David Baiot, acteur gabonais, a été révélé au grand public par le feuilleton français à succès « Plus belle la vie ».
Dans son appartement parisien, loin du mistral et du décor marseillais ensoleillé où se déroule le feuilleton Plus belle la vie, David Baiot garde toujours quelques jeans et tee-shirts dans une valise. Prêt à repartir vers la cité phocéenne pour jouer Djawad, le personnage que ce comédien gabonais de tout juste 30 ans incarne depuis bientôt trois ans et dont il partage la tchatche, le tutoiement automatique et le sourire rayonnant. « Jouer dans Plus belle la vie, c’est beaucoup d’engagement, mais le public s’y reconnaît énormément. Djawad est même populaire auprès des grands-mères ! »
Pourtant, l’histoire de David Baiot n’a pas grand-chose en commun avec celle de son personnage. Né à Libreville, arrivé en France à l’âge de 6 ans, l’acteur n’a jamais eu la nationalité française : « Je suis gabonais avant tout. » Sa maman, originaire de Côte d’Ivoire, est venue s’installer à Paris pour devenir gardienne d’immeuble après s’être séparée de son père. Depuis, David Baiot vit dans la capitale, évoluant dans un milieu modeste et sage. Le jeune homme aux goûts simples s’intéresse d’abord à la radio et au travail de la voix après des études en communication. C’est par le biais d’une amie qu’il se retrouve devant la caméra pour Seconde Chance, feuilleton d’une saison diffusé sur la chaîne française TF1. Puis tout s’accélère quand une directrice de casting le contacte afin de passer des essais pour Plus belle la vie. Auditionné pour trois personnages différents, c’est finalement pour incarner le « bad boy » qu’il est choisi. « C’est une vraie famille, on a la chance d’être très bien accueilli. Sur le plateau, je peux me lâcher, je connais Djawad par coeur, il passe par moi. Ça m’amuse, mais le danger est de s’y enfermer », avoue le jeune homme. Ainsi, quand il a eu l’occasion de se présenter à un casting pour le rôle d’Emmanuel dans Ainsi soient-ils, série dramatique diffusée sur Arte avec une belle audience de plus de 1,3 million de spectateurs, il n’a pas hésité.
L’écriture de la saison 2 est en cours, et Baiot a hâte d’y retourner : l’envie se lit dans ses yeux. « Même mes amis appellent encore ça le « truc avec les prêtres » », s’amuse-t-il. Si incarner un jeune homme entrant au séminaire peut paraître incongru, cela ne l’a pas été pour lui : « À la lecture du script, je me suis dit que le personnage avait été écrit pour moi. J’ai reçu une éducation catholique, ça me parle beaucoup. Emmanuel a peur de ce qu’il est, il subit une profonde remise en question. Il est moi, c’est quelqu’un que j’aurais pu être. C’est un rôle beaucoup plus intérieur, qui m’a ouvert de nouvelles voies et m’a permis de montrer que je pouvais faire autre chose. » Le thème de la religion et du catholicisme : comme un premier pas pour se rapprocher de ses origines.
« Ma soeur va tous les ans voir mes cousins au Gabon, mais je n’ai jamais pris le temps d’y retourner. Pourtant, c’est un truc qui me manque. Je sens un lien avec l’Afrique, des racines qui font partie de moi. L’éducation occidentale que j’ai reçue n’a rien effacé. Une fois que j’aurai fait ce voyage initiatique, que je serai retourné vers ce continent qui est le mien, je pourrai finir de me construire, je serai complet. » Une quête de soi qui pourrait passer par le cinéma ? « J’aimerais beaucoup, ce serait logique pour moi. » À terme, pourquoi ne pas établir un pont entre la France et le cinéma africain, où les investissements sont de plus en plus nombreux ? « Regarde le Nigeria, c’est le nouveau Bollywood ! Il y a énormément de choses à faire. Si le cinéma peut me ramener vers mes origines, j’aurai tout gagné. » Mais pas facile de se construire un réseau quand on n’est pas sur place. Ici comme là-bas, le milieu du septième art demeure très fermé.
Même en France, il n’y a pas beaucoup de réalisateurs africains qui peuvent faire appel à lui. De rares opportunités qu’il faut apprendre à saisir. « J’ai tourné avec Merzak Allouache un téléfilm très amusant, Tata Bahkta, diffusé sur France 2. Le scénario m’a beaucoup touché, parce que Merzak a lui aussi une obsession avec ses racines algériennes. » Bien sûr, certains y arrivent, comme la Française d’origine sénégalaise Aïssa Maïga, nommée comme meilleur espoir féminin aux Césars, en 2007. David Baiot y croit, prêt à dégainer des armes qui ont pour nom sympathie et motivation. Quitte à écrire lui-même le scénario qui le ramènerait vers le Gabon. À la réalisation ? « Alain Chabat ! rigole le jeune homme. Je suis un fan de ce qu’il fait et de toute la culture des années 1990 qu’il représente. J’ai grandi avec les comédies de l’époque. Ou bien, dans un genre différent, Michael Haneke, que j’admire dans sa façon de raconter des histoires anodines avec profondeur, de montrer la part d’ombre de chaque être humain. » Autant d’envies qui lui donnent l’énergie de continuer. En attendant, il se diversifie, donne des coups de main à des amis comme William S. Touitou sur son court-métrage Héros. Et le meilleur dans tout ça ? « Les gens commencent à me suivre, d’une série à l’autre, en tant que comédien. Ils me séparent de mes personnages et c’est très gratifiant. »