La troupe « Sacré Théâtre» s’est produite, le samedi 20 juillet, sur les planches de l’amphithéâtre des Lettres Modernes de l’UOB. Après «Le rapport d’Anna Mana», une dissection de l’Afrique sous tous ses angles, la jeune troupe s’est intéressée, à travers la pièce «Bonaventure», à la fébrilité de l’humain face au risque du chômage, la peur et la médisance qui en découle.
«Le travail d’équipe est essentiel. En cas d’erreur ça permet d’accuser quelqu’un d’autre». C’est par cette assertion du comédien, chanteur et scénariste Bernard Menez que la troupe Sacré Théâtre de l’Université Omar Bongo (UOB) a tenté de donner, le samedi 20 juillet 2013, au public la clé de sa deuxième représentation de l’année en cours. En effet, après la pièce intitulée «Le rapport d’Anna Mana» qui brossait un tableau peu enchanteur des réalités africaines, la troupe de jeunes comédiens s’est intéressée à l’homme, notamment à la fragilité de celui-ci lorsqu’il fait face à une grande incertitude. «Bonaventure», la dernière œuvre du dramaturge Rodrigue Ndong, par ailleurs enseignant à l’UOB, se révèle donc comme une photographie de la psychologie de l’humain qui, face à l’incertitude de son avenir, est prêt à tout dans le seul but de se sortir d’une mauvais passe.
Marion, Zemeckis et Biango, trois personnages bien qu’imaginaires sont donc de loin le miroir de cette fébrilité de l’homme qui conduit bien souvent à un ensemble de travers dont les principaux, dans toute société humaine, sont la trahison et la médisance. Pour l’auteur : «La situation de fébrilité enflamme, on se met à dire des choses inconvenantes, à révéler des confidences faites, pensant qu’on sera récompensé du mal qu’on aurait subi». En effet, même si pour son auteur, l’objectif de la représentation théâtrale a été de «distraire, d’amuser et si possible d’instruire» dans un premier temps, il convient de penser que «Bonaventure» a fait réfléchir plus d’un spectateur sur des thèmes comme celui du chômage, du travail en entreprise et la menace de la perte de l’emploi.
«L’idée de départ était de montrer ce que les gens peuvent dire sur les autres lorsqu’ils sont en situation de fébrilité, et notamment devant le risque d’une perte d’emploi. Ils sont généralement très fragiles et psychologiquement amoindris. Dans ces cas-là, la moindre piste de sortie, la moindre issue de secours est vue comme une aubaine et souvent la trahison (du moins ce qu’on croit percevoir jusqu’au dénouement de la pièce) est choisie par ces gens en situation de fébrilité et apeurés par la perte de leur bien-être», a indiqué Rodrigue Ndong. L’homme est donc dépeint par la troupe Sacré Théâtre comme un être commun à la plupart des individus qui ne sont convaincus de leur appréciation des autres que lorsque ceux-ci ne sont plus : «Dans la fébrilité et la peur du lendemain, on est amené à dire du mal des autres qu’on croit responsables de nos malheurs. Mais quand on réalise qu’ils ne sont plus là, qu’ils sont morts, on fait marche-arrière pour essayer d’embellir la situation. On regrette ce qu’on a dit. C’est donc cette série d’idées qu’on voulu mettre en avant».
Par ailleurs, la troupe qui souhaite toucher un autre public que celui qui peut aisément converger vers l’UOB, est confrontée au manque de considération d’une sorte de lobby du théâtre gabonais qui ne promeut le genre que par le biais d’une sacrosainte «connexion» : «Tout dépend des opportunités qui nous sont offertes. Nous ne maîtrisons pas les réseaux, si c’est le terme qui convient, mais comme de nombreuses personnes nous le font remarquer depuis nos débuts, il faut que nous organisions des représentations ailleurs qu’à l’UOB, nous continuerons donc les démarches et à faire des demandes». Ainsi, le théâtre gabonais, comme bien d’autres activités et secteurs, fonctionne par des affinités.
