Une «journée patriotique» a été organisée, le 11 avril 2015, à Libreville en mémoire de l’activiste et Prix de l’intégrité 2010 de Transparency International, pour sa la lutte contre les «biens mal acquis» et la mal gouvernance. Deux thèmes chers à celui qui tiré sa révérence le 10 avril 2014 ont été abordés.
Loin du tumulte de la manifestation de soutien au pouvoir en place, initiée par les jeunesses du PDG, ou de celle du Front de l’opposition pour l’alternance (lire par ailleurs Loïc Ntoutoume), le Front des indignés du Gabon a commémoré, le 11 avril 2015, au siège de Brainforest (Libreville), le premier anniversaire du décès de Gregory Ngbwa Mintsa. Dénommé «journée patriotique», en raison de l’engagement de l’activiste disparu le 10 avril 2014, l’événement n’a pas connu la mobilisation escomptée. Il a tout de même donné l’occasion aux participants d’échanger sur les thèmes chers au Prix de l’intégrité 2010 de Transparency International, pour sa la lutte contre les «biens mal acquis» et la mal gouvernance. Ainsi, «La tenure foncière au Gabon» ainsi que «Le Gabon et le crime patrimonicide» ont été abordées par Franck Ndjimbi, d’une part, et Michel Ogoundou Loundah et Hyacinthe Mba Allogho, d’autre part
Si intervenants et participants ont dit devoir poursuivre le combat de Gregory Ngbwa Mintsa pour le bien des générations futures, qui passe par une véritable réforme de la gouvernance politique, son concept de «crime patrimonicide» a permis aux uns et aux autres de dénoncer la «captation du patrimoine national par le pouvoir en place, notamment la famille Bongo». «Nous sommes tous co-propriétaires du Gabon», a déclaré Michel Ongoudou Loundah, avant de faire remarquer qu’«il se trouve que c’est une minorité qui s’accapare depuis longtemps le patrimoine national». D’après lui, «personne avant Gregory Ngbwa Mintsa n’avait théorisé sur cette question. Ce qui nous impose de reconnaître son courage et surtout son intelligence». «Linguiste de formation Grégory avait construit ce mot à partir de patrimoine, de la même manière qu’est conçu le terme génocide, qui part du génome», a expliqué Hyacinthe Mba Allogho, ajoutant : «Le patrimonicide est, selon lui, le fait d’exterminer de façon intentionnelle, systématique et programmée tout ou partie du patrimoine d’une communauté». «La patrimoine a ceci de différent de la propriété qu’il est un élément constitutif de l’identité. La patrimonicide est donc une atteinte au patrimoine avec, en arrière-plan, l’envie de porter atteinte à l’identité. Dans un pays comme le nôtre, cela s’est traduit par une incapacité de l’Etat a accoucher ensuite d’une nation et par la possibilité, pour les tenants du pouvoir, d’instrumentaliser des gens, qui se raccrochent à une forme d’identité spontanée», a dit Franck Ndjimbi.
Une question qui rejoint, dans une moindre mesure, sa communication sur la tenue foncière. Pour lui, si la question préoccupait Gregory Ngbwa Mintsa, c’est parce qu’«au Gabon, plutôt que de parler de droit de propriété, on parle de droit de tenure». Ce qui va à l’encontre de l’idée que l’activiste selon laquelle les Gabonais sont seuls propriétaires de leur pays. Or, fait remarquer ce consultant en gestion des ressources naturelles, «les droits de tenure sont inférieurs aux droits de propriété, dans le sens où ils ne permettent de jouir que de l’usage, de l’accès, de l’aliénation». Le combat de Gregory Ngbwa Mintsa aurait donc été d’imposer un régime foncier qui ferait des citoyens les propriétaires de la terre. Alors les autorités semblent encore tergiverser sur la question, en choisissant de botter en touche. Malgré la création de l’Agence nationale de l’urbanisme, des travaux topographiques et du cadastre (ANUTTC), on est encore loin du but.