Donnant enfin de la voix à propos du sujet de l’heure qu’est le livre de Pierre Péan, le Front de l’opposition pour l’Alternance, à travers Zacharie Myboto et au siège de la prohibée Union Nationale, a effectué une déclaration pour le moins tonitruante qui annonce, pour le 13 novembre, une plainte contre Ali Bongo «devant les tribunaux nationaux et internationaux».
Les personnalités politiques membres du Front de l’opposition pour l’alternance ont tenu une rencontre avec un bon nombre des militants de leurs formations politiques respectives, le 9 novembre au siège de l’Union nationale (UN), le parti semi-clandestin dirigé par Zacharie Myboto. Le dernier livre de Pierre Péan sur le Gabon et les conséquences y relatives étaient au centre de la déclaration lue par le leader de l’UN.
Confortés par Pierre Péan
Remuant les souvenirs, Zacharie Myboto est remonté au «coup d’Etat électoral de 2009, qui a généré la crise de légitimité, la vie du pays est ponctuée par des grèves chroniques dans tous les secteurs, notamment dans l’enseignement, la santé, l’habitat, la fonction publique, les affaires sociales, signes d’un malaise social généralisé qui conduit inexorablement le Gabon à l’implosion.» Tel est donc pour le Front de l’opposition le contexte dans lequel est paru «Nouvelles affaires africaines, mensonges et pillage du Gabon», l’ouvrage de Pierre Péan.
Rappelant que le journaliste et écrivain français est également l’auteur d’autres livres sur le Gabon, précisément «L’Emir d’Afrique», ouvrage inconnu que l’orateur dit avoir été publié en 1982, et «Affaires Africaines» (1983), le Front de l’opposition pour l’alternance pense que ces ouvrages «apportent des preuves incontestables sur le pillage du Gabon et l’identité réelle d’Ali Bongo Ondimba, arrivé à la tête de l’Etat par effraction. Ils attestent qu’Ali Bongo n’est ni le fils de sang d’Omar Bongo ni celui de Joséphine Kama», puisque, renforcés «par de nombreuses pièces à conviction», ils seraient le résultat d’enquêtes menées au Gabon, au Congo Brazzaville et en France. Les thèses de Pierre Péan viennent conforter, estime le consortium de l’opposition, «les deux plaintes, classées sans suite, déposées au Tribunal de Libreville. (Elles donnent) ainsi raison au recours pour inéligibilité introduit auprès de la Cour Constitutionnelle, lors de l’élection présidentielle de 2009, par l’un des candidats, Luc Bengone Nsi, membre du Front pour l’Alternance au Gabon».
Doigt accusateur sur la Cenap et la Cour constitutionnelle
Se faisant portevoix du peuple, l’opposition indique que «les Gabonais exigent la présentation de l’acte de naissance ou jugement supplétif d’acte de naissance d’Alain Bongo, né à Brazzaville, en 1959, d’Albert Bongo et de Joséphine Kama». Elle interroge à l’occasion la commission électorale et la Cour constitutionnelle sur les dossiers d’Ali Bongo que ces organisations ont toujours validé pour les différentes élections, législatives (1990, 1996, 2001 et 2006 dans le département de la Djouori Agnili) et présidentielle (2009), auxquels l’actuel chef de l’Etat a pris part depuis l’ouverture démocratique au Gabon.
Le feuilleton de l’acte de naissance controversé, légalisé au 3e arrondissement de Libreville avant la présidentielle de 2009, a donc été remis sur la table avant de déduire que «la mairie du 3ème arrondissement de Libreville qui a fabriqué le faux acte de naissance, le PDG qui a présenté la candidature d’Ali Bongo Ondimba, la Cenap et la Cour Constitutionnelle qui ont validé le faux acte de naissance d’Ali Bongo Ondimba, ont, tous, cautionné la forfaiture et participé au complot qui a entrainé le coup d’Etat électoral du 3 septembre 2009. Ils deviennent ainsi ses complices devant Dieu, devant l’Histoire et devant tous les Gabonais en officialisant, l’une après l’autre, toutes les candidatures d’Ali Bongo tant à la députation qu’à la Présidence de la République.»
La «qualité des chiens» de Pascaline Bongo
La sortie télévisée de la fratrie d’Ali Bongo en réaction aux écrits de Péan a également eu droit à son traitement. Dans sa tirade, le Front de l’opposition pour l’alternance estime qu’«affolée et volant au secours de son frère, Pascaline Mferri Bongo est descendue du haut de sa caravane pour nous confirmer, avec arrogance et mépris, que son père, Omar Bongo Ondimba, était «la maternité allaitante», son frère Ali et elle-même, les panthères-gardiennes du temple.»
Flash-back contextuel : Le 2 novembre dernier, l’ainée de la progéniture d’Omar Bongo a laissé entendre sur Gabon Télévision que «Le symbole du Gabon c’est la maternité allaitant (le sceau de la République, ndlr). Les armes (le blason de la République, ndlr) sont les 2 panthères qui gardent le Gabon. Quand on descend au niveau de notre cellule familiale, la maternité allaitant, c’est Omar Bongo, qui a donné tout à tout le monde, y compris à Pierre Péan. Les 2 panthères, ce sont Ali et moi qui gardons la famille Bongo».
A ce sujet, le regroupement d’opposants, non sans rappeler le sens des deux symboles nationaux cités, indique : «en redéfinissant les symboles de la République, en se les attribuant alors qu’il est connu de tous qu’ils ont été adoptés avant l’accession d’Albert Bernard Bongo au pouvoir, Pascaline Mferri Bongo s’arroge la souveraineté nationale, en violation de l’article 3 de la Constitution ; toutes choses qui sont de nature à mettre à mal la cohésion nationale en secouant durablement les fondements de l’Etat.» La réplique de l’opposition à la sœur du chef de l’Etat ne s’est pas arrêté là, puisque par la voix de Zacharie Myboto, «le Front s’indigne des propos injurieux tenus par Pascaline Mferri Bongo qui dit «nous avons été élevés par un père qui a dit «le chien aboie, la caravane passe» mais, cette fois-ci, mon frère, ma famille, nous disons «ça suffit !» On va dire à la caravane de marquer le pas pour voir la qualité des chiens. Pour savoir ce qu’ils sont en train de dire.» Ces «chiens» ne sont rien d’autres que les Gabonaises et les Gabonais que nous sommes. Il s’agit là de propos gravissimes que le Front ne peut accepter. Elle en portera la responsabilité avec son frère Ali Bongo.»
Si on ne devait retenir qu’une chose de cette sortie de l’opposition qui a invité «tous les Gabonais des quatre coins du pays, les villageois et les citadins, les partis et associations à caractère politique, la société civile, les syndicats, à se mettre debout pour, comme un seul homme, chasser du pouvoir Ali Bongo qui a fait du Gabon sa propriété privée», ce serait son appel aux «forces vives de la nation à marcher à ses côtés pour déposer jeudi 13 novembre 2014 la plainte du peuple gabonais devant les tribunaux nationaux et internationaux, pour que le faussaire soit jugé et condamné.»
Un «grand meeting populaire dans le cadre des actions pour la libération du Gabon» a été annoncé dont la date n’a pas été indiquée.