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Plus de 11 000 éléphants tués depuis 2004 au nord-est du Gabon

Quelque 11 100 éléphants ont été tués depuis 2004, rien que dans le Parc national de Minkébé. Il est probable que la majorité de ces pertes ait eu lieu au cours des 5 dernières années.
Le Gabon détient 13 % des forêts tropicales du continent africain mais on estime qu’il accueille plus de la moitié des éléphants de forêt d’Afrique, avec une population estimée à plus de 40 000.
Le Docteur Fiona Maisels de la Société pour la Conservation de la Vie sauvage (WCS), chargée de l’analyse des données de l’enquête relative à la population d’éléphants dans le Parc national de Minkébé, a expliqué ceci : « En comparant le secteur déjà étudié en 2012/13 au même secteur étudié en 2004, nous pouvons constater que seulement environ un tiers des éléphants subsistent. En d’autres termes, plus de 11 000 éléphants ont été tués depuis 2004 ».
En collaboration avec le Fonds mondial pour la vie sauvage (WWF) et la Société pour la Conservation de la Vie sauvage (WCS), l’Agence nationale des parcs nationaux (ANPN) a lancé une enquête sur la faune sauvage du Parc national de Minkébé et de sa zone tampon en octobre 2012. Cette enquête a pour objectif l’évaluation de l’abondance de la faune sauvage et de l’impact humain à travers le secteur et, plus particulièrement, l’évaluation des impacts de la montée considérable du braconnage d’éléphants au cours de ces dernières années. L’enquête a été financée par l’ANPN, le programme de Contrôle de l’abattage illégal des éléphants (Monitoring the Illegal Killing of Elephants, MIKE) de la CITES et le Service américain pour la pêche et la vie sauvage.
On pensait auparavant que les troupeaux d’éléphants au Gabon avaient diminué bien plus lentement que dans le reste de la région, mais le pays a connu une série de cas de braconnage au cours de ces deux dernières années, notamment deux massacres d’éléphants détectés par le personnel de l’Agence national des parcs nationaux du Gabon. En avril 2011, le personnel des parcs a repéré 27 carcasses d’éléphants dans les savanes de la réserve de Wonga Wongué. Les braconniers avaient tué les éléphants puis s’étaient servis de tronçonneuses pour retirer l’ivoire, en laissant pourrir les cadavres. Le personnel des parcs a estimé que plusieurs centaines de carcasses étaient cachées dans les forêts tropicales qui couvrent une grande partie de la zone de Wonga Wongué.
En juin 2011, une augmentation considérable de l’activité humaine dans le Parc national de Minkébé et sa zone tampon a été détectée : un petit camp de 300 mineurs artisanaux s’était étendu à plus de 5 000 mineurs, braconniers, et trafiquants d’armes et de drogues. Les autorités du parc ont estimé qu’entre 50 et 100 éléphants étaient tués chaque jour, en raison de la hausse de la demande pour l’ivoire provenant de l’Extrême-Orient, et de l’augmentation des prix qui en résulte.
La semaine dernière, alors que les lourdes pertes suspectées à Minkébé étaient confirmées par des preuves scientifiques solides :
• la police judiciaire a saisi 20 défenses d’éléphants pesant 176 kg dans le Port Môle du centre de Libreville, qui étaient sur le point d’être chargées sur un cargo en direction du Togo ;
• le personnel de l’ANPN, en collaboration avec des renforts militaires dans le Parc national de Minkébé, a arrêté 11 braconniers camerounais lourdement armés détenant huit défenses, qui s’étaient avancés à 75 km à l’intérieur du Gabon ;
• une deuxième équipe du personnel de l’ANPN accompagnée par des gendarmes à Minkébé a été victime d’une embuscade et s’est fait tirer dessus par des braconniers à l’aide de fusils de gros calibre, tandis qu’elle tentait de retrouver deux porteurs en possession de 6 défenses d’éléphants qui avaient été arrêtés ;
• un braconnier camerounais en possession de 4 défenses a été arrêté dans le parc national de Mwagné ;
• un gendarme a été arrêté à Tchibanga, qui transportait 30 kg d’ivoire dans un véhicule du gouvernement ;
• le personnel de l’ANPN et de WCS a détecté 5 carcasses d’éléphants récentes à Wonga Wongué;
• presque deux tonnes d’ivoire ont été saisies à Singapour le 30 janvier, dont la provenance reste à ce jour inconnue ;
Le Professeur Lee White CBE, Directeur de l’ANPN a déclaré : « au cours des 3 dernières années, nous avons déployé 400 membres supplémentaires du personnel des parcs, 120 soldats et 30 gendarmes dans notre lutte contre l’abattage illégal des éléphants pour le commerce d’ivoire sur le marché noir. Malgré nos efforts, nous continuons de perdre des éléphants chaque jour. Si nous ne renversons pas la situation rapidement, l’avenir de l’éléphant en Afrique est compromis. Ces nouveaux résultats illustrent indéniablement à quel point la situation est devenue dramatique. Nos actions au cours de la décennie à venir détermineront la survie ou non de ces espèces emblématiques ».
