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Présidentielle au Gabon: guerre des nerfs entre Bongo et Ping à la veille des résultats

La guerre des nerfs va se poursuivre lundi au Gabon à la veille de la proclamation prévue des résultats de l’élection présidentielle entre le président sortant Ali Bongo Ondimba et son principal rival Jean Ping qui s’est autoproclamé vainqueur.

« Je suis l’élu. J’attends que le président sortant m’appelle pour me féliciter », a déclaré M. Ping dimanche à Libreville devant la presse et des milliers de partisans euphoriques.

« Les tendances générales nous donnent vainqueurs », a insisté l’ex-patron de l’Union africaine (UA), dans ses premières déclarations publiques depuis la clôture du scrutin à un tour de samedi.

Son entourage revendiquait dimanche soir 60% des voix sur 60% des inscrits, une estimation impossible à vérifier tout comme la participation.

M. Ping, un ex-cacique du régime âgé de 73 ans, prétend renverser la dynastie Bongo, au pouvoir depuis 1967 dans le petit Etat pétrolier d’Afrique centrale qui souffre de la chute des prix du baril.

Ce métis de père chinois et de mère issue de l’ethnie Myéné a été plusieurs fois ministre sous l’ex-président Omar Bongo, au pouvoir pendant 41 ans jusqu’à sa mort en 2009 et l’élection de son fils Ali.

« Vous avez déjoué les pièges de la fraude congénitale de ce régime que nous accompagnons enfin dignement vers la sortie », a lancé Jean Ping, par ailleurs ex-compagnon d’une fille d’Omar Bongo.

Après ce discours, M. Ping a été reçu à l’ambassade de France à sa demande, a indiqué l’entourage du candidat.

– Rues quasi désertes –

En France, ex puissance coloniale, le Parti socialiste (PS, au pouvoir) a prévenu dans un communiqué qu’il serait d’une « extrême vigilance » à l’heure des résultats, ajoutant: « Voilà plus d’un demi-siècle que la famille Bongo gouverne le Gabon. Une alternance serait signe de bonne santé démocratique et un exemple ».

« L’auto-proclamation de monsieur Ping (…) est grave et dangereuse », a condamné le porte-parole d’Ali Bongo, Alain-Claude Bilie-By-Nze dans un communiqué.

Le ministre de l’Intérieur Pâcome Moubelet-Boubeya a dénoncé « une tentative de manipulation du processus démocratique », rappelant que seuls valaient les résultats qui doivent être officiellement annoncés par la commission électorale « ce mardi 30 août vers 17h00 » (16H00 GMT).

Face à l’empressement de M. Ping, le président sortant a joué la carte de la sérénité et de la légalité: « Nous sommes légalistes et nous sommes républicains donc nous attendons sereinement que la Cénap (commission électorale, ndlr) annonce les résultats de l’élection », a déclaré Ali Bongo devant des supporteurs pour sa première prise de parole depuis le vote.

Son porte-parole a réaffirmé que M. Bongo était « en tête avec une avance qui ne peut plus être inversée ».

Redoutant des troubles comme en 2009 après la première élection d’Ali Bongo, beaucoup de Librevillois restaient chez eux, après avoir fait des stocks de nourriture les jours précédents.

Les rues et les plages de la capitale étaient quasi-désertes dimanche, après une nuit sans incident signalé.

– ‘Poudrière’ –

L’ambassade de France a recommandé aux Français établis au Gabon « d’éviter de se déplacer, sauf nécessité avérée, et de se tenir informés de la situation ».

Dans la matinée, les fidèles se sont rendus à la messe, mais moins nombreux que d’ordinaire.

A l’église catholique Saint-Michel, l’abbé Michel-Ange Bengone a lancé un « vibrant appel aux organisateurs (du scrutin) et aux forces de défense à respecter le verdict des urnes et la Constitution ».

« Ca donne l’impression qu’on est assis sur une poudrière et que ça peut se déclencher à n’importe quel moment, si le perdant n’accepte pas sa défaite », a confié à l’AFP un fidèle, Emmanuel Edzang.

En 2009, la victoire d’Ali Bongo Ondimba avait été contestée par l’opposition surtout dans la capitale économique Port-Gentil (plusieurs morts, couvre-feu, consulat de France incendié).

Avant même la fermeture des bureaux de vote samedi, les deux camps se sont accusés mutuellement de fraudes, comme à chaque élection présidentielle depuis le rétablissement du pluralisme politique en 1990.

Les observateurs de l’Union européenne (UE) qui ont supervisé le scrutin doivent s’exprimer lundi à 13h00 (12h00 GMT).

Les pro-Ping ont accusé le président sortant de préparer « une tentative de passage en force » avec l’armée: « L’élection est finie, le coup d’Etat a commencé », a lancé son directeur de campagne Jean-Gaspard Ntoutoume.

« Totalement farfelu », a aussitôt répliqué le porte-parole d’Ali Bongo.

Par Célia LEBUR et Samir TOUNSI
AFP

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