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Gabon – Ali Bongo Ondimba : « Nous ne reviendrons jamais en arrière ! »

Six ans après son élection, et à quelques mois de la présidentielle prévue en août 2016, Ali Bongo Ondimba (ABO) nous a longuement reçus dans le « salon marocain » du Palais du bord de mer, là où naguère son père accueillait, en toute discrétion, des opposants qui ne repartaient jamais les mains vides. ABO a grandi au cœur de ce qu’il appelle « le temps des girouettes » – une manière délicate de décrire cette époque qu’il a peu goûtée, ces années où la quête et la distribution de postes, de prébendes et de privilèges l’ont emporté sur la nécessité de développer le pays et d’en répartir équitablement les richesses.

« Ali » n’est pas Omar, loin s’en faut. Mais l’élite gabonaise est restée la même et a conservé ses habitudes. Ici, l’essentiel pour les « grands quelqu’un », c’est le pouvoir, celui qui fait tourner les têtes et les cœurs. Un pouvoir utilisé non pas pour construire, mais pour s’enrichir rapidement. Pour s’affranchir de toutes les règles aussi.

La vie politique du Gabon, aussi animée soit-elle, n’a rien d’exaltant. Les amis d’hier s’écharpent aujourd’hui devant les micros, les rôles s’inversent (Zacharie Myboto en démocrate, c’est cocasse !), la mémoire est sélective, et le débat public frôle souvent le niveau de la mer. Il n’empêche. Puisque ici la politique mène à tout le reste, impossible d’échapper à l’actualité : la nomination d’un nouveau gouvernement qu’un grand parti de l’opposition a rejoint et, surtout, la perspective de la prochaine présidentielle, au cours de laquelle ABO, c’est certain, remettra son mandat en jeu.

Le chef de l’État n’a guère de raisons de s’inquiéter. Ses principaux adversaires de 2009 (Pierre Mamboundou et André Mba Obame) ne sont plus de ce monde, et leurs collègues, rejoints par Jean Ping, autrefois ministre des Affaires étrangères d’Omar et président de la Commission de l’Union africaine, passent plus de temps à se glisser des peaux de bananes sous les Berluti qu’à se mobiliser pour une candidature unique de l’opposition.

Reste donc l’essentiel : construire une nation unie (pas seulement dans les discours), prospère (sans pétrole si possible), travailleuse et tournée vers l’avenir. Bref, tenir les promesses de 2009 et répondre aux attentes des électeurs. Entre ceux qui voient en lui l’héritier d’un système dynastique qu’il s’évertuerait à perpétuer et ceux qui l’accusent d’en être le fossoyeur, ABO se retrouve dans une situation paradoxale. Il sait qu’on lui reprochera toujours la même chose : d’être trop dans la rupture ou pas assez. Sur tout cela, il s’exprime franchement. Interview.

Vous venez d’effectuer un important remaniement ministériel, le quatrième depuis votre élection. Le Premier ministre, Daniel Ona Ondo, est maintenu, mais on constate de nombreux changements, avec pas moins de dix-sept nouveaux entrants. Que cela signifie-t-il ?

ALI BONGO ONDIMBA : Nous sommes à un tournant majeur : nous avons fait le choix d’en finir avec la culture de la rente et souhaitons mettre en place une économie moderne, compétitive et créatrice d’emplois. Il s’agit là d’une véritable révolution pour le Gabon et cela ne se fait pas sans difficultés, mais il est temps de mettre le pied sur l’accélérateur et de prendre des risques. Nous ne reviendrons jamais en arrière, et tous ceux qui peuvent nous aider à transformer plus vite notre pays sont les bienvenus.

Est-ce pour cela que vous avez souhaité que des membres de l’Union du peuple gabonais (UPG, opposition) rejoignent le gouvernement ?

J’ai voulu un gouvernement plus large et plus consensuel. Mais je ne fais pas de politique politicienne ; je rassemble toutes les compétences possibles car c’est la seule manière de remplir nos objectifs. Mathieu Mboumba Nziengui, secrétaire exécutif de l’UPG, prend le ministère de l’Agriculture. C’est un poste que nous avions proposé au départ à M. Moukagni-Iwangou [également membre de l’UPG], et, bizarrement, il l’avait accepté avant de se rétracter, sans doute sous la pression d’une partie de l’opposition. Je n’épiloguerai pas sur ce type de comportement qui en dit long sur la probité et le crédit de certaines personnes.

