Du fait des tracasseries administratives et du bouclage de la zone par les forces de l’ordre, les leaders du Front de l’opposition pour l’alternance ont décidé du report, à une date qui sera communiquée ultérieurement, du rassemblement prévu pour le 9 avril dernier.
Un peu comme désormais de coutume, le gouvernement a réussi à gêner la mobilisation programmée des militants et sympathisants du Front de l’opposition pour l’alternance, le 9 avril dernier, à la mythique place de la Tolérance à Rio dans le 3e arrondissement de Libreville.
Dès 11 heures du matin, en effet, les voies menant au point de rassemblement étaient obstruées par les véhicules de la Police nationale et de la Gendarmerie. Les commerces avaient reçu l’ordre de fermer et les établissements scolaires de la zone celui de renvoyer les élèves à la maison. Des messages faisant croire que le meeting n’était pas autorisé et ne devrait pas avoir lieu ont circulé à travers la ville, surtout que l’équipe logistique du conglomérat des partis de l’opposition, partie le matin à Rio, a été empêchée d’y dresser le podium, encore moins d’installer la sono, les tentes et chaises. L’électricité était, de surcroît, coupée dans la zone.
Le carrefour Rio qui grouille habituellement de monde était donc littéralement devenu un no man’s land n’eut été la présence des forces de l’ordre et surtout du préfet de Police de Libreville, à la manœuvre et très remarqué. Dans les camions des forces de l’ordre, était visible tout l’attirail nécessaire au maintien de l’ordre (caisses de grenades lacrymogènes, fusils lance-grenades, boucliers, casques, matraques, etc.). Fait nouveau : dans un véhicule blindé trônait un caméraman effectuant d’interminables prises de vues des quelques militants obstinés qui, au prétexte d’être des riverains, ont réussi à passer le cordon sécuritaire et à parvenir sur la place, mais aussi des journalistes couvrant l’évènement.
Ce n’est qu’à 16 heures 45 minutes que ce qui auparavant était interdit, a fini par être permis. «Le meeting peut se tenir. Nous avons reçu des instructions», a lancé un Général de Brigade nommé Effayong, un peu après une petite discussion, au sujet du respect de la loi par les gouvernants, avec Jean de Dieu Moukagni-Iwangou, arrivé sur les lieux avec Divungi Di Ndinge, Jean Ping, Jean Eyéghé Ndong, Philibert Andzembé, Jacques Adiahenot, René Ndémozo’o Obiang, Mike Jocktane, entre autres. «À 11h pendant que la population nous attendait ici, la gendarmerie nous a dit que le meeting est interdit. Mais à 16 h 45 quand nous arrivons ici, on nous dit que nous pouvons tenir le meeting. Nous n’allons pas tomber dans ce piège. C’est la raison pour laquelle nous nous concerterons avec les autres membres du bureau pour décider de la conduite à tenir», a déclaré Jean Ping, qui a vu en ce changement soudain, une stratégie de communication visant à faire croire que l’opposition a été incapable de mobiliser du monde.
Qu’est-ce qui a bien pu faire changer d’avis aux décideurs et les a rendu conciliants avec leurs antagonistes du Front pour qu’en l’espace de trois heures, une interdiction puisse se muer en autorisation ? «Nous avons fait ce qu’il fallait faire, nous avons demandé une autorisation conformément à la loi», a indiqué l’ancien président de la Commission de l’Union africaine. «La demande a été déposée auprès du maire du 2è arrondissement en application de la loi 48/60 de juin 1960. C’est à la mairie d’envoyer cette autorisation au ministère de l’Intérieur qui lui ne peut interdire cette manifestation que s’il y a trouble à l’ordre public et s’il nous signifie l’interdiction par écrit», a-t-il expliqué, en s’appuyant sur les textes en vigueur. Quelques minutes auparavant Moukagni-Iwangou en faisait la démonstration à un officier de police.
Un micmac qui n’a cependant pas refroidi la détermination de la population à voir ce meeting se tenir ou à obtenir des leaders du Front une autorisation d’élire domicile au carrefour Rio pendant deux jours afin de montrer au pouvoir en place sa détermination à le faire chuter.