Les reporters locaux au 1er carnaval international de Libreville ont littéralement été maltraités par le service de sécurité qui a plutôt privilégié la presse étrangère. Petite rétrospective des relations difficiles entre les journalistes Gabonais et les services de sécurité.
Les relations entre les journalistes gabonais et les forces de l’ordre n’ont pas toujours été des plus cordiales. A l’heure où les Gabonais sortent peu à peu de l’effervescence de la première édition du Carnaval international de Libreville, les journalistes locaux, quant à eux, oublient difficilement les détestables conditions de travail de cette nuit du 23 février 2013 durant laquelle ils ont été victimes de discrimination et de violences de la part du service de sécurité présidentielle, alors qu’il ne s’agissait, après tout que d’un événement festif.
En effet, bien qu’officiellement accrédités par les organisateurs du Carnaval, les journalistes nationaux n’ont pas eu la possibilité de travailler convenablement, interdits d’accès à la tribune officielle par les «hommes en noir», alors que les mêmes agents ont fait une fleur à deux journalistes visiblement Européens. Ce deux poids deux mesures n’était pas pour plaire aux confrères qui ont pourtant bravé la pluie diluvienne arrosant la ville cette nuit-là, sans parler de la coupure d’électricité.
Entassés dans un espace très restreint «pour des raisons de sécurité», et à défaut du discours du ministre de la culture, les professionnels gabonais de l’information se sont contentés des petites agitations autours d’eux, comme pour donner un motif à leur déplacement. Autant dire que seuls les petits malins, au risque de se voir rabrouer, ont pu obtenir quelques images originales, d’où la quasi absence de photographies «non officielles» de la tribune officielle par exemple (celle qui illustre cet article provient du compte Facebook du président).
Ce mépris affiché par les gardes du corps du président de la République n’est pas sans rappeler le comportement brutal de certaines forces de l’ordre gabonaises vis-à-vis des journalistes nationaux. L’un des faits les plus frappants à ce sujet reste l’affaire dite Ginette Moussadji, du nom de cette journaliste de la chaîne privée Télé Africa qui, le 21 décembre 2005 à Libreville, a été violemment battue à coups de matraque en bois par 4 agents de police, alors qu’elle allait couvrir une manifestation pacifique organisée à proximité du palais présidentiel.
Que dire enfin du traitement infligé au mois d’avril de la même année, au caméraman de la Radiotélévision Nazareth (RTN) qui s’est fait molester à la gare routière par plusieurs gendarmes puis, le 24 novembre, d’Achille Ngoma, alors journaliste à Gabonews, qui était passé à tabac au carrefour Awendjé par des policiers qu’il souhaitait interroger, ou encore de la gifle infligée au confrère Yves-Laurent Goma le 1er décembre 2005 dans l’enceinte d’une préfecture de la place ?
Quand l’organisation internationale Reporters sans frontière (RSF) juge «intolérable» la situation et interpelle sur le «mépris de la carte de presse», les organisateurs du carnaval ont semblé minimiser l’affaire en expliquant par la voix de la présidente du comité d’organisation, Nicole Christiane Assélé, que «ce sont des choses qui arrivent, même s’il faut reconnaître que les agents en ont fait un peu trop». Hélas, oui, ce sont des choses qui arrivent, mais cela ne les justifie pas pour autant ! Il est certain qu’avec un tel manque de considération, «l’amateurisme, les marchandages, les règlements de comptes par presse interposée, l’instrumentalisation des journalistes, les parti-pris et autres censures volontaires qui occultent souvent l’information» tels que les dénonçait Ali Bongo il y a 2 mois, ne risquent pas de s’améliorer…