Le président sénégalais Macky Sall a remercié dimanche son Premier ministre Abdoul Mbaye, qu’il a remplacé le même jour par une de ses proches, Aminata Touré, précédemment ministre de la Justice, qui devient la deuxième femme chef de gouvernement de l’histoire du Sénégal.
Aucune explication n’a été officiellement fournie au limogeage de M. Mbaye, 60 ans, technocrate et ex-banquier qui était en poste depuis 17 mois et a été remercié en même temps que son équipe.
Dans cette équipe figurait déjà Mme Touré, 50 ans, diplômée en économie, membre du parti présidentiel, l’Alliance pour la République (APR), et proche de Macky Sall.
Autres personnalités célèbres du gouvernement sortant: le chanteur Youssou Ndour, qui gérait le Tourisme, et l’écologiste Haïdar El Ali, qui était ministre de l’Environnement.
Quelques heures après l’annonce du limogeage d’Abdoul Mbaye et de son gouvernement, Mme Touré a été reçue au Palais présidentiel. C’est en sortant qu’elle a annoncé à la presse avoir été nommée Premier ministre.
Elle est la deuxième femme à occuper ce poste au Sénégal après Mame Madior Boye, qui avait été chef de gouvernement de mars 2001 à novembre 2002.
Surnommée par la presse locale Mimi Touré – Mimi étant un diminutif d’Aminata au Sénégal -, elle est diplômée en économie. Formée dans son pays et en France, elle a notamment travaillé pour des agences de l’ONU et a été une des responsables de la campagne électorale de Macky Sall.
Elle a salué «le très bon travail accompli» par Abdoul Mbaye, premier chef de gouvernement de l’ère post-Abdoulaye Wade (2000-2012). Ce dernier avait été battu par Macky Sall au second tour de l’élection présidentielle en mars 2012.
Aminata Touré s’est engagée à marquer son mandat par «l’accélération des actions qui ont été entreprises depuis l’année dernière». Il s’agit d’«une course pour le développement, pour l’amélioration des conditions d’existence» des Sénégalais «dans un contexte international marqué par la crise», a-t-elle dit.
Affaire Habré et «traque des biens mal acquis»
Mme Touré a eu à gérer des dossiers importants en 17 mois de pouvoir de Macky Sall, notamment l’affaire Hissène Habré, ex-président tchadien réfugié au Sénégal depuis 1990, et celle de l’enrichissement illicite présumé de responsables de l’ancien régime, appelée «traque des biens mal acquis».
Dans le cadre de cette «traque», Karim Wade, fils, ex-conseiller et ex-ministre d’Abdoulaye Wade, a été inculpé par une juridiction spéciale et est incarcéré depuis le 15 avril à Dakar.
Dans le même cadre, plusieurs responsables du parti de Wade ou de son régime – dont l’ex-mari de Mme Touré, l’ancien ministre Oumar Sarr – ont aussi été entendus par la gendarmerie ou la justice, tandis que plusieurs «opérateurs économiques» soupçonnés de malversations ont préféré «faire des transactions avec l’Etat», en remboursant des fonds publics, pour éviter des poursuites.
Hissène Habré est accusé de crimes contre l’humanité, crimes de guerre et torture durant ses huit ans de pouvoir au Tchad (1982-1990). Dakar et l’Union africaine (UA) ont signé en décembre 2012 un accord pour la création au Sénégal d’un tribunal spécial en vue de le juger. Il a été arrêté le 30 juin et inculpé le 2 juillet, dans l’attente de son jugement.
Aminata Touré a entamé des consultations dimanche soir pour former son gouvernement, attendu pour les prochaines heures, avec pour mission de sortir de la crise le Sénégal, dont la majorité des quelque 13 millions d’habitants font face à la vie chère.