Avocat pénaliste intervenu plusieurs fois au Gabon pour la défense des membres de la société civile accusés en 2009 d’atteinte à la sureté de l’Etat, il évoque la situation actuelle du pays et indexe la cupidité du pouvoir en place.
Sollicité dès 2009 par des journalistes et membres de la société civile accusés d’atteinte à la sureté de l’Etat, Thierry Lévy n’en a pas tout à fait fini avec le Gabon, dont il accuse les autorités judiciaires d’avoir étouffé l’affaire, restée sans suite depuis six ans. Dans un récent entretien accordé au site Camer.be, l’avocat pénaliste français est revenu sur la situation qui prévaut depuis plusieurs mois dans le pays. Une situation qu’il impute à la gouvernance d’Ali Bongo, et davantage à la cupidité des tenants du pouvoir. S’il a dit ne pas disposer de preuves pouvant l’amener à corroborer les accusations des uns et des autres sur le caractère «mafieux» de la gouvernance actuelle, il n’a pas moins fait remarquer qu’«on assiste aujourd’hui à une chamaillerie au sein de la famille Bongo, qui est assez peu compatible avec les responsabilités du pouvoir, et qui démontre en tout cas que le goût de l’argent facile l’emporte sur des considérations politiques et sur l’intérêt du pays».
Pour l’ancien président de l’Observatoire international des prisons, cet état de fait donne l’impression qu’ «on est entré dans l’ ’’hiver bongolien’’», plutôt que dans une forme de «printemps gabonais». De son avis, «l’unité familiale (des Bongo) s’étant brisée, on a le sentiment que tous ces gens qui accaparaient le pouvoir ont commencé un long cauchemar qui peut précéder un printemps». Ainsi, estime-t-il, les membres de la famille d’Omar Bongo Ondimba, victimes de leur cupidité, pourraient parfaitement être les seuls responsables de leur propre perte. En témoignent, les pressions exercées les uns sur les autres depuis quelques temps et les nombreuses révélations des médias nationaux et internationaux sur les querelles entre Ali Bongo et Pascaline Mferri Bongo, ainsi que les accusations d’autres membres de cette fratrie, sur fond de partage d’héritage.
Au sujet de l’opposition, Thierry Lévy a affirmé que l’unité de celle-ci est loin d’être la chose la plus difficile à mettre en place. «Est-on assuré que des élections libres et sincères pourraient avoir lieu ?», s’est-il néanmoins interrogé. Pour l’avocat pénaliste français, «ce n’est pas évident». Et pour cause : même si les différentes composantes de l’opposition se réunissaient, la garantie d’une présidentielle régulière en 2016 est loin d’être acquise. Dénonçant le contraste entre l’opulence du palais présidentiel et la misère des quartiers qui le jouxtent, il y voit l’une des causes de la grogne sociale depuis des mois. «Il y a très probablement une responsabilité très certaine (de la France) à l’égard de la situation au Gabon», a-t-il conclu.