Nous enregistrons également le retour d’un ancien Premier ministre, Paul Biyoghe Mba, ainsi que celui du général de corps d’armée Flavien Nziengui Nzoundou. Ce sont deux éminentes personnalités du Parti démocratique gabonais [PDG] qui apporteront leur expérience aux plus jeunes membres du parti qui ont été appelés. J’ajouterai que les autres formations de la majorité participent aussi de manière plus importante à ce nouveau gouvernement, que le nombre de femmes ministres a doublé, que toutes les régions du pays sont représentées, tout comme la société civile… Ce gouvernement a toutes les cartes en main pour réussir, et il sait qu’il lui faudra obtenir des résultats rapidement.

Six ans après votre élection, qu’est-ce qui a changé au Gabon ?

D’abord le contexte. En 2009, nous étions dans une phase extrêmement difficile, avec un taux de croissance quasi nul. Il était important de relancer le pays. Nous avons réussi dans certains domaines, mais dans d’autres nous devons mieux faire.

À l’époque, j’avais mené campagne sur les thèmes de la paix, du développement et du partage. La paix ? Nous l’avons maintenue. Ce n’était pas acquis et les risques sont toujours présents. Le développement ? On ne peut pas sortir de la dépendance au pétrole en si peu de temps, mais la diversification avance à un rythme soutenu. Le secteur hors pétrole connaît une croissance à deux chiffres et l’agriculture est un domaine en grande progression. Nous avons lancé un certain nombre de programmes, dont le plus important, baptisé « Graine », vise à développer 200 000 ha de terres et à créer 20 000 emplois dans les cinq prochaines années. Son succès dépasse nos prévisions.

Et le partage ? Beaucoup de compatriotes se plaignent de n’avoir pas vu leurs conditions de vie évoluer…

La lutte contre la pauvreté est notre priorité, mais il faut bien comprendre que nous n’avons pas de baguette magique. Nous avons d’abord cherché à élaborer un véritable diagnostic. Tout le monde avançait des chiffres, mais on ne savait pas où se situaient les poches les plus importantes de pauvreté. Un rapport a donc été rédigé par une commission dirigée par la première dame. Ce rapport, qui est une radiographie de la pauvreté dans notre pays, je l’ai rendu public.

Nous avons ensuite voulu agir sur plusieurs axes. D’abord revoir les allocations, les aides directes, puis lancer un programme global pour mettre en place des activités génératrices de revenus. Sur les trois prochaines années, nous allons investir l’équivalent de 400 millions d’euros. Nous sommes également extrêmement attentifs à la question des jeunes. Nous leur proposerons par exemple, pour mieux se former, d’aller en apprentissage dans des entreprises, aux frais de l’État. Dans le même registre, nous venons d’élaborer une nouvelle grille de salaires pour tous les agents publics. L’augmentation moyenne est de 30 %. Pour les bas salaires, elle est même de 100 %.

La chute des cours du pétrole permet-elle de mener ce genre de politiques ?

Il est évident que nous avons des choix à faire et que certains pourront paraître douloureux. Mais je ne souhaite pas que l’on touche au volet social et à l’éducation. Nous allons également maintenir l’effort sur les infrastructures et sur l’énergie dans le cadre de la diversification de l’économie.

Soyons clairs : pour lutter contre la précarité, il faut une meilleure redistribution des richesses.
Quel taux de croissance attendez-vous pour cette année ?

Nous espérons approcher 4,5 %. Et nous visons une croissance située entre 5 % et 7 % au cours des prochaines années.

Vous attendiez-vous, lors de votre arrivée au pouvoir, à tant de résistance ? Les anciens barons du PDG, qui sont devenus vos adversaires les plus farouches et ont rejoint l’opposition radicale, la multiplication des grèves dans le secteur public…

Ma surprise ne se situe pas sur le plan politique. Les acteurs, je les connais et ils me connaissent depuis des années. J’ai été plus surpris par la réaction de l’administration face aux réformes engagées. Soyons clairs : pour lutter contre la précarité, il faut une meilleure redistribution des richesses. En réformant, par exemple, le système de primes, nous sommes passés de 9 000 à 30 000 bénéficiaires. La solidarité et la performance, tout le monde en parle, mais certains privilégiés n’en voulaient pas ! Avec le nouveau système de rémunération, plus juste, les revendications du secteur public n’ont plus lieu d’être.

Comment expliquez-vous que tant de personnalités dont vous étiez proche aient choisi de se dresser contre vous ?