Nombre d’éléphants tués en Afrique en 2012 : 31 800 !
Le gouvernement gabonais a réagi très vivement à cette tendance alarmante pour le braconnage. Le 26 juin 2012, le Président Ali Bongo Ondimba a procédé à la destruction de la réserve entière d’ivoire du Gabon, en déclarant « Les éléphants du Gabon sont en état de siège en raison d’un marché illégal international qui a entraîné la hausse du prix de l’ivoire dans la région jusqu’à 750 % en seulement 12 mois. J’appelle la communauté internationale à nous rejoindre dans cette lutte. Si nous ne renversons pas cette tendance rapidement, les éléphants d’Afrique seront exterminés… Au Gabon, nous avons une tolérance zéro pour le crime lié à la faune sauvage ».
Récemment, Richard Ruggiero, Directeur de la filiale du Proche-Orient, de l’Asie du Sud et de l’Afrique de la Division de Conservation Internationale du Service américain pour la pêche et la vie sauvage, a déclaré : « Nous travaillons étroitement avec les autorités gabonaises, qui font preuve d’un véritable leadership, mais il s’agit d’un problème mondial qui requiert une solution à l’échelle mondiale ».
« La collaboration internationale des organismes chargés de l’application de la loi est indispensable pour démanteler ces réseaux criminels internationaux », a affirmé Bas Huijbregts, Directeur du volet de la campagne WWF en Afrique centrale de lutte contre le trafic illégal d’espèces sauvages. « Si nous ne voulons pas perdre les derniers éléphants présents en Afrique centrale, le commerce illégal d’ivoire doit être traité comme un crime grave qui corrompt les gouvernements et affecte sérieusement les perspectives nationales de développement en termes d’économie et de sécurité. »
Le Docteur Mike Fay, l’explorateur qui a joué un rôle déterminant pour convaincre le défunt Président gabonais Omar Bongo Ondimba de créer un réseau de 13 parcs nationaux en 2002, et qui dirige actuellement une nouvelle initiative pour la création de parcs marins et la réforme de l’industrie de la pêche, a déclaré que « les efforts de conservation dans la région de Minkébé n’ont pas permis de réagir à la pression grandissante du braconnage pour l’ivoire, avec des résultats tragiques. Nous devons repenser nos pratiques commerciales et agir résolument si nous voulons sauver les éléphants. »
« Malheureusement, souligne Luc Mathot de l’organisation Conservation Justice – qui travaille avec le ministère des Eaux et Forêts -, les nombreuses arrestations réalisées par les autorités gabonaises et les informations dont nous disposons sur les réseaux de trafic d’ivoire sont confirmées par les inventaires réalisés par l’ANPN à Minkebe. De 1000 à 3000 éléphants seraient ainsi tués annuellement pour leur ivoire au Gabon. L’appui et la collaboration de tous dans cette lutte pour la survie des éléphants sont indispensables. L’arrestation et la condamnation d’un préfet et d’un officier de gendarmerie récemment par les autorités gabonaises confirment la volonté politique et la lutte contre l’impunité qui a été initiée en ce sens ».
À l’annonce de ces dramatiques informations, le Président Ali Bongo Ondimba a annoncé que le Gabon adopterait une nouvelle loi pour faire du braconnage commercial pour l’ivoire un crime, augmentant les peines de prison à un minimum de trois ans pour les braconniers d’ivoire, et de quinze ans pour le braconnage et le trafic d’ivoire liés au crime organisé. Lors de son intervention devant le Conseil des ministres, le Président a appelé à une action solide, coordonnée, décisive et immédiate de tous les services de sécurité et de gestion de la faune sauvage, dans cette situation d’urgence nationale.
Un Centre national pour la protection des ressources sera créé sous l’égide du ministre de la Défense afin de rassembler toutes les administrations et agences responsables de l’ordre public et de la gestion des ressources naturelle, avec un mandat clair pour renforcer la gestion et la gouvernance des ressources naturelles et pour éliminer la corruption qui est invariablement liée au crime sur la faune sauvage.

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