Présentée, il y a quelques semaines, comme une des femmes de chefs d’Etat africains les plus dépensières, Sylvia Bongo Ondimba s’est quelques fois intéressée aux questions ne rentrant pas forcément dans son rôle. Il nécessite plus que jamais de préciser le statut de l’épouse du président de la République gabonaise.
S’il serait difficile voire ingrat de lui reprocher certaines actions, notamment dans la lutte contre le Sida et les cancers du col de l’utérus et du sein, à travers sa fondation éponyme, le cas Sylvia Bongo Ondimba mérite tout de même d’être interrogé. La Première dame ne bénéficie officiellement d’aucun statut en République gabonaise. Pourtant, l’épouse d’Ali Bongo n’a pas fini de prendre de l’importance, au point qu’elle s’est souvent vue confier, au cours du premier mandat de son époux, quelques projets loin de relever de son rôle.
Sylvia Bongo à la place du gouvernement
En 2013, par exemple, plutôt que de laisser au gouvernement ses missions régaliennes, c’est à elle que le président de la République avait confié l’épineuse question de la pauvreté au Gabon. Chargée de faire une photographie du phénomène et d’indiquer aux autorités gabonaises les mesures à prendre pour éradiquer cette pauvreté devenue endémique, la Première dame avait alors commandé une enquête au cabinet d’étude américain McKinsey & Company dont elle aurait, selon la version officielle, supervisé le rapport portant stratégie d’investissement humain.
Si le montant du budget alloué pour la réalisation de cette étude n’a jamais été officiellement communiqué (18 milliards de FCFA selon le député Massala Tsamba, 8 milliards selon Ona Ondo alors Premier ministre), les politiques visant à éradiquer la pauvreté des Gabonais restent attendues, au point que la direction générale de la Statistique et des Etudes économiques (DGSEE) a lancé, il y a quelques jours, une enquête similaire. Celle-ci ayant d’ailleurs été financée grâce à un prêt de la Banque mondiale en 2015. A quoi a donc servi de confier cette mission à Sylvia Bongo Ondimba ? Combien la Première dame a-t-elle été rémunérée pour ce travail ? On est droit de savoir.
Parmi les dépenses consenties par la Première dame ces dernières années, il faut prendre en compte les déplacements effectués par elle et son équipe dans le cadre des activités de la Fondation Sylvia Bongo Ondimba pour la famille (FSBO). Combien, par exemple, a coûté son tour du Gabon profond en hélicoptère, en mai 2014 ? Qui de l’Etat gabonais ou de la FSBO a financé cette tournée ? Mystère. Le même mystère qui demeure sur le chéquier utilisé par l’épouse d’Ali Bongo pour ses achats personnels en Europe.
Du shopping à 600 millions de francs
Présentée comme une des femmes de chefs d’Etat africains les plus dépensières, Sylvia Bongo Ondimba, selon l’émission Complément d’enquête diffusée sur France 2 en juillet dernier, a dépensé un million d’euros, soit près de 656 millions de francs CFA, en un an, Place Vendôme à Paris. Il s’agit notamment de dépenses de shopping : 132 000 euros (86,5 millions de francs CFA) pour des bijoux chez le joaillier Van Cleef et 144 000 (94,4 millions de francs CFA) chez Hermès. Questions : La Première dame perçoit-elle un salaire officiel ? Si oui, à combien s’élève celui-ci ? Si non, de qui ou de quoi tire-t-elle ses revenus ?
Preuve, s’il en fallait que l’épouse d’Ali Bongo est étonnamment dépensière, sa Carte Bleue a été mise sous surveillance par Tracfin, le service de renseignement placé sous l’autorité du ministère français de l’Action et des Comptes publics. Ce qui impose plus que jamais à la présidence de la République de préciser ou d’actualiser officiellement le statut du conjoint du chef de l’Etat. Ça en devient une nécessité.
L’exemple français
Le Gabon gagnerait à suivre l’exemple de la France, qui, lundi 21 août, à travers une «charte de transparence relative au statut du conjoint de chef de l’Etat», a précisé le rôle et la fonction de Brigitte Macron. L’on sait, entre autres, que l’épouse d’Emmanuel Macron ne bénéficiera «d’aucune rémunération» en tant que Première dame et ne «dispose pas de frais de représentation» ni «d’aucun budget propre».
L’on sait aussi que les moyens financiers nécessaires aux activités de Brigitte Macron figurent déjà dans le budget de l’Elysée, et soumis au contrôle de la Cour des comptes «qui en rendra compte publiquement par un rapport spécifique». Au moment où Ali Bongo prône la réduction du train de vie de l’Etat, ses proches devraient eux-mêmes se serrer la ceinture, pour montrer l’exemple.