L’Union des forces pour l’alternance (UFA), coalition des partis politiques de l’opposition, présidée actuellement par le Secrétaire général du Centre pour la démocratie et la justice (CDJ), Jules Aristide Ogouliguendé, a présenté ses vœux à la nation gabonaise, le 10 janvier 2013 à Libreville. L’essentiel du discours a porté sur l’ambition de ce mouvement qui vise l’alternance au sommet de l’Etat par les voies démocratiques, et sur l’appréciation des actions du pouvoir en place.
Jules Aristide Bourdès Ogoulinguendé, secrétaire général du Centre pour la démocratie et la justice et président de l’UFA © JP Rougou
Ce discours a été l’occasion pour les membres de l’UFA de répondre, mot pour mot, à l’allocution de vœux de nouvel an prononcé le 31 décembre 2012 par le chef de l’État Ali Bongo Ondimba. Du social à la politique en passant par l’environnement, toutes les questions liées à la vie du pays ont été abordées dans cette allocution. Il s’est donc agi pour le président de l’UFA de jeter un regard rétrospectif et prospectif sur la vie du Gabon.
Bilan d’action de l’UFC
La première manche du propos de Jules Aristide Bourdès Ogoulinguendé s’est appesantie sur la formation de l’UFA, née de la scission de l’Union des forces du Changement (UFC). Une scission qui, selon lui, est à mettre à l’actif des «démons de la division qui ont tenté de briser l’espoir de tout un Peuple ». «C’est ainsi que l’UFC a éclaté, peu de temps après, en deux groupes avec d’un côté: l’Union Factice Complice du pouvoir (UFC), et de l’autre, l’Union des Forces pour l’Alternance (UFA) restée fidèle aux résolutions de Mouila, à savoir: le Raffermissement de l’unité de l’Opposition; l’aboutissement de l’Alternance Politique Démocratique; la Réhabilitation de l’Union Nationale injustement et arbitrairement dissoute; l’Organisation d’une Conférence Nationale Souveraine.», a déclaré le président de l’UFA.
On y a également appris que l’UFA vient d’être légalisée par le ministère de l’Intérieur sous un récépissé daté du 31 décembre 2012. Pour cela, les membres de l’UFA estiment que les objectifs fixés «constituent la meilleure voie de sortie de la crise multisectorielle et multiforme que traverse notre pays». Et de rappeler, pour eux, l’importance de la Conférence nationale souveraine dont la tenue «est un impératif parce qu’attendue par la grande majorité des Gabonais », selon M. Ogoulinguendé. «Elle doit nous permettre de reconstruire un Etat véritablement démocratique et d’apporter des solutions à la crise politique, économique, financière, sociale et culturelle», a-t-il précisé.
Les trois années d’Ali Bongo Ondimba au pouvoir vues par l’UFA
Dans une autre séquence de son allocution qui constituait, du reste, le gros de son discours, le président de l’UFA a fait une analyse des promesses et des actions annoncées ou engagées par le gouvernement en place. En onze points, Jules Aristide Ogouliguendé fait le tour des divers discours prononcés par le chef de l’Etat depuis sa prise de fonction en 2009.
Au sujet de l’assainissement des finances, Ogouliguendé note : «Nous assistons au contraire à des transferts massifs d’argent à l’Etranger illustrés notamment l’année dernière par la disparition de 500 milliards de FCFA de nos caisses, aux disparitions de chapitres entiers des budgets, à une frénésie immobilière de grand luxe tant à Libreville qu’à l’extérieur du territoire national , à la multiplication des voyages présidentiels dont chacun coûte plusieurs milliards de FCFA, à la folie dans l’achat des voitures de grand luxe quand on sait que des milliers de gabonais croupissent dans la misère.»
