Il est des héros que l’on célèbre. D’autres qui sombrent dans l’oubli. À l’instar, hélas, de Charles N’Tchoréré, qui a participé aux deux dernières guerres mondiales sous le drapeau français. Né à Libreville en 1896, le petit Charles a connu une enfance studieuse et remarquée chez les missionnaires catholiques. En janvier 1916, il s’engage dans l’armée coloniale pour défendre sa « chère patrie ». Le jeune tirailleur sera promu caporal, avant de devenir le secrétaire d’un colonel. Adjudant à la fin de la guerre, il est envoyé au centre de formation d’officiers et sous-officiers indigènes de Fréjus, dans le sud de la France. Major de sa promotion en 1923, le voilà instructeur à Fréjus, avant d’être nommé lieutenant en 1925. Il participe à des campagnes, notamment au Maroc et en Syrie…
En 1927, N’Tchoréré devient citoyen français. Recruté au ministère de la Guerre, il est nommé commandant et instructeur du 2e régiment des tirailleurs sénégalais à Kati (Soudan français). Fin 1933, il est promu capitaine et se retrouve, six ans plus tard, au prytanée de Saint-Louis du Sénégal. Lorsque la Seconde Guerre mondiale éclate, il est en Afrique. Mais il sera rappelé en métropole et affecté au front de la Somme (nord de la France). Il deviendra l’un des responsables de la 7e compagnie du 53e régiment d’infanterie coloniale mixte sénégalais. Dans le petit village d’Airaines, les combats contre les Allemands sont âpres. Le 7 juin 1940, la chance tourne le dos aux Français. Le capitaine et quinze de ses hommes sont faits prisonniers. À cause de la couleur de sa peau, il n’est pas traité comme un officier par les nazis. N’Tchoréré ne se laisse pas faire. Un soldat allemand lui tire alors trois balles dans la nuque, avant qu’un char ne vienne broyer sa dépouille. Une semaine plus tard, non loin, son fils, Jean-Baptiste, engagé volontaire, meurt les armes à la main.