Le président américain a signé, jeudi, un décret visant à limiter la protection dont bénéficient les services comme Twitter et Facebook.
Donald Trump est passé à l’acte, jeudi 28 mai. Ulcéré par la décision de Twitter d’ajouter un lien à deux messages publiés mardi qui spécifiait qu’il avançait des contre-vérités à propos de la fiabilité du vote par correspondance, le président des Etats-Unis a signé un décret exécutif qui invite les agences fédérales concernées à réexaminer la pierre angulaire sur laquelle se sont développés les réseaux sociaux. Il s’agit de la section 230 (c) de la Communications Decency Act, une loi de 1996, qui prévoit que les sites et services qui permettent aux internautes de publier des messages ne sont pas directement responsables de ces messages.
« Ils ont le pouvoir non contrôlé de censurer, éditer, dissimuler ou modifier toute forme de communication entre des individus et de larges audiences publiques. Il n’y a pas de précédent dans l’histoire américaine qu’un si petit nombre de sociétés contrôlent une si grande sphère d’interaction humaine », a pesté le président des Etats-Unis à propos des mastodontes des réseaux sociaux. La charge est paradoxale puisque l’ancien homme d’affaires a bâti en partie sa carrière politique sur un usage effréné de Twitter. Son compte est suivi aujourd’hui par plus de 80 millions d’abonnés.
Un geste pour l’instant surtout politique
Le geste est potentiellement dévastateur, mais il reste pour l’instant surtout politique. Rien ne dit en effet que les agences concernées qui sont théoriquement indépendantes, la Federal Communications Commission et la Federal Trade Commission, choisissent d’obtempérer. Comme de nombreux décrets présidentiels signés par Donald Trump, celui paraphé jeudi est aussi la garantie d’un intense combat juridique en l’absence d’un soutien clair du Congrès. Ce dernier est difficilement envisageable à propos d’un sujet aussi polémique compte tenu de la polarisation politique.
Les hostilités devraient être accentuées par la proximité de l’élection présidentielle. Des démocrates se sont indignés jeudi d’une tentative d’intimidation de Twitter considéré de longue date comme défavorable aux conservateurs par ces derniers. Le camp des réseaux sociaux est tout aussi divisé puisque Mark Zuckerberg, le patron du géant Facebook, a pris ses distances avec l’initiative de Twitter, tout en exprimant ses plus grandes réserves par rapport à l’initiative de Donald Trump.
A la veille de la signature du décret présidentiel, Jack Dorsey, le directeur général de Twitter, a indiqué qu’il n’entendait pas reculer. « Nous continuerons à signaler des informations incorrectes ou contestées », a-t-il assuré. Des liens similaires à celui qui a déclenché l’offensive de Donald Trump ont ainsi été ajoutés depuis à des dizaines de messages publiés sur la plate-forme, dont ceux de Zhao Lijian, un porte-parole du ministère chinois des affaires étrangères. Ce dernier y affirmait que l’épidémie due au coronavirus avait peut-être commencé aux Etats-Unis et s’était propagée en Chine du fait de l’armée américaine.