Se croyant au dessus des lois, de devoir tout mettre sous son contrôle et de passer outre ses contrats avec certains opérateurs commerciaux exerçant dans la municipalité de Libreville, l’Hôtel de ville, à sa grande surprise s’était vu condamné en 2003, par le Conseil d’Etat, à payer une amende de plusieurs centaines de millions de francs CFA pour avoir abusé de son pouvoir contre la société de publicité African Trivision. Dix ans après, l’affaire refait surface ternissant à nouveau l’image de l’institution.
L’affaire remonte au 7 janvier 2003 lorsque la mairie de Libreville, après avoir usé de son pouvoir, avait ordonné à la société African Trivision, spécialisée dans la communication et la publicité, de détruire l’ensemble des panneaux publicitaires qu’elle avait disposé à travers la capitale. A l’époque, bien qu’ayant eu un arrangement officiel avec ladite société, l’Hôtel de ville avait excipé du «défaut d’autorisation» comme principale raison de sa décision. Une contre vérité que Me Itchola, magistrat, a récemment tenu à mettre en lumière indiquant que la société African Trivision, honteusement mise en cause par la mairie de Libreville, avait pourtant «investi 150 millions de francs pour l’implantation de ses panneaux publicitaires et paie régulièrement ses redevances», ainsi que l’a relayé le quotidien L’union, le 30 août 2013. Alors, qui des deux parties dit vrai ? Qu’à cela ne tienne, pour le Conseil d’Etat, l’affaire avait comme un goût d’«excès de pouvoir» de la part des autorités municipales.
En effet, en ordonnant à la société la destruction de ses panneaux publicitaires, la mairie de Libreville avait outrepassé le cadre de ses prérogatives, bien que se basant sur le non moins fallacieux arrêté municipal n° 00106/CL-CM-DUP du 3 mai 2002 qui demandait l’expulsion pure et simple d’African Trivision du domaine public communal.
Au regard du caractère comique de l’affaire portée à leur jugement par les responsables de la société déboutée, les membres du Conseil avaient laissé tomber un véritable coup de massue sur l’Hôtel de ville en ses termes : « Article 3 : reçoit African Trivision en sa demande, condamne la mairie de Libreville à lui payer la somme de 600 millions de francs toutes causes de préjudice confondue. […] La République mande et ordonne aux autorités concernées par le présent arrêt, en ce qui les concerne, et à tous les huissiers à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution du présent arrêt. » Un coup terrible pour les autorités municipales qui, le 23 juin 2003, avaient interjeté appel en vue de l’annulation de la sanction. Trop lourde !
Mais plus lourde encore pour African Trivision qui avait dû subir de fortes conséquences dans son chiffre d’affaires. A cet effet, l’arrêté du Conseil d’Etat avait jugé que « la résiliation de ladite convention a causé à African Trivision un manque à gagner particulièrement grave, estimé à 253 224 976 millions en termes de pertes de contrats déjà obtenus (ou sur le point de l’être), notamment auprès de l’UGB, Celtel, BatGabon, Gabon Telecom ; 619 200 000 francs pour cessation de toute activité pendant trois années consécutives.»
Pour l’institution municipale, l’affaire qui jusque-là n’a pas encore connu son épilogue, s’avère difficile, d’autant plus, a indiqué L’union, que la somme de 600 millions de francs exigée à l’Hôtel de ville a quasiment doublé en raison des pénalités occasionnées par le retard observé par la mairie dans la liquidation de cette affaire qui entache davantage la gestion au sein de cette institution plutôt attrayante pour des hommes politiques.
L’affaire remonte à janvier 2003. Cette année-là, André Dieudonné Berre était déjà maire de Libreville, mais il avait été élu le 29 décembre 2002. Il succédait à Paul Mba Abessole, opposant historique, resté de 1996 à 2003 à l’hôtel de ville de Libreville. Qui donc a ainsi usé et abusé de son autorité municipale ?