Je ne prétends pas lire dans les têtes et les cœurs. Posez-leur la question ! En tout cas, je ne vois pas de raisons objectives liées à notre gouvernance. Quand on entend certaines hommes politiques dire que l’on va dans le mur, que le pays est ruiné, que les caisses sont vides… Tous les indicateurs montrent pourtant que nous progressons, toutes les agences de notation nous ont donné des appréciations positives. Nous avons créé des emplois et corrigé des inégalités. Nous venons de réaliser la plus grosse augmentation de salaires depuis des décennies, nous diversifions l’économie, nous développons les infrastructures, nous avons triplé le nombre de boursiers, nous avons construit plus de 650 salles de classe et largement investi dans l’université… Nous avons bel et bien progressé, personne ne peut dire le contraire !

Vos opposants vous reprochent aussi votre parcours « dynastique », votre train de vie, l’absence de réelle démocratie…

Vous connaissez beaucoup de chefs d’État en Afrique qui sont vilipendés comme je le suis par des gens qui ne sont pas inquiétés ? Nous avons mis en place le Conseil national de la démocratie pour que l’on puisse discuter librement et sereinement. Nous avons également avancé en matière électorale avec la biométrie.

Quant à la question dynastique : ne me suis-je pas présenté à une élection où il y avait deux dizaines de candidats ? Ne me suis-je pas soumis au suffrage universel direct et le peuple n’a-t-il pas exprimé souverainement son choix ? Je n’ai pas hérité du fauteuil que j’occupe. J’ai participé à une élection, avec un projet qui a retenu l’attention des Gabonais.

L’opposition se méfie des institutions chargées de surveiller le processus électoral et exige une conférence nationale…

C’est un subterfuge. Depuis deux décennies, le code électoral n’a fait qu’évoluer en tenant compte des demandes de l’opposition. Les règles du jeu sont les mêmes pour tout le monde ! Quand certains candidats de l’opposition gagnent un scrutin avec le même code électoral, la même commission électorale, la même Cour constitutionnelle, comme par hasard, il n’y a aucun problème… Alors une conférence nationale pour quoi faire ? À la demande de la classe politique, nous avons mis en place le Conseil national de la démocratie. Maintenant que l’institution est là, ils n’en veulent plus. Ici, ceux qui perdent une élection ne se remettent jamais en cause.

Que pensez-vous de certaines attaques lancées contre vous, sur votre filiation par exemple ?

Je suis étonné de voir certains hommes politiques dont j’appréciais jadis la hauteur de vue plonger ainsi dans les bas-fonds. Cela ne les honore pas et souligne la faiblesse de leur pensée, l’absence d’arguments sur le fond ainsi qu’une pauvreté morale désolante. Certains me côtoient depuis des décennies. Ils n’avaient jamais eu le courage d’aller voir Omar Bongo de son vivant pour lui dire : « Ton fils n’est pas ton fils, tu ne vas pas nous imposer quelqu’un que tu es allé chercher ailleurs ? » Soyons sérieux. Et si je n’ai pas voulu m’exprimer publiquement sur cette question, c’est parce que je ne veux pas m’abaisser au niveau de ces médiocres – pour rester poli.

Votre parti a connu d’importants soubresauts, avec l’apparition de dissidences et de courants très autonomes. Votre principal adversaire pour 2016, n’est-ce pas finalement le PDG lui-même ?

Depuis 1990, c’est loin d’être la première fois que nous enregistrons des départs. C’est un peu dans notre culture, hélas ! Je n’ai pas ce que je veux, donc je m’en vais, quitte ensuite à monnayer mon retour… Les ambitions des uns et des autres peuvent les conduire à estimer qu’ils n’ont plus leur place parmi nous. Nous en prenons acte et continuons notre route. Enfin, les débats, parfois vifs, ont toujours existé au PDG. Et c’est tant mieux. Le parti n’est pas au bord de l’implosion, et, lorsque le moment sera venu, nous serons en ordre de bataille.

Votre père vous avait-il prévenu du possible basculement dans l’opposition de certains des barons du parti ?

Depuis trente ans, je suis témoin de ces allers-retours. Dans la pièce où nous parlons, dans ce fameux salon marocain de la présidence, passaient en catimini le soir ceux qui criaient dans la journée… J’ai été bien élevé et mon père m’a enseigné la discrétion. Il y a donc des choses que je ne dis pas. Mais je les voyais et ils me voyaient. Ils savent que je sais. Moi, je suis totalement à l’aise. Peuvent-ils en dire autant ?

Omar Bongo Ondimba disait toujours que le pardon est la meilleure vengeance. J’applique le principe…
La réhabilitation, en février, de l’Union nationale, dirigée par Zacharie Myboto et feu André Mba Obame, a surpris. Quel était votre objectif ?