La question d’une meilleure éducation pour les enfants et une meilleure formation pour les jeunes a été largement appréciée. A ce propos, le chef de l’UFA a déclaré : «Nous constatons qu’en trois ans malgré la mise à disposition d’un budget de plus de 81 milliards de Francs CFA, aucun collège nouveau, aucun lycée nouveau, aucune université nouvelle, aucun internat nouveau n’a été livré; d’où la solution, ridicule, pour le nouveau CES d’Angondjé (1 500 élèves en classe de 6e) de squatter les vestiaires du Stade de l’Amitié, un don de la Chine, qui nous a pourtant coûté plusieurs centaines de milliards de Francs CFA.»
Le logement, nœud difficile à dénouer pour le gouvernement, au regard de la lenteur dans la construction des 5000 logements promis au départ, puis 1000 au terme de l’année 2012, n’a pas été oublié. «Trois ans après, aucune maison n’est sortie de terre; le déficit en logements reste entier. L’une des solutions envisagées au problème du logement est d’importer des maisons préfabriquées qui n’apportent rien à l’économie nationale. Dans le même ordre d’idées, les 1000 logements promis pour fin décembre 2012 par le Premier ministre, Raymond Ndong Sima, lors de sa Déclaration de politique générale, ne sont toujours pas visibles à ce jour. Les propriétaires des logements et bâtiments détruits arbitrairement n’ont que leurs yeux pour pleurer», pouvait-on relever dans ce discours.
La problématique de la vie chère ne pouvait échapper à ce passage au peigne fin du bilan des trois années du chef de l’Etat et du gouvernement. Ainsi, a indiqué M. Ogouliguendé «tout le monde sait que la vie chère au Gabon reste un problème crucial. Nous continuons de dépendre toujours de l’étranger. Rien n’est fait en vue d’encourager la production vivrière locale. Mais pendant ce temps, Ali Bongo Ondimba impose la société Olam dans la culture de l’hévéa et du palmier qui sont des produits de rente. En trois ans d’exercice du pouvoir, la Méthode Ali a donc fait en sorte que notre tissu économique se dégrade dangereusement au fil des jours.»
«La misère endémique est telle que plusieurs ménages gabonais à Libreville se nourrissent aujourd’hui à la décharge publique de Mindoubé. Les mesures annoncées sur la TVA et autres ne produisent aucun effet», a-t-il ajouté concernant ce point.
La crise centrafricaine qui a trouvé un terrain des négociations à Libreville a fait dire au responsable de l’UFA que «les protagonistes se retrouvent à Libreville du fait que le Gabon abrite le siège de cette Institution sous-régionale sous la présidence de Monsieur Denis Sassou Nguesso, Médiateur désigné de la CEEAC». Toute chose qui lui a fait dire que «Pour l’UFA, l’arbre à palabres est mal planté», avant de se demander si la CEEAC et la Communauté Internationale en sont conscientes du fait que le Gabon est en crise.
L’analyse consacrée à la mise en œuvre de la biométrie a fait dire au chef de file de l’UFA que «dans le souci de conserver le pouvoir à tout prix, Ali Bongo Ondimba et son équipe trainent les pieds pour l’introduction effective de la biométrie dans notre système électoral tel que cela a été décidé en 2006 aux Accords d’Arambo, d’abord pour les élections législatives de 2011, ensuite pour les élections locales de 2013 et suivantes, au point que le Ministre de l’Intérieur continue à tourner l’Opposition en dérision. A cet effet l’UFA relève pour le dénoncer avec vigueur les manœuvres frauduleuses déjà engagées par les députés, sénateurs et élus du PDG sur toute l’étendue du territoire visant à recueillir des inscriptions sur des listes électorales à partir de bordereaux d’identification et ceci sous le contrôle des autorités administratives locales.»
In fine, l’opposition coalisée au sein de l’UFA a procédé à un véritable réquisitoire de l’action du gouvernement tout en appelant à un «véritable dialogue». «L’UFA affirme que toutes les intelligences gabonaises sans exclusive doivent être mises à contribution pour que la concertation ait politiquement un sens. Tous les compatriotes, de quelque parti politique que ce soit et/ou issus de la société civile doivent y être conviés».