L’Algérie a autorisé sans limite le survol de son territoire aux avions français. Le premier ministre algérien, Abdelmalek Sellal, estime que la crise malienne aura « un impact direct sur la région ».
Longtemps hostile à l’option militaire, Alger soutient désormais, dans les faits, la contre-offensive engagée vendredi au Mali par les forces armées françaises au nom de la « lutte contre le terrorisme ». Dimanche, l’Algérie « a autorisé sans limite le survol de son territoire aux avions français », une décision rendue publique par… le ministre français des Affaires étrangères, Laurent Fabius. Auparavant, le porte-parole de la diplomatie algérienne, Amar Belani, avait expliqué les raisons d’un blanc-seing probablement négocié lors de la visite de François Hollande à Alger, les 19 et 20 décembre 2012 : « Il faut surtout noter que c’est une décision souveraine du Mali », qui « a demandé l’aide de puissances amies pour renforcer ses capacités nationales de lutte contre le terrorisme ».
Seule puissance régionale à disposer d’une solide expérience en matière de lutte contre le terrorisme, pays frontalier du Mali, l’Algérie anticipe depuis plusieurs mois déjà les conséquences, sur son propre sol, de la grave crise que traverse le Mali. Fin octobre, l’armée algérienne déployait ainsi plusieurs milliers d’hommes pour sécuriser sa frontière sud.
Soutenir le dialogue
Samedi, le premier ministre algérien, Abdelmalek Sellal, s’est rendu à Ghadamès (Est) pour y rencontrer ses homologues tunisien et libyen. « Nous avons soutenu au maximum le dialogue et continuerons à le faire, mais, en cas d’atteinte à la sécurité et d’utilisation d’autres moyens, nous sommes appelés à être fermes », a-t-il prévenu. Un avertissement destiné aux islamistes d’Ansar Eddine, reçus il y a encore peu à Alger dans le cadre des « négociations » prônées par la diplomatie algérienne ? Sur le même ton de fermeté, Abdelmalek Sellal a estimé que la crise malienne aurait, inévitablement, « un impact direct sur la région ». « Il ne s’agit pas d’une simple affaire de terrorisme, mais de crime organisé où sont utilisés les stupéfiants et le blanchiment d’argent », a-t-il exposé.
Politique hégémonique au Sahara
En Algérie, ce revirement ne fait pourtant pas l’unanimité. Dans le camp de l’opposition, le RCD et le FFS ont exprimé leur « inquiétude » sur la tournure prise par le conflit avec l’entrée en scène des forces armées françaises. Même ton critique, hier, dans les éditoriaux. Mais la mise en garde la plus alarmante est venue de l’amenokal de l’Ahaggar, Ahmed Idebir. « La guerre engendre plus de problèmes qu’elle n’en résout », s’inquiète le chef traditionnel touareg dans les colonnes du quotidien El Watan. Et de conclure : « N’oubliez surtout pas que la France n’a jamais abandonné sa politique hégémonique sur le Sahara, et ce depuis la guerre de libération (…) Cette guerre aujourd’hui à nos portes a d’autres objectifs que de combattre le terrorisme. »