Entrés en grève générale illimitée, depuis le samedi 9 mars 2013, les syndiqués de l’Organisation nationale des employés du pétrole (Onep) ont évité des échauffourées avec les forces de l’ordre, le 14 mars à Port-Gentil. Journée chaude d’une grève qui inquiète le pays.
S’en tenant à l’arrêté n°003/PR/MTEPS du 22 mars 2010 qui stipule en substance que «le service minimum dans le secteur pétrolier n’est applicable qu’aux activités, services, postes de travail dont l’arrêt est de nature à compromettre le bon déroulement des services essentiels ayant un impact sur la santé, la vie et la sécurité alimentaire», les membres de l’Onep ont entrepris une démarche envers les autorités administratives de la capitale économique, plus précisément le gouverneur de la province de l’Ogooué-Maritime, Léonard Diderot Moutsinga Kebila. Il était question pour les grévistes d’indiquer qu’ils étaient disposés à livrer 5000 litres à une station-service de Port-Gentil et qu’ils souhaitaient que le gouverneur fasse appel à toutes les ambulances, toutes les forces de l’ordre, les pompiers, les pompes funèbres, etc. afin qu’ils viennent se servir dans la station-service déterminée.
«On devait donc laisser livrer 3000 litres de gasoil et 2000 litres d’essence à cet effet», explique Hans Landry Ivala, le secrétaire général adjoint de l’Onep, joint au téléphone. Toutefois, lors de ces discussions, le directeur général d’Oil Libya, Joseph Denis Antchouet, qui était présent dans la salle, a souligné que cette quantité était insuffisante et a demandé que soient alimentées 4 stations-services, avant de ramener son exigence à deux stations. «Ce que nous avons refusé, parce que cela sortait du cadre du service minimum. Il nous a alors été demandé si nous allions nous opposer à ce qu’ils trouvent des personnes qui veulent pas faire la grève pour ouvrir le dépôt et charger les camions», poursuit Hans Landry Ivala avant de spécifier : «nous avons souligné ne pas avoir de problèmes avec cela puisque la loi préserve le droit de grève mais autorise également le droit de travailler pour ceux qui refusent la grève et voudraient continuer de travailler.»
Le responsable d’Oil Libya a donc été indiqué qu’il disposait d’un opérateur pouvant faire ce travail. Ce qui, en principe ne posait aucun problème pour les grévistes, «tant qu’il s’agira d’un opérateur qui travaille effectivement au dépôt Oil Libya de Port-Gentil». L’ordonnance N°20/2007/PR du 21 aout 2007 relative à la mise à la disposition des compagnies pétrolières et parapétrolières du personnel, interdit en effet que soit utilisé un autre employé recruté à la va-vite, arraché à ses congés ou ne travaillant pas ce jour-là, pour remplacer des grévistes.
«Finalement l’accord n’a pas été conclu et le document n’a pas été signé concernant le service minimum proposé. Après quoi, ils ont appelé tous les travailleurs du dépôt Oil Lybia pour demander qui voulait travailler. Ce que les grévistes ont refusé. Par la suite, ils sont revenus avec un camion de Petro Gabon, avec des travailleurs dont on ne connait pas l’appartenance et ils ont commencé à charger les camions citernes. Les forces de l’ordre s’étant déployées pour que les grévistes ne puissent réagir», raconte le secrétaire général adjoint de l’Onep.
S’étant donc aperçus qu’il ne s’agissait des travailleurs habituels de ce dépôt, les grévistes, qui observaient leur piquet de grève sur les lieux se sont levé pour s’enquérir et dénoncer l’entrave à leur droit de grève. Les forces de l’ordre, parées de tout leur attirail et arsenal dissuasif, se sont interposées. «Les choses ont failli dégénérer. Nous avons donc dû calmer la tension en rappelant à nos membres que ce n’est pas la première fois que cela arrive, on l’a vu également à Libreville. Il ne servait à rien de s’embarquer dans des échauffourées. On a laissé faire, pris des photos et appelé un huissier de justice pour constater le chargement qui s’effectuait en violation des dispositions légales qui encadrent l’exercice du droit de grève en République gabonaise», relate le même leader syndical.
Le même scenario aurait été déroulé à la Société gabonaise d’entreposage des produits pétroliers (SGEPP) à Libreville où ne devaient normalement être livré que le carburant pour la Société d’énergie et d’eau du Gabon (SEEG), toujours en respect des textes qui encadrent le service minimum ; les centrales électriques de Libreville étant alimentées par du gasoil. «Mais pendant qu’on chargeait les camions-citernes pour la SEEG, ils ont utilisé ce carburant pour d’autres stations et, dans un deuxième temps, ils ont fait venir les gendarmes du GIGN cagoulés pour favoriser le chargement de tous les camions au-delà des conditions du service minimum, au vu et au su de tout le monde», déplore Hans Landry Ivala qui se satisfait tout de même de ce que les grévistes «sont restés suffisamment responsables pour ne pas affronter les forces de l’ordre. On ne sait pas quel était l’objectif visé derrière, donc on n’est pas tombé dans ce genre de provocation, d’intimidation.»
Les discussions avec les autorités se sont toutefois poursuivies à Libreville. Dans la soirée du 15 mars, Guy Roger Aurat Retenot, le secrétaire général de l’Onep, a indiqué que les débats du jour avaient positivement épuisé tous les points du cahier de charges concernant les préalables. Si le procès-verbal du jour ne venait pas à être remis en question, «on pourrait raison garder», selon l’expression du leader syndical qui estime, fort à propos, qu’une grève longue de plus d’une semaine est vouée au fléchissement et surtout fait perdre de l’argent au pays.