La clôture du Gabon Forum citoyen organisé par le quotidien français ‘’Libération’’ avec un thème consacré à la pratique du journalisme en Afrique nous donne l’occasion de revisiter la liberté de la presse au Gabon.
Au-delà de toutes réactions partisanes, de tous préjugés, il convient de faire une lecture lucide avec un regard critique qui permet de rappeler succinctement les acquis et les défis à relever par le Gabon dans le domaine de la presse.
Rappel
Depuis 1990, le Gabon, à l’instar des pays francophones de l’Afrique noire, a choisi la démocratie comme mode de gestion étatique. Ce choix s’est matérialisé par l’organisation de la conférence nationale qui a conduit à la libéralisation de la parole et donc la démocratie, synonyme de liberté de la presse. Depuis cette date jusqu’à nos jours, vingt cinq ans se sont écoulées. Qu’en est-il réellement de la liberté de la presse au Gabon ?
Les atouts
Il est indéniable que le secteur médiatique au Gabon dispose de nombreux atouts enviables et enviés sous d’autres cieux. Loin de nous l’intention d’exposer exhaustivement les atouts du Gabon dans ce domaine, nous voulons toutefois rappeler certains avantages qui singularisent le pays dans la sous-région. Parmi ces avantages, figure en bonne place la subvention d’aide à la presse qui s’élève à 500 millions depuis plus de deux décennies. Cette subvention est un appui que le gouvernement apporte aux médias qui constituent pourtant des entreprises individuelles. Elle a d’ailleurs été réévaluée à 2 milliards de FCFA et devient le fonds d’aide à la presse grâce à la volonté des autorités actuelles.
La diversité de ton dans le paysage médiatique gabonais est également un atout avéré. Comparativement à leurs confrères d’ailleurs notamment ceux des pays frontaliers, les journalistes gabonais s’illustrent de plus en plus dans différentes tonalités. Cette différence a d’ailleurs donné naissance à deux catégories de médias : la presse proche du pouvoir qui se montre moins critique et parfois partisane du régime en place et la presse proche de l’opposition, très critique et parfois virulente face au parti au pouvoir.
Aussi, malgré les griefs, il convient de reconnaitre également qu’aucun journaliste ne séjourne dans une prison actuellement au Gabon. Sous d’autres cieux, une critique à l’endroit du Chef de l’Etat, un ministre ou autres personnalités constitue un motif légal d’arrestation et d’emprisonnement d’un journaliste. Au Gabon, certains médias se sont spécialisés dans ce registre. Au-delà de la critique de l’action publique, ils n’hésitent pas à faire recours à l’injure, l’invective, la diffamation et la violation de la vie privée des citoyens. Le Gabon peut se targuer actuellement de ne pas avoir un journaliste emprisonné sur son territoire.
Les défis à relever
Malgré les acquis énumérés plus haut, il est également évident que le pays doit relever certains défis afin de respecter et de consolider la liberté de la presse.
Au titre de ces défis, l’adoption d’une loi qui garantit l’accès à l’information dans les administrations publiques et privées. En effet, l’administration gabonaise, dans sa globalité, cultive généralement la rétention de l’information. L’accès à un document dans un ministère ou autre administration constitue parfois un obstacle difficile à contourner. Cette situation explique, en parti, pourquoi certains confrères publient des informations sur la base des rumeurs.
L’absence d’un statut particulier adapté aux journalistes constitue aussi l’une des faiblesses. Ce statut particulier devrait non seulement assurer la protection des journalistes dans l’exercice de leur métier, mais aussi leur permettre de bénéficier de certains avantages liés à la pratique du journalisme.
Aussi, si l’on peut se féliciter du fait qu’aucun journaliste ne séjourne en prison au Gabon, il n’en demeure pas moins que la pratique de ce métier constitue de plus en plus un danger dans notre pays. Les arrestations illégales ainsi que les menaces à l’endroit des professionnels de l’information sont courantes. Dans le même sens, certaines rédactions subissent des destructions sans que les auteurs ne soient inquiétés.
Aucune loi ne protège les journalistes dans l’exercice de leur activité professionnelle. Un vide juridique qui nécessite d’être comblé.
Au regard de ce qui précède, il convient de reconnaitre que le Gabon a pris de l’avance par rapport aux pays de la sous-région et que de nombreux défis restent encore malheureusement à relever afin de consolidé la liberté de la presse.