Vendeurs de CD diffusant de la musique à très forts décibels, klaxons à tue-tête des automobilistes, églises ignorant le voisinage, bistrots au volume musical assourdissant, la pollution sonore est un problème de santé publique que la puissance publique gabonaise fait parfois semblant de combattre. Rien, pourtant, ne dépasse le stade de l’annonce.
Le bruit est devenu une des nuisances majeures de la vie quotidienne des gabonais. Avec l’amoncellement des ordures dans les rues de Libreville dont les émanations constituent, à n’en point douter, un risque pour la santé des riverains, la pollution sonore fait elle aussi partie des nuisances qui devraient concerner, de manière étroite, la santé publique.
Outre le bruit causé par les automobilistes et les bars, il est un autre phénomène notoire concourant à la pollution sonore dans les rues de la capitale : la vente des appareils électroménagers (radio, télévision, lecteurs de disques) ou celle de biens culturels pour le moins contrefaits (CD, DVD). Qui ignore encore le vacarme dans les lieux de grande concentration humaine de Libreville ou d’Owendo où ces produits sont vendus ?
Du carrefour SNI à l’échangeur des Charbonnages en passant par celui de Nzeng-Ayong, il est quasiment conseillé aux populations de se boucher les oreilles, à défaut d’une réelle intervention des agents municipaux dans le but de punir des commerçants qui semblent ne rien craindre. Impuissants, les librevillois subissent à tous coins de rue l’assaut des décibels destinés à écouler les disques, films et les appareils destinés à les lire. Établi sur un lieu de commerce, chacun des vendeurs fait de son mieux pour se faire entendre dans la cohue de concurrents en diffusant le plus grand nombre de décibels dans l’ouïe des passants. Dans cette cacophonie indescriptible, mêlant des musiques d’origines diverses et sonorités provenant de nombreux amplificateurs, on est en droit de se demander si l’Hôtel de ville se préoccupe davantage de la vente de ses tickets-taxes que de la santé des populations.
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Et cela ne s’arrête pas avec la tombée de la nuit. On ne compte plus les bars et maquis plus ou moins légaux qui sonorisent un quartier entier, avec leur musique mais aussi avec leurs clients avinés, qui hurlent et se chamaillent sous les fenêtres des voisins. Et cela bien après 22 heures, l’heure à laquelle le président lui-même a fixé la limite de fermeture.
Pourtant, il y a bientôt un an que Mme Chimène Ntougou, chef de service Environnement rural et urbain de la direction de l’Environnement, sur la base du renforcement du décret d’application de l’article 41 du code de l’environnement inhérent à l’interdiction du bruit en milieu urbain, annonçait le «lancement de la campagne qui permettra d’évaluer l’ambiance sonore dans la ville, selon les quartiers et les points». L’opération visant à faire le rapport entre les types de bruit et le «seuil de risque» et à établir «la carte du bruit», annoncée par Mme Ntougou, tarde à être présentée aux autorités. Si tant est qu’elle existe.
Autre exemple de cette volonté du gouvernement de résorber le problème de la nuisance sonore dans la capitale et à l’intérieur du pays : le ministère de l’Intérieur annonçait, en avril 2012, un arrêté relatif à la fermeture définitive de l’église Plénitude Exode qui, en plus d’avoir été créée sans le récépissé idoine du ministère de tutelle, portait atteinte au bien-être des populations du quartier Plaine-Orety.
Inutile d’insister aussi sur l’absence flagrante d’application du décret relatif à la fermeture des débits d’alcool à une heure décente. Celui-ci continue de couler à flots toute la nuit, sur la base d’exceptions, de bakchichs versés aux contrôleurs ou tout simplement d’un laisser-aller général.
A coté de cela, une réglementation relative à la pollution sonore existe bel et bien sur le plan municipal. L’Hôtel de ville, par l’entremise de l’inspection générale municipale a mis à la disposition du public un numéro vert (06 05 99 99) dans l’objectif de recueillir les plaintes des individus. Un numéro qui ne répond pas la nuit et qui, depuis quelques mois, a disparu des contacts utiles du quotidien L’union, comme si le problème, pour les autorités municipales, avait été résolu.