Alors que l’euphorie est encore présente dans les familles au sein desquelles les enfants ont décroché leurs examens, notamment le Brevet d’étude du premier cycle (BEPC) dont les résultats sont tombés le samedi dernier, des voix se lèvent déjà pour dénoncer les fraudes qui viennent augmenter les taux de réussite et flouer le niveau scolaire au Gabon.
Sur les 2 309 candidats ayant passé cet examen dans les deux centres du lycée national Léon Mba, 1 007 l’ont décroché. Le premier centre du lycée national Léon Mba a enregistré 1 800 inscrits pour 1 608 présents. Les résultats y donnent 568 admis dont 7 avec mention assez bien. Le pourcentage de réussite s’élève donc à 35,32%. Ce sont donc au final 1 040 candidats qui ont été recalés dans ce centre. Sur les 509 candidats inscrits au second centre, 439 ont été admis soit 86,25% et 70 recalés.
Même si ces résultats ne sont pas vraiment reluisants, on peut dire, selon les échos, que la fraude en est tributaire pour une grosse part. A titre d’exemple, dans un centre d’examen du BEPC à Libreville, un inspecteur a dû demander une double correction pour les épreuves de mathématiques. Son attention a en effet été attirée par des copies qui lui paraissaient identiques. Vérifications faites, des dizaines de copies avaient été rédigées avec le même stylo, comportaient les même erreurs et avaient des notes fluctuants entre 15 et 16 sur 20. Elles ont à l’évidence été rédigées par la même personne.
Selon les témoins de cette affaire invraisemblable, le secrétariat de ce centre a été saisi et s’est arrangé pour que cette histoire passe sous silence. Une histoire de “grosses légumes” qui auraient payé des enseignants pour qu’ils changent les copies de leurs protégés. Et, on ne compte pas les élèves qui ont réussi à tricher sans que les examinateurs ne puissent s’en apercevoir.
Pour le baccalauréat, même si l’on est encore au niveau des corrections, on crie déjà, là aussi, à la fraude. Dans certains centres d’examen, on a attrapé des élèves avec les épreuves corrigées tout comme on a constaté des grappes humaines devant les photocopieurs avant certaines épreuves. Visiblement il y a eu des fuites et certains élèves étaient déjà en possession des sujets et même des corrections avant les examens.
Conséquence, les diplômes gabonais vont continuer à subir le mépris des centres universitaires étrangers comme par le passé. Or, après les états généraux de l’éducation et de l’enseignement supérieur, tout devrait être mis en œuvre pour contrer ces indélicats qui transforment les examens en «période des affaires». On se souvient de la récente sortie de Jean Eyene Bekale, directeur général des examens et concours, qui affirmait il y a quelques jours (voir ici) : «Les sujets sont sécurisés de telle sorte que même ceux qui les proposent ne savent pas l’épreuve qui a été choisie, ce qui n’était pas le cas dans le passé. S’il y a fuite, la direction générale des examens et concours sera la seule responsable». Il semble que des grains de sables se soient glissés dans la machine.
On pourrait légitimement se demander le rôle joué par certains fonctionnaires de l’Éducation nationale dans ces fraudes qui semblent massives. D’aucuns sont en effet les propriétaires des Prépa Bac ou des Prépa BEPC, des établissements qui poussent comme des champignons dans la ville et dont les revenus dépendent directement de la réussite de leurs élèves aux examens. C’est tout le système éducatif national qui en prend un coup.
En attendant que les syndicats entrent dans la danse, ce qui est très probable, pour commencer à dénoncer ces manquements, le ministère et le gouvernement devraient davantage réfléchir aux solutions qui permettront de remettre de l’ordre dans cette maison qui tangue depuis des décennies, maintenant.