Le président gabonais, Ali Bongo, s’est rendu par surprise sur le campus de l’Université Omar-Bongo, le 20 mars dans l’après-midi, pour rencontrer les étudiants et noter personnellement leurs revendications et doléances. Fait inédit, il a déjeuné au restaurant universitaire.
On peut dire que le président Ali Bongo a pris le taureau par les cornes, ce mercredi 20 mars, et avec la manière… Alors qu’en fin de matinée un nouveau mouvement d’humeur a été amorcé par les étudiants de l’Université Omar-Bongo (UOB) et qu’un camion de la Gendarmerie nationale s’était déjà posté non loin du grand portail de cet établissement d’enseignement supérieur, le chef de l’Etat gabonais a procédé à une visite surprise, en descendant sur le campus en début d’après-midi.
Même la presse la plus prompt a été prise de court par ce qu’on pourrait appeler une «montée au front du président de la République», selon l’expression d’un étudiant. Un communiqué du Comité de communication (Cocom) de la présidence de la République et des photographies postées sur la page Facebook du président permettent de se faire une idée de l’évènement.
«Les milliers d’étudiants présents sur le campus de l’UOB ce mercredi à la mi-journée ont eu la surprise de voir arriver le président Ali Bongo Ondimba. Durant deux heures, entouré d’une foule considérable, celui-ci a arpenté le domaine universitaire, découvert le nouveau restaurant et assuré aux leaders estudiantins que les bourses seraient versées», indique le Cocom qui assure qu’«une invitation lui avait été discrètement adressée et il a souhaité l’honorer […] afin de prendre la plus exacte mesure des attentes et des insatisfactions qui agitent la communauté des étudiants. Autant dire les leaders gabonais de demain, qui ont pu s’exprimer librement devant le chef de l’Etat : «Dans ce village planétaire, devaient-ils lancer, les paresseux et les partisans du moindre effort n’auront plus de place ; seuls les mieux formés seront à l’abri du chômage. […] La grève n’est pas un bras de fer ou une déclaration de guerre. […] Les étudiants ne s’allient à aucun parti politique pour revendiquer de meilleures conditions d’étude et de vie».
Les photographies indiquent un bain de foule du président de la République et une visite de la toute première université du pays où plusieurs dizaine de milliards de francs CFA ont été investis depuis 2009 qui ont permis la modernisation d’un pavillon de 180 chambres de la cité universitaire, la construction de deux nouveaux amphithéâtres, de dix imposants bâtiments climatisés en matériaux préfabriqués offrant une capacité globale de 2 000 places, de 60 bureaux pour les enseignants et d’une vingtaine de toilettes. Les anciens amphithéâtres et salles de classes ont également été rénovés, de même que le restaurant universitaire désormais géré par Sodexo, une société spécialisée dans la restauration collective et le «facility management». Le président Ali Bongo, qui avait tombé le veston lors de ce long bain de foule, y a d’ailleurs déjeuné à l’occasion. Inédit !
«Regroupés sous le célèbre arbre à palabres, les jeunes en vinrent rapidement aux revendications, de la prime de transport à l’approvisionnement en livres de la bibliothèque centrale, de la levée du critère d’âge au point décisif du paiement des bourses à ceux qui n’ont encore rien reçu», relate le communiqué du Cocom, avant de poursuivre : «Le «contrat de confiance» demandé au porte-voix par les étudiants, l’impatience des uns et la détresse des autres, la volonté exprimée de faire de ce mercredi un «jour historique», appelaient une réponse tout aussi franche et directe et c’est donc sans protocole excessif que le chef de l’Etat, usant du même porte-voix, invita l’assemblée à ne pas décourager l’action publique alors que des réformes capitales sont en cours. «Oui, les bourses seront versées. Oui, une meilleure organisation des bourses et stages a déjà permis d’économiser plus de 11 milliards qui ont aussitôt été investis dans ces rénovations visibles par tous à l’UOB».
Durant le mois de février écoulé, l’UOB aura été secouée par des crises récurrentes portant sur les promesses non tenues, aussi bien par les autorités universitaires que par l’Agence nationale des bourses du Gabon (ANBG) ; les traitements inégaux quant à la distribution des bourses ; la limite d’âge à 27 ans pour bénéficier d’une bourse d’études ; l’exigence de meilleures conditions de vie et d’étude au sein du campus. Mais aussi, pour les enseignants, sur la revalorisation salariale promise par le chef de l’État en décembre 2011, et qui devait être effective en janvier 2012. On note qu’en juin 2012, après six mois de crises, les étudiants ont proposé au gouvernement une charte, dans laquelle étaient consignées toutes leurs revendications, indiquant que si elle était validée par l’État, ils étaient prêts à engager une trêve de trois ans pour permettre aux autorités de mieux répondre à tous ces problèmes. La descente d’Ali Bongo dans ce chaudron de revendications perpétuelles, va-t-elle déboucher la trêve espérée par toutes les parties ?