Plusieurs centaines de militants étaient rassemblés samedi en milieu d’après-midi à l’aéroport de Libreville pour le retour du principal opposant gabonais, André Mba Obame, prévu en début de soirée dans une atmosphère de tension après une absence de quatorze mois.
Ancien baron du régime passé dans l’opposition à la mort d’Omar Bongo en 2009, M. Mba Obame, dit « AMO », avait contesté la victoire à la présidentielle d’Ali Bongo, le fils de l’ancien président, la même année. Il s’était autoproclamé président de la République en 2011, avant de se réfugier plus d’un mois dans une agence onusienne de Libreville.
Il était attendu en fin de journée (17H40 locale et GMT) au Gabon en provenance de France après plus d’un an d’absence en raison d’une opération du dos.
Un important dispositif policier et militaire est mobilisé depuis plusieurs jours dans la capitale alors que le parti de l’opposant, l’Union nationale (UN), dissous par les autorités et interdit de manifestation, veut mobiliser des milliers de militants pour l’accueillir.
En milieu d’après-midi toutefois, les forces de l’ordre étaient peu présentes aux abords de l’aéroport.
Vendredi, la présidence a qualifié l’arrivée d’AMO de « non-événement » et assuré que cette présence des forces de l’ordre à Libreville n’avait rien à voir avec son retour, tout en lançant un avertissement aux manifestants.
« Vous ne pouvez pas à la fois reprocher aux pouvoirs publics de ne pas préserver la sécurité des Gabonais et vous plaindre qu’au carrefour il y a la police. La police est au carrefour depuis des mois et des mois. Nous n’attendons pas M. Mba Obame pour cela », a déclaré le porte-parole de la présidence Alain-Claude Bilie-By-Nze.
« Un parti dissous, donc non autorisé, ne sera pas autorisé à engager des manifestations. C’est le respect de la loi. Ceux qui vont s’y engager s’exposent naturellement à ce qu’il y ait réprimande et qu’il y ait mise en oeuvre du dispositif prévu à cet effet », a prévenu M. Bilie-By-Nze.
Tracts, affiches et mini-bus
L’UN, dissoute par les autorités en 2011 après l’auto-proclamation de Mba Obame, a mobilisé ses militants pour faire du retour un événement marquant à quelques jours de la fête de l’indépendance le 17 août.
Des tracts « AMO, le grand retour » ont été distribués dans la capitale, des centaines d’affiches ont été apposées sur les murs. Des dizaines de mini-bus transportant des sympathisants sont arrivés depuis le Woleu-Ntem (nord), le pays « fang » d’où est originaire M. Mba Obame.
Des poursuites avaient été engagées contre « AMO » pour « trouble à l’ordre public » après son auto-proclamation.
Il avait vu son immunité parlementaire levée et risque « de deux mois à un an de prison » s’il est reconnu coupable, selon son avocat. Le ministère de la Justice avait estimé à l’époque qu’AMO avait « porté atteinte à l’ordre et la sécurité publique, à l’autorité de l’Etat et au crédit de la Nation ».
L’incertitude entourait l’accueil réservé par les autorités à M. Mba Obame lui-même.
M. Bilie-By-Nze a précisé vendredi: « La justice gabonaise estimera si elle met en oeuvre les procédures suspendues. M. Mba Obame lui-même a annoncé qu’il était en état de reprendre ses activités. Il est donc en état de répondre à la convocation de la justice ».
M. Mba Obame ainsi qu’une partie de l’opposition et de la société civile dans sa mouvance réclament la tenue d’une conférence nationale.
« Il doit être mis fin (…) au processus de monarchisation », demandent-ils, appelant à « la dissolution de l’Assemblée nationale, (…) l’adoption par référendum de la nouvelle Constitution » avec des « élections générales (présidentielle, législatives, locales et sénatoriales) » en octobre-décembre 2013.
La présidence gabonaise a rejeté cette proposition: « Le Gabon n’est pas un pays en crise, le Gabon ne connaît aucune crise sociale, aucune crise politique, aucune crise institutionnelle. Une conférence nationale ne se justifie pas ».
M. Mba Obame entend jouer à fond son rôle d’opposant.
« Après mon départ du Gabon, d’où je suis parti en chaise roulante, je rentrerai très prochainement sur mes deux jambes. Que ceux qui m’ont annoncé comme mort se préparent à lutter contre mon fantôme! », avait-il annoncé le mois dernier.