La mort, ce dimanche, d’André Mba Obame, opposant gabonais et fondateur de l’Union nationale, suscite de nombreux commentaires dans la presse locale et sur le reste du continent. Ancien baron du régime de feu Omar Bongo, Mba Obame était devenu l’un des adversaires les plus résolus du président Ali Bongo Ondimba arrivé au pouvoir après le décès de son père, en 2009.
« Après plus de quatre ans de lutte acharnée contre la maladie, l’emblématique opposant gabonais, André Mba Obame, 57 ans, appelé affectueusement AMO par ses sympathisants, a quitté le monde des vivants hier dimanche », rapporte le site d’information Gaboneco.
Gabonactu, autre site d’information gabonais, retrace le parcours sinueux de l’opposant : « Plusieurs fois ministre sous la présidence d’Omar Bongo Ondimba, il se présente comme indépendant à l’élection présidentielle de 2009 à la mort de celui-ci, et arrive en 3e position derrière Ali Bongo Ondimba et Pierre Mamboundou. Les deux opposants revendiquent chacun la victoire mais la Cour constitutionnelle proclame Ali Bongo Ondimba élu. André Mba Obame entame alors une virulente contestation des résultats officiels du scrutin, poursuit Gabonactu. Il observe une grève de la faim avant de lancer quelques actions. La diffusion sur France 2, en décembre 2010, du documentaire “ Françafrique ” de Patrick Benquet réveille les accusations de fraude électorale : André Mba Obame aurait gagné l’élection présidentielle de 2009 avec 42% des voix contre 37% pour Ali Bongo Ondimba. »
« Alors, de quoi est mort André Mba Obame ? Il ne s’était jamais exprimé sur sa maladie… » Certains, rapporte Gaboneco, parlent de « sciatique paralysante et hyperalgique », d’autres d’un « accident vasculaire cérébral ». Mais rien n’est confirmé.
« A ce départ jugé précoce, les partisans de l’ex-leader de l’Union nationale trouvent l’explication de l’empoisonnement, relève le site d’information guinéen Ledjely.com. Naturellement, ils n’ont aucune preuve. Et leur accusation est dictée par la passion, pointe le site. Car, en réalité, très peu de personnes savent de quoi l’opposant est décédé. Le mystère autour de sa maladie était tel que lui-même, avait déclaré : “ J’ai été à plusieurs reprises dans un état de coma avec une paralysie presque totale et des difficultés d’élocution. Ça ressemble à un accident vasculaire cérébral (AVC), mais il n’y a pas de traces d’AVC dans le cerveau. ” Incapable donc de rendre compte de son mal en usant des vertus de la rationalité, André Mba Obame avait épousé le mysticisme, rapporte encore Ledjely.com, en se disant victime “ d’attaques mystiques répétées ”. Et c’est décidément ce dont se sont rappelés, hier dimanche, ses militants. »
En effet, relève Afrik.com, « sa mort a suscité la colère de ses partisans à Libreville, qui ont incendié des voitures et des bâtiments dont celui de l’ambassade du Bénin, selon des témoignages concordants. Ces partisans accusent donc le pouvoir de lui avoir jeté un sort qui aurait causé son décès, selon eux. La manifestation de colère a finalement été dispersée par un important dispositif policier. »
Opposant du jour au lendemain…
Alors, « Envoûtement ou empoisonnement ?, s’interroge le quotidien Aujourd’hui au Burkina. On a vu sa silhouette, d’abord à Paris, où il s’est fait soigner par la médecine classique, et il y avait comme un léger mieux. Puis, une intervention chirurgicale en Afrique du Sud. Et après un bref retour au pays, il sera victime carrément d’un AVC, et là, il errera dans de nombreuses capitales, Tunis, Niamey, parfois sur une chaise roulante, se soignant même à l’indigénat, c’est-à-dire chez les tradipraticiens. La grande faucheuse l’a donc pris hier 12 avril à Yaoundé au Cameroun, d’où il s’apprêtait à retourner en Afrique du Sud. »
En tout cas, pointe Aujourd’hui, « l’histoire retiendra qu’après avoir composé pendant des décennies avec le pouvoir, d’où il a tiré l’essentiel de sa fortune, André Mba Obame a tenté d’endosser le costume d’opposant, voire d’artisan de l’alternance, dans un pays au système politique verrouillé. »
En effet, précise le quotidien burkinabè, « iI fut l’un des nombreux fils spirituels d’Omar Bongo, tout comme les Jean Ping et autre Paul Mba Abessolé, l’ex-chef des Bûcherons. C’est à l’ombre de cette figure tutélaire du Gabon pendant près de quatre décennies, que l’ex-président de l’Union nationale du Gabon fit ses armes. Une amitié très serrée le liait également à Ali Bongo Ondimba, du moins du vivant du père de ce dernier. […] Et du jour au lendemain, l’ex-sécurocrate en chef de Bongo-père se mua en un opposant radical, contredisant Ali Bongo, multipliant les meetings et les sorties. […] André Mba Obame avait failli transformer l’essai, note Aujourd’hui. Réaliste, il aurait pu provoquer l’alternance en 2009 en composant avec Pierre Mamboundou. C’est donc un opposant » maison » qui s’en est allé, mais aussi un ami et un frère du président Ali Bongo, qui s’est tu à jamais. »
Enfin, le site d’information camerounais Cameroon Infos note que le décès de l’opposant gabonais intervient « deux jours après la disparition à Paris, de Rose Francine Rogombé, ex-présidente du Sénat gabonais qui était devenue célèbre quand elle avait été appelée à assurer l’intérim de la présidence du Gabon après le décès d’Omar Bongo. Le Gabon, pays limitrophe du Cameroun, sort donc d’un week-end très éprouvant. »