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Décence et fantaisies des uniformes scolaires

Elèves Lycée d’Etat de Libreville
Quarante huit heures après la rentrée scolaire, les artères de Libreville commencent à se colorer des uniformes des différents établissements scolaires, publics et privés. L’égalité des chances que doit offrir l’école ne se reflète pourtant pas sur les tenues des établissements scolaires. Qu’en est-il de exactement ?

L’uniforme scolaire est imposé afin de gommer les disparités ethniques, religieuses et sociales entre les enfants. Il permettrait aux élèves d’origines variées de se mélanger sans complexes, sans signes extérieurs de richesse ou de pauvreté et de mieux se consacrer à l’objectif d’apprentissage et d’épanouissement. Il les éloignerait également du dictat de la mode. Ce qui n’est pas pour autant sans conséquence puisque l’uniforme nécessite tout de même un investissement et ne sert pas forcément l’intérêt des jeunes lorsque le règlement vestimentaire de l’établissement est contourné.

En effet, jusqu’à une époque récente au Gabon, les uniformes s’achetaient exclusivement dans les établissements scolaires ou dans des structures agrées. Depuis près de deux ans, le ministère de l’Éducation nationale interdit la vente de ces uniformes dans les établissements scolaires. Il s’agissait de mettre un terme au commerce irrégulier comportant des abus et autres entourloupettes. Le ministère dénonçait ainsi ce qui était «devenu une affaire commerciale et non plus une affaire d’uniformité». Une mesure salutaire à plus d’un titre puisque les parents devaient régulièrement débourser 15 000 francs CFA au moins pour acquérir l’uniforme d’un seul enfant. La mesure offre désormais la possibilité de faire confectionner la tenue scolaire chez le tailleur du quartier à un prix beaucoup plus abordable.

«L’idée de libéraliser la confection des uniformes scolaires était la bienvenue. Imaginez que si vous aviez cinq enfants dans un lycée, il fallait en acheter au moins deux pour chacun à au moins 15 000 francs. Or, on peut faire confectionner la tenue à moins de 8 000 francs et dans les normes», explique une mère de famille.

Un effet pervers est cependant survenu avec l’interdiction de la vente des uniformes dans les établissements scolaires : les élèves, notamment ceux ayant atteint le collège, ont pris l’habitude d’adapter leurs tenues à la mode du moment. Du coup, on a des pantalons scolaires en sarouel (également appelés tchaya), en stretch, à taille basse mais aussi des jupes terriblement courtes ou sexy.

Une élève d’un lycée privé de la place explique que ses parents lui ont donné de l’argent pour confectionner son uniforme. Elle n’a pas fait dans la dentelle. Et sa jupe atteint à peine le milieu de ses cuisses, exhibant la totalité de ses jambes. «Je me sens bien dedans», a indiqué la lycéenne qui arborait également un chemisier très serré, identifiant son établissement mais mettant surtout en valeur les rondeurs de son buste.

Son cas n’est pas isolé et c’est logique. Qui, à cet âge n’en aurait pas fait autant ? «Les jeunes veulent s’identifier aux stars. Surtout les stars de la musique. Voilà pourquoi on a du mal à les discipliner pour ce qui est des tenues», explique un enseignant. Il rejette également le tort sur les parents qui n’ont aucun regard sur leur progéniture. L’enseignant estime à juste titre qu’en amont, ce sont les parents qui doivent vérifier la décence de l’uniforme et sa conformité avec le modèle remis par l’établissement avant que l’école n’agisse en aval.

Quoi qu’il en soit, les avis sont partagés sur les effets positifs de l’adoption d’un uniforme dans un établissement scolaire. Pour certains, l’uniforme entraine une réduction des niveaux de violence dans les écoles, une meilleure intégration des enfants des populations issues de l’immigration, une suppression des barrières sociales, une meilleure réussite scolaire par l’absence de distraction due aux tenues fantaisistes.

D’autres par contre y voient une façon de développer des instincts grégaires. Selon les tenants de cette thèse, la tenue scolaire restreint l’expression de la personnalité et serait un puissant vecteur du conformisme social, sans pour autant répondre aux besoins d’uniformisation pour lesquels ils sont imposés.

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