Initialement prévue au début du mois, la rentrée scolaire des élèves gabonais doit finalement avoir lieu le 31 octobre, deux semaines après celle des professeurs. Quant à l’année universitaire, elle commencera le 17, a-t-on appris jeudi après le Conseil des ministres.
L’annonce était très attendue par les parents d’élèves, gagnés par l’exaspération après le retard pris dans le calendrier scolaire, et agacés de voir les cours reprendre dans certaines écoles privées de la capitale.
Pour autant, pas sûr que les salles de classes se remplissent dans les semaines à venir. Dans la foulée du Conseil des ministres, Dynamique unitaire, plateforme syndicale opposée à la réélection d’Ali Bongo Ondimba a lancé un appel à la grève dès la rentrée scolaire.
Conditions de travail et paiement des salaires
Les revendications du syndicat n’ont pas changé depuis le mouvement social de l’an passé. Ils réclament à nouveau une amélioration des conditions de travail des enseignants et le paiement des arriérés de salaires et des primes non versées aux professeurs.
« Nous demandons aussi de meilleures structures d’accueil : entre 150 à 200 élèves s’entassent parfois dans les salles de classe, les établissements n’ont plus la capacité d’absorber les nouveaux arrivants », dénonce le syndicaliste Marcel Libama, l’un des représentants de la Convention nationale des syndicats du secteur éducation (Conasysed), membre de Dynamique unitaire.
« Je vais suivre cet appel, car les problèmes s’accumulent au fil des années et des gouvernements, sans être réglés », déplore depuis Libreville une professeure de français syndiquée, qui ne souhaite pas être identifiée. Dans son lycée, cette enseignante assure parfois donner cours à plus de 100 élèves dans une même salle. « Comment effectuer un suivi correct des élèves dans ces conditions ? », s’interroge-t-elle d’un ton amer.
« Nous demandons la libération des personnes injustement détenues »
Autre revendication de la plateforme syndicale : la libération des personnes interpellées suite à la crise post-électorale née de la réélection contestée d’Ali Bongo Ondimba à un deuxième septennat. Le 31 août, l’annonce des résultats de la présidentielle avait provoqué une flambée de violence meurtrière inédite à Libreville, où entre 600 et 800 personnes avaient été arrêtées.
Des interpellations dénoncées par Dynamique unitaire, qui exige la libération des leaders syndicaux interpellés. Et notamment celle de Sylvie Nkogue Mbot, syndicaliste et docteure arrêtée le 6 octobre après s’être rendue à l’hôpital militaire de Libreville dans le cadre d’un rapport sur les victimes de violences post-électorales, explique l’un de ses avocats, Maître Éric Moutet.
« Nous demandons la libération provisoire et immédiate de nos collègues détenus », prévient ainsi Jean-Rémy Yama, président de Dynamique unitaire, contacté par Jeune Afrique. Ce syndicaliste enseignant a lui-même été libéré le 6 octobre après avoir passé trois mois en détention pour troubles à l’ordre public, une accusation selon lui liée à son « engagement politique contre la réélection d’Ali Bongo ».
« L’école ne doit pas être prise en otage »
Le ministre de l’Éducation, Florentin Moussavou, sera donc à nouveau confronté à la colère de certains enseignants. « Je souhaite que nos compatriotes syndiqués fassent la différence entre ces revendications et puis la réalité de la chose scolaire. Nous voulions cette année que chacun comprenne que l’école ne doit pas être prise en otage », avait affirmé Florentin Moussavou à l’Agence France Presse en milieu de semaine.
Quelques heures plus tard, c’était au tour du nouveau Premier ministre, Emmanuel Issoze-Ngondet, de déclarer la rentrée scolaire comme l’une de ses « mesures prioritaires pour les 100 premiers jours du nouveau gouvernement ». Des déclarations destinées à rassurer les parents d’élèves, sans toutefois parvenir à convaincre les représentants syndicaux. Pas moins de 750 000 élèves du primaire et du secondaire sont concernés, selon les chiffres du ministère de l’Éducation donnés à l’AFP.
Claire Rainfroy