Le chef d’Etat gabonais vient d’effectuer une visite d’amitié et de travail à La Havane. Officiellement, la visite est destinée à donner un nouveau souffle au partenariat entre le Gabon et Cuba dans le cadre de la stratégie de diversification des partenaires initiée par le président gabonais depuis sa réélection contestée à la tête du pays. Ali Bongo à la recherche donc de nouveaux alliés, continue à snober l’Europe et particulièrement la France où son principal opposant Jean Ping est aussi en visite.
C’est en grande pompe que le président gabonais vient de conclure une visite officielle de travail et d’amitié à La Havane où Ali Bongo était arrivé jeudi dernier à la tête d’une importante délégation. Le chef d’Etat gabonais a regagné Libreville ce lundi après avoir été reçu par les principaux responsables de l’île notamment le président Raúl Castro Ruz et a conduit plusieurs visites protocolaires et de travail dans la capitale cubaine.
L’un des faits marquants de la visite a été la tenue, samedi dernier, du forum économique cubano-gabonais, qui a réunit des hommes d’affaires et officiels des deux pays. Selon la présidence gabonaise, l’événement a consisté à « croiser les expériences et à générer des projets d’investissements ainsi qu’à favoriser les retours d’expérience sur les vecteurs d’industrialisation ».Durant son séjour cubain, le chef de l’Etat gabonais a fait part aux autorités de l’île, de son souhait d’imprimer une nouvelle dynamique au dialogue bilatéral entre les deux pays, lesquels entretiennent des relations diplomatiques depuis une quarantaine d’année avec à la clé une quinzaine d’accords multisectoriels. Durant cette visite, la deuxième du genre qu’effectue Ali Bongo à Cuba après celle de septembre 2012, les deux pays ont paraphés de nouveaux accords de partenariat dans le domaine de l’éducation et de la santé ainsi que des échanges sur les voies et moyens pour étendre cette dynamique à d’autres secteurs comme le commerce, l’agriculture, l’industrie, le tourisme ou même le sport.
La visite a donc été des plus fructueuses à en croire la présidence gabonaise qui tient également à marquer d’un caractère historique ce déplacement, lequel a été « l’occasion de magnifier l’engagement révolutionnaire cubain dans les luttes africaines pour l’indépendance et de souligner la fraternelle destinée des peuples noirs, quelques semaines après la tenue à Libreville d’une rencontre des afro-descendants ».
Nouveaux partenaires
Après donc la Chine en décembre dernier, sa première destination après sa réélection contestée et qui annonçait déjà les couleurs de la nouvelle orientation diplomatique de Libreville, c’est sur Cuba que le chef d’Etat gabonais a jeté son dévolu. Il y avait certes l’intermède saoudien en juin dernier à l’occasion du sommet arabo-musulman-américain puis une virée américaine au siège de l’ONU toujours dans le même mois, mais les déplacements à l’extérieur du continent du chef d’Etat gabonais sont assez rares et surtout assez illustratifs de la volonté d’Ali Bongo de prendre ses distances avec certains anciens partenaires stratégiques occidentaux auprès de qui il n’a plus désormais la côte.
La visite hors du continent revêt un cachet particulier pour Ali Bongo qui depuis sa réélection contestée de l’année dernière, continue toujours à snober l’Europe et particulièrement la France pourtant un des principaux anciens partenaires stratégiques du Gabon.
Il est vrai que depuis l’élection présidentielle d’Aout 2016 et la crise postélectorale qui a suivi, les relations entre le Gabon et la France ont pris beaucoup de coups avec les différentes prises de positions d’officiels français et même de l’UE.
Le séjour cubain du président Ali Bongo intervient d’ailleurs en pleine nouvelle polémique à la suite de la diffusion, la semaine dernière, d’un nouveau documentaire pas du tout tendre de l’émission « Complément d’enquête » qui a été diffusé le 6 juillet dernier sur France 2 sous le titre: « le clan Bongo, une histoire française». Le mouvement de contestation du chef d’Etat qui est particulièrement actif en France s’est de nouveau trouvé ragaillardi et alors que Bongo s’apprêtait à regagner Libreville, son principal challenger Jean Ping qui se considère toujours comme « le président élu », arrivait lui à Paris où ses partisans continuent à manifester à la place Trocadéro. Pour ne rien arranger, la justice française a ces derniers temps ouvert plusieurs informations judiciaires visant des proches du locataire du palais du bord de mer ainsi qu’une enquête sur les violences post-électorales, ce qui n’a pas manqué d’agacer encore une fois Libreville.
A Cuba tout comme en Chine, la visite d’Ali Bongo vise donc assurément à conforter sa stature sur la scène internationale même si l’économie du pays, qui traverse une conjoncture assez difficile, impose de chercher de nouveaux alliés. Les élections législatives sont prévues dans quelques mois et face au vent de constatation de son régime qui se poursuit, Ali Bongo a plus que jamais besoin de nouveaux soutiens moins regardant sur la politique intérieure gabonaise et surtout près à lui fournir l’aide nécessaire pour faire face au front de l’opposition qui compte lui sur la pression des puissances occidentales pour parvenir à ses fins.