À Rio, l’UFC campe sur la conférence nationale souveraine
L’opposition gabonaise réunie au sein de l’Union des forces du changement (UFC) a tenu son premier meeting, ce samedi 22 septembre 2012, au carrefour Rio, un quartier populaire du 3e arrondissement de Libreville. L’exigence d’une conférence nationale a été réitérée, Zacharie Myboto allant jusqu’à donner un délai fixé au mois d’octobre.
Estimés à un millier par le ministère de l’Intérieur et à un peu plus de 3 000 par les organisateurs, de nombreux militants et sympathisants se sont rendus, le 22 septembre au carrefour Rio à Libreville, pour assister au premier meeting donné par l’Union des forces du changement (UFC) depuis sa naissance à Mouila le 9 septembre dernier. Le rassemblement était autorisé par le ministère de l’Intérieur qui avait quand même indiqué que les membres de l’Union nationale, le parti de l’opposition dissous, ne devaient pas y intervenir. Une condition qui n’a pas été respectée par les organisateurs.
S’il n’est pas précédé d’une réputation de tribun, le Pr Pierre André Kombila Koumba, président du Rassemblement national des bûcherons (RNB) s’est révélé sous un autre jour cette fois en étant l’un de ceux qui ont le plus électrisé la foule. Son propos a porté sur la notion de changement et sur l’identité nationale, récemment indexé par le président de la République devant le congrès du Parlement. «Si nous devons parler des identités et de l’identité nationale, ce sera pour parler des attentes de chaque ethnie du Gabon et non pour brimer certaines ethnies au profit d’autres. S’il y a un problème d’ethnie au Gabon, il se situe au niveau du gouvernement. C’est au niveau de la gestion du PDG qu’on le retrouve et pas du tout dans la vie quotidienne des Gabonais. Les Gabonais dans les quartiers n’ont pas de problème d’ethnie. Alors, il faut qu’on nous colle la paix avec ce faux problème ! Notre vrai problème c’est le changement ! Ce qui signifie que le PDG qui n’a jamais été voté accepte et respecte le résultat du vote. (…) Il faut donc qu’on s’organise. (…) Dans les jours et les semaines qui viennent, nous passerons dans vos quartiers pour discuter ensemble de ce qu’il faut faire.»
D’une manière générale, l’UFC a réitéré l’idée d’une conférence nationale souveraine, longuement martelée, tour à tour, par les différents leaders politiques sur le podium. L’alternance politique passe, selon eux, par l’organisation de cette grande messe afin de faire table rase du passé et que les Gabonais se réconcilient avec eux-mêmes, au nom du dicton africain selon lequel «le linge sale se lave en famille», a indiqué Pierre Claver Maganga Moussavou, président du Parti social démocrate (PSD), membre de l’UFC.
Pour Maganga Moussavou, la conférence nationale permettra notamment de solder de nombreuses «exactions» des 42 ans de règne d’Omar Bongo, d’avoir une réponse gabonaise à l’affaire des biens mal acquis, aux comptes d’Omar Bongo dans les banques Suisses, d’amnistier les prébendiers de l’Etat, etc. «Donc les PDGistes doivent être les premiers intéressés par cette conférence nationale souveraine. Parce que c’est eux qui ont le plus pillé ce pays. C’est eux qui gèrent ce pays depuis 47 ans. C’est eux qui font que nous ayons trop de violence. (…) Nous ne voulons plus être à la traine d’Ali Bongo Ondimba et du gouvernement PDG. Nous disons que nous avons intérêt à nous retrouver pour régler toutes ces questions là qui sont des formes de crises importantes. Crise morale, crise institutionnelle, crise politique.»
Le meeting de Rio a donc enregistré la participation des membres de l’Union nationale (UN), le parti de l’opposition interdit, dont le président, Zacharie Myboto, a répondu à de nombreux points contenus dans la déclaration du chef de l’Etat devant le Parlement réuni en congrès, le 12 septembre. Au terme de quoi, il a souligné : «Nous lui disons qu’il faut qu’il organise la conférence nationale souveraine d’ici le mois d’octobre. Passé ce délai, vous peuple gabonais, parce que c’est avec vous que nous devons organiser cette conférence nationale souveraine, n’aurez plus qu’une chose à faire, c’est de demander son départ !»
Jules Aristide Bourdès Ogouliguendé du CDJ a souligné pour sa part que la pomme de discorde avec le parti au pouvoir porte sur la préparation de futures échéances électorales. Et d’interroger : «Pourquoi ne veut-on pas de la conférence nationale souveraine ? On nous dit que ce sera un coup d’Etat constitutionnel. Et alors, lorsque Monsieur Ali Bongo et le PDG nous ressassent tous les jours que c’est le président choisi librement par les Gabonais, pourquoi a-t-il peur d’une conférence nationale souveraine ? Puisque, si nous remettons les choses à plat et qu’on repart à de nouvelles élections, puisqu’il est sûr que le peuple l’a élu, mais le peuple va donc encore l’élire. Mais pourquoi refuse-t-il ? C’est qu’il est sûr que le peuple ne va plus l’accepter après les violences qu’il a commis.» Ogouliguendé qui a rejeté en bloc la récente proposition du gouvernement de réunir la classe politique au sein du Conseil national de la démocratie, a demandé à l’auditoire de donner un écho favorable aux actions que l’opposition va poser dans les prochains jours, «pour que nous imposions la conférence nationale souveraine.»
De nombreux autres orateurs se sont succédé à la tribune parmi lesquels Me Paulette Oyane Ondo de la société civile qui a traité de la constitution, de la démocratie et du tribalisme, et Séraphin Davin Akouré de l’ANG qui a fait le rapport des travaux de Mouila. Le meeting s’est déroulé dans le calme et aucun incident n’a été enregistré après son éparpillement. Les forces de l’ordre veillaient sur la manifestation à des distances qui ne pouvaient provoquer aucune friction.