Réunie devant la presse le 14 novembre, la Cour constitutionnelle, saisie par le Premier ministre Emmanuel Issoze Ngondet, a annoncé qu’après modification de l’article 13 de la Constitution gabonaise, le vice-président gabonais était désormais autorisé à président un Conseil des ministres.
« En application des dispositions de l’alinéa ajouté à l’article 13 de la Constitution, la Cour constitutionnelle, en sa qualité d’organe régulateur du fonctionnement des institutions, autorise le vice-président de la République à convoquer et à présider un Conseil des ministres qui portera exclusivement sur l’ordre du jour joint à la requête du Premier ministre », a annoncé le 14 novembre au soir le juge François de Paul Antony Adiwa.
En l’absence du président Ali Bongo Ondimba, hospitalisé le 24 octobre à l’hôpital King Faisal de Riyad à la suite d’un AVC, Pierre-Claver Maganga Moussavou, vice-président du Gabon, a donc reçu le feu vert de la Cour constitutionnelle pour présider un Conseil des ministres.
« Indisponibilité temporaire »
L’autorisation de la Cour constitutionnelle fait suite à l’ajout, par la plus haute juridiction du pays, présidée depuis 1991 par Marie-Madeleine Mborantsuo, d’un alinéa à l’article 13 de la Constitution concernant l’empêchement du président de la République d’exercer ses fonctions. Jugeant que l’article 13 comporte « une lacune qu’il convient de combler », l’alinéa ajouté précise que cette disposition s’applique « en cas d’indisponibilité temporaire du président du la République pour quelque cause que ce soit, certaines fonctions (…) peuvent être exercées, selon le cas, soit par le vice-président de la République, soit par le Premier ministre, sur autorisation spéciale de la Cour constitutionnelle ». L’alinéa ne fixe aucune limite à cette indisponibilité « temporaire ».
Aucun Conseil des ministres n’a été organisé depuis trois semaines. Mercredi 14 novembre, avant la décision de la Cour, Pierre-Claver Maganga Moussavou évoquait déjà auprès de Jeune Afrique la possibilité d’en organiser un « avant la fin de la semaine ».
C’EST UN MOYEN DE COURT-CIRCUITER LA VACANCE », SELON LE POLITOLOGUE WILSON-ANDRÉ NDOMBET
« Théoriquement il n’y a qu’un vote des deux tiers de l’Assemblée où un référendum qui puisse autoriser la modification d’un article de la Constitution », explique le politologue Wilson-André Ndombet. « L’article 84 de la Constitution explique que la Cour constitutionnelle peut statuer sur les conflits d’attribution entre les institutions de l’État. Cette décision de la Cour est peut être une interprétation de cet article mais tout ça reste volontairement flou. C’est un moyen de court-circuiter la vacance. Rien n’est précisé dans cet alinéa, à commencer par la durée de l’absence du chef de l’État. Deux semaines, quatre mois, un an… cela peut donner lieu à toutes les interprétations et toutes les manipulations », ajoute-t-il.
Réveil d’Ali Bongo
Avant cet ajustement de la Constitution, seule une habilitation expresse et circonstanciée du président de la République pour la durée de son séjour en Arabie saoudite pouvait permettre à Pierre-Claver Maganga Moussavou de diriger un Conseil des ministres. Aucun document de la sorte ne semble avoir été signé par Ali Bongo Ondimba avant son départ pour l’Arabie saoudite.
Peu d’informations circulent sur la durée de l’indisponibilité d’Ali Bongo Ondimba. Dans sa deuxième communication officielle après l’hospitalisation du chef de l’État, Ike Ngouoni Aïla Oyouomi, le porte-parole de la présidence, avait précisé qu’Ali Bongo Ondimba était « en phase de recouvrement de la plénitude de ses facultés physiques ». « Le président, qui a été victime d’un mini-AVC aggravé par de l’hypertension, va mieux. On lui a enlevé l’assistance respiratoire, et il va entamer une rééducation. Il est réveillé et commence à voir ses proches. Tout sera rentré dans l’ordre d’ici deux ou trois semaines », confiait le 9 novembre à Jeune Afrique une source haut placée au Palais du bord de mer en contact quotidien avec Riyad.