Petit à petit, les secrets de l’affaire Amadou Yogno sortent au grand jour. L’article commis en son temps par Gabonreview, et que d’aucuns ont dit qu’il «avait été écrit sous le coup de l’émotion», est, hélas, en train de se vérifier, ainsi que l’atteste le quotidien Gabon Matin du samedi 16 février. De plus, cinq présumées assassins du Camerounais Amadou Yogno sont désormais aux arrêts à Lambaréné.
Amadou Yogno, de nationalité camerounaise, 46 ans, père de 17 enfants, a été tué, le 21 janvier 2013, au terme d’un traquenard dans lequel l’avait entrainé le jeune Sembe Hinze Jolvy, 20 ans, gabonais. Il avait finalement été découvert mort, dépecé et délesté de certaines parties de son corps. Et dans ce cas précis, parler de «crime rituel» n’est pas un abus de langage.
Dans la version rendue publique par le correspondant de l’Agence gabonaise de presse (AGP) à Lambaréné dans la province du Moyen Ogooué, on apprend que Sembe Hinze Jolvy a donné, après son arrestation, au moins deux versions des faits. Il a d’abord déclaré, dans un premier temps, avoir tué ce transporteur qui assurait la desserte Libreville-Lambaréné, à 15 kilomètres après Ndjolé, non loin du village Alembé, soutenant avoir jeté le corps dans un ravin. A l’entendre, il avait commis ce meurtre avec l’aide d’un ami résidant à Libreville parce qu’il avait besoin d’une voiture à offrir à sa belle-mère.
La seconde version colle plus à ce qui se raconte et qui est rapportée par la communauté Bamoun du Gabon ayant participé aux recherches d’Amadou. Sembe Hinze Jolvy, qui réside à Owendo, a raconté qu’il avait été contacté par des gens qui voulaient des organes humains. Cette dernière version a incité le parquet de Lambaréné à instruire immédiatement l’antenne provinciale de la Police judiciaire (PJ) en vue d’une enquête.
«Les investigations menées ont permis de mettre la main d’abord sur Iloumbou Boussengui Philippe, 45 ans, alias Koutch, à Libreville, et Ossombi Antoine-Médard, 37 ans, à Boué. Il ressort des interrogatoires que Sembe Hinze Jolvy avait été contacté par Koutch en présence d’Antoine-Médard et d’une troisième personne, en janvier, au Rond-point de Nzeng-Ayong de Libreville, afin de trouver une cible pour le prélèvement des organes, à raison de 600 000 francs CFA. C’est ainsi que Sembe Hinze Jolvy, assisté de deux individus envoyés par Koutch, abordera le transporteur Amadou Yogno, pour le tuer», relate le quotidien Gabon Matin.
Le surnommé Koutch est résolument un serial killer. Secrétaire départemental du Parti démocratique gabonais (PDG, au pouvoir) de la ville de Booué, il avait été mis aux arrêts le vendredi 14 janvier 2011 à 15 heures. Menottes aux poignets, il avait été trimballé à travers la ville et hué par la population de Booué avant d’être transféré à Makokou, chef-lieu de la province de l’Ogooué-Ivindo. Il en est tout de même revenu, le procès s’étant perdu dans les embrouillaminis mis en scène par le puissant commanditaire qui pourrait bien, encore une fois, en réchapper.
La version du journal indique également qu’après leur acte aussi macabre que barbare, les assassins ont recueilli le sang et certaines parties du corps. De retour à Libreville après le meurtre, tous les organes prélevés et mis dans une glacière auraient été remis à Emile Tonda, 49 ans, qui se trouve être la troisième personne du rendez-vous de Nzeng-Ayong. Sembe Hinze Jolvy a également identifié Otota Jean-Marie, 50 ans. Toutes ces personnes auraient reconnu avoir récupéré la glacière dans laquelle se trouvaient les organes et l’avoir remis au commanditaire. Ces cinq présumés assassins sont placés sous mandat de dépôt à la prison de Lambaréné, en attendant leur jugement.
Au marché de Nzeng-Ayong, le bruit courait déjà depuis longtemps qu’un habitant des maisons derrière le lycée était complice d’un meurtre. Toute chose qui a fait que les jeunes du quartier s’amusaient à lancer des piques verbales aux enfants du présumé meurtrier. Il y a cinq jours, ce dernier a été également arrêté par la PJ qui a longuement tissé des stratégies et patienté des jours avant de mettre la main sur l’indélicat. L’un de ses amis serait également dans le coup mais est porté disparu.
Le nom du commanditaire présumé n’a toujours pas filtré, du moins officiellement, et les autorités judiciaires feraient bien de s’en inquiéter car divers noms sont colportés par la rumeur populaire qui ne risque pas de se taire de sitôt si elle n’est pas officiellement démentie. Car l’affaire semble loin de livrer son épilogue.