Après le procès au cours duquel l’ex-propriétaire de Kanal 7 a été condamné à payer 10 millions de francs à son gérant légal, décision frappée d’une exécution provisoire. L’appel introduit par Blaise Louembé soulève des arguments que les deux parties contestent.
L’ancien journaliste au quotidien L’Union, Jean-Claude Jisse Mouidy-Mouidy est bien décidé à rentrer dans ses droits. Le gérant légal de la télévision privée Kanal 7, depuis 2009, qui revendique son implication dans la création juridique de cette structure a choisi de briser la discrétion et mettre sur la place publique le contentieux l’opposant à l’actuel ministre de l’égalité des chances, Blaise Louembé. Ce dernier qui conteste la décision de la justice a opté pour une action en appel, plutôt que de le payer.
Le parquet saisi dans le cadre de cette affaire avait rendu le 12 avril 2016, un délibéré condamnant Blaise Louembe à payer à Jean-Claude Jisse Mouidy Mouidy la somme de 10 millions de francs, au titre des actes accomplis pour le compte de Kanal 7, notamment la production des pièces administratives pour son existence juridique. Il avait ordonné par ailleurs l’exécution provisoire de la décision, nonobstant toutes voies de recours. Une décision à travers un huissier aurait même été commis pour une levée sur les comptes du ministre, mais les banques n’auraient pas coopéré.
Rappelons pour les faits, qu’après avoir accepté la proposition de gérer Kanal 7 en 2009, alors que son profil convenait pour être désigné gérant et ainsi faire aboutir favorablement la démarche entreprise par le fondateur auprès des instances habilitées, Jisse Mouidy-Mouidy en sera reconnu comme tel par une décision n°000025 CNC/de 2010 autorisant la chaine de télévision Kanal 7 à émettre. De même, l’homme qui animait une conférence de presse ce 30 juin n’a pas hésité à brandir un courrier du ministère de la communication adressé au «gérant de Kanal 7 qu’il est».
Seulement, il est rappelé que le 27 mai 2011, soit 16 mois après le premier contact avec Blaise Louembé, Mouidy-Mouidy, que «son nouveau patron» accusait de faire courir des médisances sur lui, est contraint de ne plus se prévaloir du titre de gérant de Kanal 7. Il lui est demandé d’évaluer le montant de l’usage de son nom, pour le volet administratif de la création de la télévision. Un préjudice que le fondateur de la station audiovisuelle lui demandera de calculer, d’où des annotations faites sur la lettre du requérant, sur un courrier daté du 29 juin 2011. «Oui mais faites une proposition. C’est vous qui vous plaignez !», avait écrit Louembe. Suffisant selon les juges pour légitimer les diligences accomplies par le requérant et de sa posture en tant que gérant.
En réponse à ces allégations, Blaise Louembe estime que s’il y a une dépense engagée par Mouidy-Mouidy, c’est la production de son casier judiciaire déposé au cabinet de Maitre Mouyagha pour la constitution du dossier juridique. «Peu après, Mouidy-Mouidy a quitté le territoire gabonais pour un stage à l’étranger sans avoir jamais personnellement investit le moindre Fcfa. Il n’a donc pas pu exercer ses attributions de gérant. La télévision a continué à fonctionner comme avant la constitution juridique, sans gérant. La décision du CNC est intervenue le 3 août 2010, 6 ans après son début de fonctionnement», a relevé Blaise Louembe.
10 mois après la décision du CNC, Louembe qui se dit victime d’une campagne de désinformation entretenue par Mouidy-Mouidy, veut comprendre cet acharnement. L’accusation d’utilisation abusive de son nom notamment, doit être évalué pour solder définitivement cette affaire, d’où les annotations sur le courrier du 29 juin 2011, avait souhaité Louembe.
Blaise Louembé conteste également les allégations de «Maitre Paulette Oyane qui soutient que monsieur Mouidy-Mouidy a été évincé de son emploi de gérant. Bien au contraire, l’intéressé est toujours attendu à cet emploi à Koulamoutou», précise le ministre, souhaitant par son conseil, Me Taty, «qualifier et détailler le montant sur la période de 10 mois sans travailler» pour les justifier, mais aussi et surtout lever l’exécution provisoire attachée à cette décision de justice, relève le recours.
Par ailleurs, la démarche de Mouidy-Mouidy, soutient le ministre, s’apparente à celle d’un prête nom. Et au regard des dispositions du code de la communication en la matière, c’est le plaignant qui risque d’être sanctionné. En effet, l’article 70 du code de la communication (ancien code) dispose que : « Il est interdit de prêter son nom, de quelque manière que ce soit, à toute personne qui sollicite la délivrance d’un agrément de création et d’exploitation d’une entreprise de communication audiovisuelle. » Par ailleurs, précise-t-il, l’article 91 du code de la communication dispose que « quiconque aura prêté son nom ou emprunté le nom d’autrui, en vue de la création, de l’installation ou de l’exploitation d’une entreprise de communication audiovisuelle, sera puni d’un emprisonnement de deux à six mois et d’une amende de 500.000 à 5.000.000 FCFA». Pour le ministre de l’Égalité des chances qui affirme que «Mouidy-Mouidy ne fait pas partie des actionnaires de Kanal7 qui est une SA», cette ligne de défense ne saurait convaincre les juges.
Auteur : Alain Mouanda