Paul Biyoghé Mba, Raymond Ndong Sima et maintenant Julien Nkoghé Békalé. Ils sont nombreux à être passés au ministère de l’Agriculture, de l’Élevage et du développement rural. Chacun vient toujours remettre à plat le travail entamé par son prédécesseur. Ce qui n’aidera certainement pas le secteur agricole à devenir le poumon ou le vivrier du développement économique au Gabon.
Le Gabon vient de signer son Pacte national du Programme détaillé pour le développement de l’agriculture de l’Afrique (PDDAA). Un outil de plus qui vient élargir la liste des mécanismes pour le développement du secteur agricole, la sécurité alimentaire et de la réduction de la pauvreté, déjà existants dans les tiroirs du ministère de l’Agriculture de l’Élevage et du Développement rural.
L’abondance de biens ne nuit pas certes, mais vouloir inventer la roue lasse et retarde. Un fait que semblent ignorer ces hommes et femmes qui, à tour de rôle, ont défilé à la tête du ministère de l’Agriculture. À l’observation, on est en effet tenté de croire que chaque patron de l’Agriculture doit absolument mettre en place un projet propre et personnel qui vient toujours mettre en veille celui entamé et laissé par son prédécesseur.
L’atteinte des défis fixés par le Pacte national du PDDAA, selon le secrétaire de la commission nationale du PDDAA, nécessitera un investissement de (l’État et des parties prenantes) de l’ordre de 350 à 400 milliards de francs CFA Jusqu’en 2020, donc en moyenne, entre 30 et 40 milliards de F CFA/an pendant 10 ans. Nonobstant les objectifs visés par cette initiative panafricaine qui devra déboucher sur la mise en œuvre du Programme national d’investissement agricole et de sécurité alimentaire et nutritionnelle (PNIASAN), il importe de savoir où est passé, ou classé, le plan quinquennal de développement agricole de Paul Biyoghé Mba, qui devait permettre d’injecter à terme 90,5 milliards de francs CFA dans le secteur pour parvenir au tau d’autosuffisance alimentaire escompté ? Cette enveloppe devait pourtant intégrer le Programme national d’investissement à moyen terme (PNIMT) sur la période 2009-2013 et devrait permettre de soutenir une agriculture entrepreneuriale privée, de diversifier les cultures, de vulgariser les méthodes agricoles écologiques, d’appuyer les promoteurs avec des aides ciblées, des mesures fiscales incitatives ou des bonifications de crédits.
De même, à quel niveau se trouve le projet des 5 zones agricoles de Raymond Ndong Sima qui s’inscrivait dans le cadre de la réalisation du programme de sécurité alimentaire sur l’ensemble du territoire national et qui a nécessité la création d’un fonds de garantie pour les exploitants agricoles doté de 900 millions de francs CFA ? Mais également le projet de formation d’une centaine de jeunes Gabonais exploitants âgés de 25 à 45 ans pour développer la culture de la banane, du riz, du manioc et du maïs, pratiquer l’élevage de porcs et de la volaille et faire de la pisciculture, lancé par l’actuel Premier ministre, Raymond Ndong Sima, en janvier 2011.
Tous ces projets sont-ils devenus caduques ? L’action publique ne consiste-t-elle pas à concevoir globalement, est-on tenté de demander.
Soumis à la culture de rente encouragée par les différents plans quinquennaux de 1975 à 1986 avant d’être remis en cause par les Programmes d’ajustement structurel mis en place avec l’appui du Fonds monétaire international, le Gabon veut améliorer sa production agricole pour atteindre une croissance agricole de 6%, la réduction du taux de pauvreté d’au moins 50%, ainsi que la réduction de 50% des importations par le pays, de denrées alimentaires. Le pays dispose pourtant d’atouts géologiques et climatiques, en plus de 20 millions d’hectares de terres agricoles non cultivées, pour lancer définitivement son décollage agricole. Ne devrait-on donc pas revenir à un nouveau type de plan quinquennal dans le domaine agricole, un plan que chaque nouveau ministre serait tenu de poursuivre, plutôt que de repartir chaque fois à zéro ? Pourquoi, au Gabon, chaque nouveau ministre nommé à l’Agriculture doit-il toujours brandir une meilleure vision que son prédécesseur ?