Les éléments et arguments pour la plainte déposée, le 30 juin dernier, contre la présidente de la Cour constitutionnelle du Gabon, poursuivie en France pour escroquerie, abus de confiance, faux et usage de faux, ne semblent pas être de l’avis de tous et résistent mal à l’histoire de l’UOB.
Accusée pour escroquerie, abus de confiance, faux et usage de faux, la présidente de la Cour constitutionnelle du Gabon fait à nouveau l’objet d’une plainte déposée en France contre elle. Cette fois, un pharmacien et un observatoire gabonais, domiciliés à Paris, ont déposé une requête devant le parquet national financier.
Selon Maitre Moutet, l’avocat des requérants, Marie-Madeleine Mborantsuo n’aurait pas la qualification requise pour assumer les fonctions de présidente de la Cour constitutionnelle du Gabon. La raison : un diplôme de maîtrise supposé falsifié. Celui-ci, apparaissant clairement dans sa biographie officielle, indique qu’il lui a été délivré en 1979 à l’Université Omar Bongo (UOB), bien avant qu’elle n’intègre le corps de la magistrature à la Cour des comptes en qualité d’auditeur.
Seulement voilà : en se fondant sur l’ordonnance 29/71 qui organisait le Centre universitaire des sciences juridiques, économiques et sociales d’alors, les plaignants estiment qu’à cette époque l’UOB ne délivrait que la licence et l’accès à la magistrature ne se faisait que par concours.
«Son diplôme n’est pas une falsification»
Cet argument est infondé note un bon nombre de Gabonais de sa cohorte. Ceux-ci rappellent qu’à cette époque (1979), «la faculté de droit délivrait des licences Bac+4, conformément à l’ancien régime des universités françaises. Mais quand la France a fait la réforme pour en arriver au nouveau régime de licence correspondant à Bac+3, nous les licenciés qui avions passé la licence sous l’ancien régime de Bac+4, avions obtenu automatiquement l’équivalent de la maitrise. La promotion de Mborantsuo, comme celles qui les ont précédées, allaient alors en France et étaient accueillies en troisième cycle avec leur licence Bac+4, qu’on appelait licence, mais qui en fait était devenue maitrise. Donc elle n’a pas falsifié», confie Gilles Térence Nzoghe, conseiller membre du Conseil national de la communication (CNC), ancien étudiant de l’UOB au cours de la période 75-80.
Même son de cloche chez Norbert Ngoua Mezui, directeur du journal ‘’Nku’u Le Messager’’, proche de l’opposition, qui a également fait ses humanités au sein de cette université durant la période en question : «Qu’on l’aime ou ne l’aime pas, il faut savoir restituer la vérité. Son diplôme n’est pas une falsification», souligne-t-il après avoir déroulé une histoire identique à celle déclinée par Gilles Térence Nzoghe.
Intégration de la cour des comptes
Quant à l’intégration de Marie-Madeleine Mborantsuo à la magistrature «à travers un poste d’auditeur à la Chambre des comptes de la Cour suprême», une source de la Cour des comptes rappelle qu’à titre exceptionnel on pouvait intégrer cette structure. Pour rentrer à la Cour des comptes (ancienne «Chambre des comptes»), le principe commande de recruter les meilleurs élèves l’Ecole nationale d’administration (ENA) et de l’Institut de l’économie et des finances (IEF), mais aussi les diplômés en droit à partir de la maîtrise. L’institution n’a du reste jamais eu «une école en tant que telle».
Alors que la falsification du diplôme de maitrise induit une usurpation de la qualité de magistrat, la plainte nourrit en conséquence l’ambition de démontrer que l’utilisation de l’argent public en cette qualité et dans ses fonctions de présidente de la Cour constitutionnelle est un détournement de fonds publics. La falsification étant battue en brèche par les témoins, contemporains de Mborantsuo durant ses études universitaires, les charges devraient naturellement s’estomper.
Du fait que la France contribue au financement de l’Association des Cours constitutionnelles ayant en partage l’usage du français (ACCPUF), la justice française serait compétente pour cette affaire concernant une personnalité étrangère, indique-t-on. Reste à savoir quelle suite sera réservée à cette la plainte, vu que la falsification attaquée est contredite par l’histoire de l’Université Omar Bongo.
Auteur : Alain Mouanda