Un collégien musulman de 14 ans a été interpellé à Irving au Texas, après avoir apporté à son école une horloge numérique qu’il avait fabriquée lui-même. Accusé par la police d’avoir assemblé une bombe factice, il a reçu une vague de soutiens immense via les réseaux sociaux et une invitation à la Maison Blanche par Barack Obama.
Cette affaire a enflammé la Toile mercredi 16 septembre. Ahmed Mohamed, fils d’immigrés soudanais, en fabriquant une horloge composée d’un écran numérique et d’un circuit électronique, a fini menotté et brièvement détenu. Les policiers de la ville d’Irving impliqués, eux, se sont vu reprocher un excès de zèle fondé sur un sentiment islamophobe.
Lundi 14 septembre, après avoir enfilé son tee-shirt siglé « Nasa », cet adolescent inscrit en troisième au lycée MacArthur d’Irving, près de Dallas, a emporté dans une petite valise métallique son « invention » qu’il voulait montrer à son professeur de technologie. Le dispositif ayant sonné lors d’un autre cours, un enseignant d’anglais l’a confisqué. Pour cet apprenti Géo Trouvetou, c’est le début du cauchemar.
« Le proviseur et des policiers m’ont conduit dans une pièce où cinq policiers m’ont interrogé, fouillé, ont saisi ma tablette et mon invention, a confié Ahmed au journal Dallas Morning News. Puis j’ai été conduit dans un centre de détention juvénile, où j’ai été fouillé, ils ont relevé mes empreintes digitales et ont pris des photos de moi », a poursuivi l’adolescent, interviewé dans sa chambre, dont le bureau est couvert de circuits électroniques.
La police texane moquée sur les réseaux sociaux
Le petit génie a été menotté et interdit de téléphoner à ses parents pendant son interrogatoire. Une fois relâché, il a été exclu trois jours de son collège. Ces faits sont intervenus trois jours après l’anniversaire des attentats du 11 septembre 2001 et alors que des écoles américaines ont été le théâtre de plusieurs tueries qui ont marqué l’opinion publique. Pour autant, les forces de l’ordre impliquées ont été vivement critiquées. « Cette arrestation est un signal d’alarme », a déclaré Alia Salem, une responsable du Conseil des relations américano-islamiques (CAIR). Selon l’organisation, rien ne se serait passé si l’adolescent ne s’était pas nommé Ahmed Mohamed.
L’affaire a vite dépassé les frontières du Texas. Sur les réseaux sociaux, un nouveau hashtag a fait son apparition #IStandWithAhmed(Je suis solidaire d’Ahmed), la police texane, elle, se retrouvant sur la défensive. « Il s’agissait d’un dispositif très suspect. Nous vivons à une époque où l’on ne peut pas emporter de telles choses à l’école », a déclaré Larry Boyd, chef de la police d’Irving. Il a expliqué qu’Ahmed avait été menotté « pour sa propre sécurité ».
Cela n’a pas suffi à endiguer le flot de tweets – 2 000 par minute selon Twitter Data. Des centaines d’internautes se sont photographiés portant une pendule ou ont affiché des images d’enfants blancs au Texas brandissant des armes à feu, les comparant à Ahmed et son bricolage. « Cela ressemble à une horloge, cela fait tic-tac comme une horloge, c’est une horloge, mais à partir du moment où vous vous appelez Mohamed, cela devient une bombe », a commenté Faisal Kutty, un professeur d’université de l’Indiana. « Oh mon Dieu ! Quelqu’un a posé une énorme bombe dans cette tour ! », a ironisé un internaute en postant une photo de Big Ben, la célèbre tour horloge du palais de Westminster à Londres.
Ahmed invité à la Maison Blanche
Face à l’ampleur de cette polémique, les responsables politiques sont intervenus. «Belle horloge, Ahmed. Tu veux l’apporter à la Maison Blanche ?, a twitté Barack Obama. Nous devrions inciter plus d’enfants comme toi à aimer les sciences. C’est ce qui fait la grandeur de l’Amérique.»
« Les hypothèses et la peur ne font rien pour notre sécurité, elles nous entravent. Ahmed, reste curieux et continue à créer », a, de son côté, réagi Hillary Clinton, candidate démocrate à la Maison Blanche en 2016.
Le jeune Ahmed a par ailleurs été invité à la Google Science Fair, un concours international d’invention pour les scientifiques de 13 à 18 ans. « Ahmed, si par hasard t’avais envie de passer chez Facebook, je serais ravi de te rencontrer », a également déclaré Mark Zuckerberg, le patron du réseau social géant.
Sur un compte Twitter ouvert par la famille d’Ahmed, une photo de l’adolescent souriant et faisant le « V » de la victoire a été publiée pour remercier les internautes qui l’ont soutenu. « Ensemble nous pouvons mettre un terme à l’injustice raciale et empêcher qu’une telle chose se reproduise », assure-t-il.