Omar Bongo Ondimba disait toujours que le pardon est la meilleure vengeance. J’applique le principe…

Les relations entre le Gabon et la France se sont considérablement tendues : saisie de l’avion présidentiel, arrestation à Paris de votre directeur de cabinet, Maixent Accrombessi, diffusion dans la presse d’écoutes téléphoniques entre Michel Tomi et vous… Que se passe-t-il ?

Devant une telle énumération, il serait étonnant que nous n’en venions pas à nous poser la question d’une volonté manifeste de déstabilisation du Gabon. Pourquoi et au profit de qui ? Je pense que c’est le fait de groupes de pression qui, visiblement, ont la nostalgie de l’ancienne époque et tentent de polluer l’atmosphère pour créer une situation d’extrême tension et de crise. L’essentiel est que la relation d’État à État soit bonne, et je n’ai pas de problème avec le président de la République française.

Certains prétendent que derrière ce que vous appelez tentatives de déstabilisation se cachent les milieux d’affaires de la Françafrique qui goûtent peu d’avoir perdu des parts de marché au Gabon…

Je ne vous ferai pas l’injure de vous répondre que je n’ai pas entendu cela. Nous avons répété, à plusieurs reprises, que la France était un partenaire privilégié, mais les efforts doivent être fournis des deux côtés. Tous les pays du monde diversifient leurs partenariats. La France, elle, cherche d’autres partenaires en Afrique et dans le monde, et l’on ne s’en émeut pas pour autant. Dans nos efforts de diversification, nous préservons les intérêts qui sont les nôtres, point final.

Tout de même… Entre la saisie de votre avion, le placement en garde à vue de votre plus proche collaborateur et les écoutes téléphoniques… On a du mal à croire que le pouvoir politique soit étranger à tout cela !

Nous nous en tenons à ce que les autorités françaises nous disent : il n’y a aucune volonté de déstabiliser le Gabon. Mais évidemment, nous nous posons des questions. Dans la presse française, on écrit plus sur le Gabon que sur certains pays européens, on écrit plus sur la famille Bongo que sur d’autres dirigeants, pourtant plus proches géographiquement. D’où vient cet intérêt considérable porté à un petit pays comme le Gabon et à son chef d’État ?

Quelle a été votre réaction lorsque vous avez appris l’arrestation de Maixent Accrombessi ?

D’après vous ? C’est le directeur de cabinet du président de la République gabonaise. S’il lui avait été demandé de se présenter lui-même pour répondre à des questions, il l’aurait fait. Clairement, la manière employée visait à humilier. La question est : pourquoi a-t-on voulu humilier le Gabon ?

Une conséquence du redressement fiscal adressé à Total ? Un message adressé au moment où se joue, entre autres, la reconduction de la convention avec Veolia ?

Cela fait plusieurs décennies que l’on nous reproche, à nous les Africains, un manque de transparence et de bonne gouvernance, mais lorsque nous voulons agir, comme cela se fait dans tous les autres pays du monde, on nous tombe dessus ! Les redressements, les audits, les vérifications de l’administration fiscale, dans quels pays cela n’existe pas ? Les entreprises françaises ne sont pas les seules à être auditées au Gabon et personne ne doit y voir une quelconque forme d’hostilité ! J’espère, en tout cas, que cela n’est pas un prétexte à tout ce à quoi nous assistons. Nous sommes un État souverain. Notre indépendance doit être respectée, j’y veillerai.

Quelles relations entretenez-vous avec vos voisins camerounais, congolais ou équato-guinéen ? On les dit fraîches…

Là encore, il faut s’attacher aux faits. Nous n’avons aucun problème, nous travaillons ensemble, d’où les avancées sur le dossier centrafricain par exemple. Je connais les chefs d’État de tous ces pays et ils me connaissent depuis longtemps, c’est un avantage.

Votre père a connu une très longue et éminente carrière « africaine », si l’on peut dire. Comment concevez-vous le rôle diplomatique du Gabon sur le continent. Souhaitez-vous marcher sur ses traces ?

J’ai hérité de lui un excellent carnet d’adresses et une philosophie. Je continue à maintenir de bonnes relations avec tout le monde. Je vais donc dans le même sens, mais à ma manière, plus discrète.

Deux Coupes d’Afrique des nations (CAN) organisées en cinq ans au Gabon, en 2012 puis en 2017. N’est-ce pas trop ?

