Le 14 décembre, le président gabonais Ali Bongo a inauguré le nouveau port international d’Owendo construit par GSEZ Port, une joint-venture entre le groupe singapourien OLAM, l’Africa Finance Corporation (AFC) et l’État gabonais. Quelques jours avant l’inauguration du nouveau port, le groupe Bolloré, OLAM, et l’État gabonais ont conclu un accord, non encore rendu public, mais dont Africapostnews est parvenu à avoir quelques détails. Retour sur les évènements qui ont conduit le groupe Bolloré à devenir propriétaire d’un terminal à conteneurs qu’il n’a pas construit au nouveau port d’Owendo.
En 2007, le groupe Bolloré obtient la concession du terminal à conteneurs et de l’activité conteneurisée dans le domaine portuaire d’Owendo où a été érigé le plus grand port gabonais. Pour cette concession qui doit durer jusqu’en 2027, le groupe du milliardaire français Vincent Bolloré s’engage à moderniser l’équipement, agrandir l’infrastructure portuaire et procéder à une baisse des tarifs.
Selon les informations que nous avons recueillies, entre 2012 et 2014, l’État gabonais aurait rappelé au groupe Bolloré via sa filiale locale STCG, le retard pris dans la mise en œuvre de ses obligations contractuelles notamment l’agrandissement de l’infrastructure portuaire et la baisse des tarifs. L’absence de proactivité du groupe Bolloré a convaincu l’État gabonais d’appuyer le projet de construction d’un second port à Owendo qui lui était proposé par le groupe OLAM.
OLAM a vendu son terminal à conteneurs à Bolloré, faisant une belle marge au passage
En effet, l’industriel OLAM devenu un partenaire commercial privilégié de l’État gabonais depuis le premier mandat d’Ali Bongo avait affiché sa volonté de disposer d’une infrastructure portuaire moderne et d’un débouché maritime pour écouler ses produits ainsi que ceux issus de la zone économique spéciale de Nkok qu’il gère. En plus d’un port minéralier, d’un terminal pour le vrac, l’Etat gabonais ne s’est pas opposé à ce que GSEZ Port, la filiale d’OLAM, construise un terminal à conteneurs, plus grand, mieux équipé et plus moderne que celui du groupe Bolloré.
Face à la concurrence naissante du terminal à conteneurs du nouveau port d’Owendo, le groupe Bolloré, habitué à opérer en situation de monopole, a déposé une plainte contre l’État gabonais au tribunal arbitral de Paris. Pour le groupe Bolloré, au regard du contrat de concession de 20 ans qu’il a signé avec l’État, il ne pouvait y avoir deux opérateurs assurant la gestion de l’activité conteneurisée dans le périmètre portuaire d’Owendo jusqu’en 2027.
Après quelques mois de procédure, une négociation tripartite a été ouverte à Libreville entre l’État gabonais, le groupe Bolloré et le groupe OLAM. Au terme de cette négociation, 3 décisions principales ont été prises :
Le groupe Bolloré accepte de retirer sa plainte au tribunal (ce qu’il a fait il y a quelques semaines).
Le rachat du terminal à conteneurs du groupe OLAM par Bolloré. Si le montant de la transaction est encore gardé secret, le groupe OLAM serait rentré dans ses fonds et aurait réalisé financièrement une bonne opération selon nos sources. Quant à Bolloré, le nouveau terminal à conteneurs racheté intègre sa concession et va lui permettre de doubler les capacités actuelles de son parc à conteneurs et peut-être dans quelques mois doubler son volume d’activité.
GSEZ Port conserve la gestion du terminal vrac et du terminal minéralier de son nouveau port. Ainsi les activités portuaires du groupe Bolloré se limitent à une concession de conteneurs.
Pour résumer cet accord, Gagan Gupta, le Directeur général d’OLAM Gabon déclarait que l’État en sort gagnant puisqu’il a réussi à obtenir une nouvelle infrastructure portuaire sans rien investir, Bolloré récupère une activité dont il est spécialiste et OLAM se recentre sur son cœur d’activité. Reste à savoir si revenu en situation de monopole, le groupe Bolloré qui est de plus en plus décrié pour ses pratiques au Gabon et ailleurs en Afrique respectera cette fois-ci ses engagements contractuels envers le Gabon.