Les Gabonais se sont calfeutrés chez eux dans l’attente du résultat officiel de la présidentielle qui pourrait intervenir dans la nuit. Le camp du président sortant Ali Bongo et celui de l’opposant Jean Ping revendiquent chacun la victoire.
Rues désertes avant la nuit, forces de sécurité aux aguets, nouvelles proclamations et autres invectives… Par crainte des violences, les Gabonais se sont calfeutrés chez eux, mardi 30 août, sans attendre le verdict officiel de la présidentielle qui pourrait tomber tard dans la nuit.
Alors que la Commission électorale nationale (Cénap) doit annoncer qui du président sortant Ali Bongo ou de l’ex-patron de l’Union africaine (UA) Jean Ping a remporté le scrutin de samedi, « l’ambiance est assez tendue dans Libreville, rapporte Patrick Fandio, envoyé spécial de France 24 au Gabon. La police anti-émeute a été déployée aux points stratégiques de la capitale, où des blindés légers barrent quelques routes autour du palais présidentiel notamment. Libreville est méconnaissable, fantomatique depuis le milieu de l’après-midi de ce mardi. »
« LES DÉBATS RISQUENT DE DURER PLUSIEURS HEURES »
Habitués à la paix civile, les Gabonais n’ont pas oublié qu’en 2009 des violences post-électorales meurtrières avaient éclaté à Port-Gentil, la capitale économique. Sur son site internet, l’ambassade de France a « demandé aux ressortissants français d’éviter tout déplacement ce mardi 30 août à compter de 14 h ».
Dès lundi, les deux camps ont engagé un bras de fer psychologique en revendiquant chacun la victoire. Lors de sa deuxième conférence de presse en moins de 24 heures, Jean Ping, persuadé d’avoir été élu, a réclamé rien de moins que la reddition de son rival Ali Bongo. De son côté, l’entourage du président évoquait lui aussi une « avance » lui garantissant la victoire. Le secrétaire général des Nations unies Ban Ki-moon a appelé les deux candidats pour leur transmettre « sa préoccupation concernant des déclarations prématurées sur l’issue des élections ».
Le bal des invectives a cependant continué. Le porte-parole du gouvernement, Alain-Claude Bilie-By-Nze, a dénoncé « des ingérences multiples » au bénéfice de Jean Ping. Dans son collimateur : la France mais aussi un conseiller du président ivoirien, Alassane Ouattara, accusé d’avoir voulu « faire démissionner des membres de la commission électorale (Cénap) par corruption ». La réaction ne s’est pas fait attendre à Abidjan où la présidence, réputée proche de la famille Bongo, a annoncé avoir limogé le conseiller en question.
Concernant la France, Alain-Claude Bilie-By-Nze s’en est pris à Éric Moutet, l’avocat français de Jean Ping qui a revendiqué la victoire de son client à la présidentielle. Mais aussi au Parti socialiste français qui, dans un communiqué, a affirmé que l’alternance au Gabon serait « serait signe de bonne santé démocratique et un exemple ».
Pour sa part, l’équipe de campagne de l’opposant a réaffirmé mardi sa « victoire ». Jean Ping « possède une avance de 60 000 voix sur Ali Bongo » qui sera « impossible à rattraper » sauf « fraude massive », a fait savoir son directeur de campagne. Selon le décompte avancé par le camp Ping, le candidat de l’opposition obtiendrait 59,32 % des suffrages (166 822 voix), loin devant son rival le président sortant, avec 37,97% (106 787 voix).
De son côté, le ministère de l’Intérieur a une nouvelle fois rappelé en fin de journée que la publication de résultats non validés par la Cénap était illégale.
La présidentielle qui s’est déroulée samedi dans le calme opposait le président sortant Ali Bongo Ondimba à neuf autres candidats, dont Jean Ping, ancien cacique du pouvoir gabonais.
Avec AFP