredi Jean-Marc Ayrault (photo Reuters).

«C’est important de ne pas contrôler trois fois la même personne (…) c’est une mesure que l’on va faire mais qui n’a rien d’extraordinaire, ça se fait ailleurs», a plaidé le Premier ministre sur BFMTV et RMC.

«Il ne s’agit pas d’arrêter les contrôles d’identité, les policiers font leur travail (…) simplement on donne (aux personnes contrôlées) un reçu», a-t-il ajouté. Cette mesure «est en préparation, le ministre de l’Intérieur y travaille», a poursuivi le chef du gouvernement, rappelant qu’elle était un «engagement» de campagne du président François Hollande.

«Je pense que ça sera utile à tous. Aux personnes contrôlées, qui doivent être contrôlées mais pas trois, quatre fois, et aux policiers aussi parce que les policiers ont besoin de retrouver la confiance et le respect», a également jugé Jean-Marc Ayrault.

«Moi, j’ai confiance dans la mission qu’ils s’exercent au service de la sécurité. Ils ont besoin qu’on les respecte, qu’on leur fasse confiance. Une mesure de ce type n’a rien de vexatoire pour eux, c’est simplement pour remettre de la sérénité. Je crois qu’on a besoin dans notre pays de plus de sérénité pour être plus fort pour affronter les problèmes», a-t-il conclu.

«Débat public»

Le ministre de l’Intérieur, Manuel Valls (photo Reuters), a de son côté rencontré vendredi matin le Défenseur des droits, Dominique Baudis, pour évoquer une réforme de la procédure des contrôles d’identité, jugés «nécessaires» mais à réévaluer pour «ne plus être perçus comme abusifs».

Les contrôles d’identité sont «un outil totalement nécessaire», mais il convient de mener un «débat public» lui aussi «nécessaire», afin de les «réévaluer pour qu’ils ne soient plus perçus comme quelque chose d’abusif», a expliqué le ministère de l’Intérieur vendredi à l’AFP.

La «piste» du récépissé est bien l’un des axes principaux de la réflexion de Manuel Valls, qui a demandé une «remontée d’informations sur les différentes initiatives prises en ce sens au Canada, en Espagne et en Grande-Bretagne», a relevé le ministère de l’Intérieur.

Il s’agira ensuite de «voir ce que ça amène» ainsi que «les modalités en terme d’organisation», a-t-on souligné de même source.

«Les syndicats de police comme les associations seront associés» à la réflexion, avant que le ministre de l’Intérieur ne présente ses propositions, a-t-on ajouté place Beauvau.

Hostilité des syndicats

Les syndicats de police interrogés vendredi par l’AFP ont exprimé leur opposition au fait de remettre un reçu aux personnes faisant l’objet de contrôles, un message «de défiance» envoyé aux policiers selon eux, «inadmissible», «stigmatisant» et décidé sans concertation.

Le Premier ministre Jean-Marc Ayrault a annoncé vendredi matin que cette mesure était en «préparation» au ministère de l’Intérieur, rappelant qu’elle était un «engagement» de campagne du président socialiste François Hollande.

«On stigmatise la police comme étant une police raciste. C’est inacceptable», explique Jean-Claude Delage, le secrétaire général d’Alliance, deuxième syndicat des gardiens de la paix.

«Il est inacceptable de partir de cette présomption. L’annonce faite par le Premier ministre jette le discrédit sur l’honnêteté morale des policiers en laissant penser qu’ils font des contrôles en dehors de la loi», s’insurge-t-il.

«Cela part d’une présomption de discrimination des policiers, qui seraient coupables de pratiquer des contrôles au faciès. Or aujourd’hui il y a la même diversité dans la police que dans la population qu’elle contrôle», renchérit Patrice Ribeiro, secrétaire général de Synergie-Officiers, deuxième syndicat d’officiers.

«C’est un message de défiance envoyée aux policiers», regrette-t-il.

Le secrétaire général d’Unité Police (premier syndicat des gardiens de la paix) Nicolas Comte estime lui que cette mesure n’est pas «une priorité». «On ne solutionnera pas la fracture police-population en donnant l’impression aux policiers que la faute vient d’eux», juge-t-il.

Les syndicats de police sont d’autant plus surpris de cette annonce que le sujet avait été évoqué lors de leur rencontre vendredi dernier avec Manuel Valls.

Ce dernier leur avait indiqué qu’au sujet des contrôles d’identité, il faudrait s’inspirer «de ce qui se pratique en Grande-Bretagne» mais qu’il n’était «pas dans la précipitation», selon Patrice Ribeiro.

Depuis le milieu des années 2000, un Britannique contrôlé par la police est en droit de demander un reçu sur lequel figure le numéro de matricule du policier.

«Mais là, le Premier ministre annonce cela sans la moindre concertation avec les syndicats, c’est inadmissible», a regretté Jean-Claude Delage.

Pour Patrice Ribeiro, cette mesure aura également un effet pervers sur le terrain. «Cela va nous enlever des outils comme la palpation où on peut trouver des armes, de la drogue», assure-t-il, «les voyous contrôlés le matin brandiront un récépissé le reste de la journée et on ne pourra plus les contrôler. Cela va générer une dynamique qui n’est pas saine.»

«Cela va avoir un impact considérable sur la motivation des policiers. Les policiers le prennent très très mal», a prévenu Jean-Claude Delage.

Ciotti dénonce une «défiance» envers la police

Eric Ciotti, secrétaire national de l’UMP chargé de la sécurité (photo AFP), a estimé vendredi que Jean-Marc Ayrault et Manuel Valls «(confirmaient) leur défiance à l’égard de la police».

«En annonçant la préparation d’un texte de loi qui obligera les forces de l’ordre à délivrer un récépissé à chaque personne dont l’identité est contrôlée, M. Ayrault et Valls confirment la défiance que les socialistes portent envers elles», écrit dans un communiqué le député des Alpes-Maritimes.

«Cette mesure, purement démagogique et dogmatique, paralyserait l’action des forces de l’ordre en faisant peser sur elles un principe de suspicion. Le Premier ministre et le ministre de l’Intérieur devraient faire preuve de plus de respect et de considération à l’égard des policiers et gendarmes, qui quotidiennement risquent leurs vies pour assurer la sécurité de tous les Français», conclut-il.

Lors de sa campagne, le candidat François Hollande avait annoncé son intention de «mettre un terme» aux «contrôles au faciès». C’est «une discrimination de la vie quotidienne, une injustice que je n’accepte pas», avait-il dit, «chaque citoyen mérite la même considération, le même respect».

En janvier dernier, l’organisation américaine Human Rights Watch avait sévèrement épinglé la France sur les contrôles d’identité, mettant notamment en évidence un «profilage ethnique». La direction de la police et les syndicats de policiers avaient farouchement démenti l’existence de «contrôles au faciès».

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