Au Gabon, le compte à rebours est enclenché. Les neuf magistrats de la Cour constitutionnelle ont jusqu’au 23 septembre pour instruire et trancher sur les recours déposés par l’opposition suite à la réélection contestée d’Ali Bongo. La confrontation des procès-verbaux de la province du Haut-Ogooué où Ali Bongo a obtenu 95% des voix sera décisive. Le camp d’Ali Bongo a jusqu’à ce soir pour déposer, devant la Cour constitutionnelle, sa réponse argumentée aux anomalies signalées par l’opposition.
Dans le dossier du camp d’Ali Bongo, il y a les 297 procès verbaux du Haut-Ogooué que la majorité dit avoir rapporté des bureaux de vote de cette province. Les avocats d’Ali Bongo comptent également profiter de leur droit de réponse pour signaler des fraudes supposées de l’opposition, cette fois, notamment à Omboué, Bitam et certains quartiers de Libreville.
Ces pièces seront transmises au juge désigné pour examiner le recours de l’opposition. Il les remettra à son tour aux avocats de Jean Ping. Chaque camp connaîtra alors les armes de l’autre et aura, de nouveau, la possibilité de répondre aux accusations.
Une audience publique cruciale et très attendue
Après avoir épuisé les arguments des deux parties, le juge devra convoquer une audience très attendue, publique et retransmise en direct à la télévision. Le magistrat devra y présenter son rapport final, avant un vote à bulletin secret des 9 juges. Ce vote permettra de trancher sur la validité ou non de la victoire du président sortant Ali Bongo.
Cette audience finale ne devrait pas avoir lieu avant la semaine prochaine, confie une source bien informée. D’ici là, des rebondissements ne sont pas à exclure vu l’antagonisme des deux parties. Chaque camp accusant l’autre de fraude et de falsification de résultats. Les juges ont jusqu’au 23 septembre pour rendre leur décision.
Les arguments du camp d’Ali Bongo
Ali Akbar Onanga Yobégué, président du comité juridique d’Ali Bongo, revient sur les principaux arguments qui vont être soumis à la Cour constitutionnelle : « Monsieur Jean Ping conteste les résultats de la province du Haut-Ogooué. Nos arguments consistent simplement à dire à Monsieur Jean Ping que lui n’a pas tous les procès-verbaux. Nous, nous les avons tous…[…] Nous en avons 297. Lui en a 174. Vous voyez bien qu’il y a un déficit de plus d’une centaine. Et encore, je vous signale que dans les procès-verbaux, les fameux 174, du moins ce qui nous a été communiqué, nous n’avons pu exploiter que près d’une centaine. Le reste est inexploitable. Tantôt, c’est illisible ; tantôt ce sont des faux grossiers. Et nous entendons dénoncer tout cela. Deuxième angle, nous avons nous-mêmes découvert que, même dans les autres localités pour lesquelles Monsieur Jean Ping ne demande pas de recomptage, il y a eu des manipulations. Nous avons un procès-verbal du bureau de vote sur la province de l’Estuaire, deuxième arrondissement de Libreville, où les voix sont reportées en faveur de Monsieur Ping et, pour ce bureau, le procès-verbal a été signé d’un représentant de Monsieur Ping pour le compte du président de la commission du camp de l’opposition, du camp de la majorité une seule personne a signé. Et c’est ce genre de chose que nous découvrons au fur et à mesure que nous avançons. »
Le CND critiqué par le camp de Ping
Au Gabon, l’opposition réagit aux inquiétudes sécuritaires lancées par le Conseil national de la démocratie (CND). René Ndemezo’o Obiang, le directeur de campagne du candidat de l’opposition Jean Ping, estime que le Conseil national de la démocratie, structure relancée par Ali Bongo pour favoriser le dialogue entre les partis politiques gabonais, devrait plutôt encourager la Cour à procéder à un recomptage des voix plutôt que de lancer un appel au calme. «Je ne pense pas qu’à l’heure présente, il y ait des manifestations violentes particulières dans le pays. Je crois qu’aujourd’hui, les gens sont en attente du rendu de la Cour constitutionnelle. Et il serait tout à fait normal pour les gens du CND, qui pensaient être à la tête d’une institution visant à promouvoir la démocratie, de se prononcer sur la question précise de savoir si, oui ou non, il est nécessaire que la Cour procède au comptage des voix. Sur cette question, Monsieur Ndaot ne s’exprime pas et préfère s’exprimer sur la question des affaires locales. C’est donc une façon de se dérober…».