Décidément, le Trophée des champions, organisé par le Gabon le 3 août, n’a pas fait que des heureux. L’évènement qui, depuis son annonce à suscité plusieurs critiques, dévoile peu à peu sa face cachée. Les «Black Stars», un groupe d’anciens footballeurs internationaux africains ayant évolué en Ligue 1 française qui se présentent comme les véritables initiateurs du projet auraient attaqué en justice la Ligue française de football professionnel (LFP).
La rencontre achevée, l’heure est venue de rendre compte. Depuis le samedi 3 août dernier, il est fait état d’une guéguerre mettant aux prises la LFP de Frédéric Thiriez et l’association Black Stars, présidée par Eric Fabre. Quand le premier présente le choix du Gabon pour la tenue de l’important évènement sportif comme une manière pour «le football français d’honorer le football africain», l’autre y voit une supercherie, une trahison dont ses compères et lui ont fait les frais : une affaire bien plus complexe qu’elle n’y paraît.
En effet, les Blacks Stars, une organisation regroupant des figures illustres du football africain parmi lesquelles Roger Milla, Jimmy Adjovi Boco, Daniel Cousin ou Joseph-Antoine Bell, s’est déclarée abusée et mise à l’écart dans l’organisation du Trophée au Gabon. Un projet pourtant initié et mené par ses soins, a indiqué Eric Fabre, président des Blacks Stars, au journal français L’Equipe, la semaine écoulée. «Nous avons monté le dossier de toutes pièces. Nous avons accompagné les dirigeants de la Ligue sur place pour qu’ils rencontrent les officiels gabonais. Nous avons fait venir les ministres des Sports du Gabon pour qu’il rencontre Frédéric Thiriez en décembre 2012. Finalement, nous avons reçu un courrier le 31 mai dénonçant notre contrat», a rappelé le président des Black stars au quotidien sportif. Ainsi, seulement un mois avant la tenue de la rencontre, ceux qui se présentent comme les véritables propriétaires de l’idée auraient été évincés et oubliés jusqu’à la matérialisation de celle-ci.
«Des raisons bidons»
Mise en cause, la LFP qui, le 31 mai 2013, a rompu le contrat estimant avoir été trompée, a quant à elle justifié la mis à l’écart des Black stars de l’organisation par un ensemble de raisons aussi curieuses que farfelues. Pour la Ligue, le dossier transmis par l’organisation ne comportait pas un accord officiel donnant l’autorisation d’utiliser le Stade de l’Amitié dans lequel devait se dérouler la rencontre. A cela s’ajoutait l’incapacité, reprochée aux Black stars, à financer l’organisation du match puisque, selon la LFP, «les sommes dues ont été versées par la République gabonaise».
Des arguments qu’Eric Fabre a eu du mal à comprendre expliquant que son organisation a travaillé sur la tenue du Trophée au Gabon depuis que le Maroc a accueilli l’évènement en 2010 et après la co-organisation, par le pays, de la CAN 2012. Pour le président des Blacks Stars, il était donc évident que l’Etat gabonais apparaissait de fait comme le principal contributeur : «On s’est dit que Libreville offrait les bonnes infrastructures. J’ai alors contacté Ali Bongo, le président du Gabon, par courrier, qui m’a répondu favorablement. […] Je vais à la Ligue avec la lettre et on dépose un dossier», a indiqué Eric Fabre avant d’ajouter : «Nous sommes une association, nous n’avons pas d’argent, comment aurions-nous pu avancer cette somme ? Rien que la location des deux avions revient à 450 000 euros. Nous étions d’ailleurs plutôt contents que l’argent ne transite pas par notre association. De toute façon, il était stipulé dans le contrat que l’État gabonais réglerait la facture».
Pour l’organisation des anciennes gloires du football africain qui vient d’assigner à Paris l’instance du football professionnel pour rupture abusive de contrat, les raisons sont à chercher ailleurs. «Il y avait une volonté de l’État gabonais de nous exclure et la Ligue a trouvé n’importe quel prétexte pour les satisfaire. C’est les mêmes barbouzeries que dans la politique», estime Éric Fabre qui a regretté le manque de courage de ses détracteurs.
Un sabotage ayant pour origine des proches du pouvoir ?
Bien déterminés à récupérer en leur faveur l’organisation du match, des individus proches du pouvoir à Libreville auraient doublé les Black stars, estiment les membres de ladite association. «Des gens aigris, anciens membres du COCAN, le comité d’organisation de la dernière CAN, qui n’acceptent pas d’avoir été obligés de rendre leur tablier après la fin de la compétition et qui ont toujours leurs entrées à la présidence», seraient donc à l’origine de l’éviction de l’association, signale un anonyme, bon connaisseur des coulisses du sport au Gabon, cité par sofoot.com. Pour preuve, un mois après l’attribution de l’organisation du Trophée à Libreville, l’État gabonais, par l’intermédiaire d’un décret présidentiel, a curieusement procédé à la mise en place d’une commission spécifique pour ce match. Une magouille qui ne dit pas son nom ! La Commission nationale d’organisation et de la gestion des événements et manifestations à caractère national et international (CNOGEMCNI), avait alors été créée en urgence, indique sofoot.com, et avait, par la suite, été reconnue par la LFP comme seule organisateur du match PSG-Bordeaux.
De plus, si la Ligue pouvait difficilement contester la légitimé de ce nouvel «interlocuteur officiel» présenté par le Gabon, elle a, en revanche, fait fi des déboires des Black stars qui, à l’origine du projet, étaient sur le point d’être «lamentablement mis dehors», ainsi que l’a fait remarquer Eric Fabre à son arrivée à l’aéroport de Libreville, le jeudi 1er août en fin d’après-midi, indiquant : «La deuxième fois que je me suis rendu à Libreville avec Jean-Pierre Hugues, le directeur général de la LFP, il m’a dit : « Tu gènes les Gabonais ». […] Aujourd’hui, on passe pour des escrocs et tous les Black stars sont dégoûtés». Une gêne qui aurait certainement été à l’origine de «l’oubli» qui leur aurait même privé d’une invitation officielle de la part de la nouvelle Commission.