C’est trop si cela ne sert qu’à organiser une compétition sportive, fût-elle d’envergure. La CAN 2012 nous a permis d’obtenir notre meilleur taux de croissance cette année-là : le volet sportif est la partie visible de l’iceberg, mais l’essentiel demeure les projets d’infrastructures, les routes, les hôpitaux, les hôtels, le développement des services, la 4G, la fibre optique, etc. La CAN, c’est un accélérateur de projets.

Jeune Afrique a récemment publié un article consacré à l’éventuelle xénophobie des Gabonais (J.A. no 2851, du 30 août au 5 septembre 2015). Cela a suscité une immense polémique dans votre pays. Le sujet est visiblement sensible…

Que l’on apprécie ou pas votre article, celui-ci a eu le mérite de poser le problème. Nous avons constaté une dérive nauséabonde depuis plusieurs années, notamment de la part de certains hommes politiques qui font de la haine de l’autre, qu’il soit étranger ou qu’il appartienne à une autre ethnie, un véritable fonds de commerce. Est-on prêt à tout pour accéder au pouvoir ?

En septembre 2012, j’ai prononcé un discours devant les deux chambres du Parlement réunies en Congrès afin de souligner qu’il y avait là des éléments dangereux pour la cohésion nationale. J’ai demandé que la loi punisse sévèrement ceux qui formuleraient des propos racistes, xénophobes ou ethnicistes, et cela n’a pas été fait. C’est la preuve qu’il y a bien un problème… Le Gabon a toujours été un pays d’immigration. Beaucoup de Gabonais sont issus de mélanges, et pourtant certains parlent encore de « pureté » !

Vous avez annoncé, le 17 août, que vous alliez céder les revenus issus de votre part d’héritage à la jeunesse gabonaise. Pourquoi ?

Personnellement, cela fait six ans que je vis sans cet héritage, alors pourquoi ne pas continuer à faire sans ? Pourquoi ne pas faire en sorte qu’il profite aussi à d’autres ? Cela fait longtemps que j’y pensais, mais il a fallu débloquer une succession délicate, et je l’ai fait dans le cadre familial. Je ne suis pas seul dans cette affaire et la seule manière de procéder était de céder ce dont je dispose personnellement, c’est-à-dire les revenus de ma part, mais je peux dire que je jouis d’un très large soutien de la part de mes frères et sœurs. Il me semblait enfin évident que les bénéficiaires devaient être les jeunes Gabonais, car nous sommes tous les héritiers d’Omar Bongo Ondimba.

Quand on n’est plus capable de donner, il faut en tirer les conséquences et savoir se retirer.
Cette annonce a suscité des critiques parmi les anciens proches de votre père, aujourd’hui dans l’opposition…

Ma décision n’a pas vocation à faire jurisprudence, mais ceux qui, hier, ont profité de la générosité d’Omar Bongo devraient réfléchir… Puisqu’ils professent leur amour des Gabonais tous les jours, ils peuvent aussi faire des sacrifices en signe de solidarité…

Quelle limite vous fixez-vous ? Si vous êtes réélu, que ferez-vous en 2023 ?

L’expérience nous enseigne la plus grande prudence quand on parle de l’avenir. Seul Dieu le connaît ! Je suis cependant conscient du fait qu’il faille être attentif au risque d’usure. Quand on n’est plus capable de donner, il faut en tirer les conséquences et savoir se retirer.

Envisagez-vous vraiment votre vie après le pouvoir ?

Heureusement que oui ! Je sais trop ce que c’est, la proximité du pouvoir. Je sais ce que cela représente comme sacrifices, les restrictions que cela vous impose. Je vous rassure, j’aimerais aussi profiter de ma famille, avoir des loisirs… Bref, vivre normalement.

ABO intime

Votre film préféré ?

Je suis bon public. J’ai grandi avec Le Parrain, La Guerre des étoiles ou Indiana Jones, et j’aime les revoir pour me détendre.

Votre style musical préféré ?

Le jazz.

La couleur ?

Le bleu ou le vert, selon mon humeur.

La destination, hors Gabon ?

Joker.

Votre héros dans la vie réelle ?

Celui qui m’a façonné, mon père.

La qualité qui vous semble essentielle chez un homme ?

L’honnêteté.

Et chez une femme ?

Idem.

Quel club de football soutenez-vous ?

Le Real Madrid, l’AC Milan et le Bayern de Munich.

Votre idée du bonheur ?

De petites choses… Après une bonne journée de travail, être chez moi avec ma famille et écouter du jazz sur la terrasse, ou jouer de la musique.

Marwane Ben Yahmed

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